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La vie intellectuelle en Europe au 18ème siècle

dimanche 4 février 2018, par lucien jallamion

La vie intellectuelle en Europe au 18ème siècle

Au début du 18ème siècle, l’influence littéraire du 17ème siècle, que l’on appelle aussi parfois le "grand siècle", et auquel est attaché le nom de Louis XIV se continue à peine dans les dernières années de sa vie. La chaire et la littérature ecclésiastiques ont encore Fénelon, qui survit 11 ans à Bossuet, et meurt la même année que le roi soleil. Massillon, déjà célèbre par ses prédications, publie son Petit carême en 1717, prêché devant le jeune Louis XV. La littérature est variée, mais sans éclat. Les recherches diplomatiques de Mabillon, les travaux d’érudition de Montfaucon, des comédies de Regnard, des tragédies de Crébillon, des odes et des épigrammes de J.-B. Rousseau, des éloges académiques de Fontenelle, même l’Oedipe de Voltaire, essai d’un poète de 24 ans, caractérisent moins l’époque que les Lettres persanes de Montesquieu, données en 1711.

Le Véronais Mafféi, par sa tragédie de Mérope en 1743 commence une réforme dans l’art dramatique en Italie. Le Napolitain Gravina compose une poétique, et recherche, en habile jurisconsulte, l’origine et le sens des lois anciennes. Un poète lyrique, Métastase, qui est né à Rome d’une famille pauvre, par sa Didon abandonnée, excite à Naples un universel enthousiasme, quelques mois après l’apparition de “la Henriade” de Voltaire en France. Il ira chercher fortune à la cour d’Autriche. Écrire contre l’autorité temporelle du saint-siège, en Italie même, était une chose trop hardie pour que l’Apulien Giannone, auteur d’une histoire civile du royaume de Naples, ne fût pas persécuté.

Les ouvrages de l’Allemand Stahl, écrits en latin, élèvent la chimie au rang des sciences. Leibniz, auquel Leipzig où il est né, Berlin, Saint-Pétersbourg, même Dresde et Vienne, doivent de puissants encouragements donnés aux études, ne meurt qu’en 1746. Newton lui survit de quelques années. En Angleterre, c’est le temps des poètes Pope, Prior, Gay, Congreve ; après Shaftesbury, la plume rend puissants Swift, Addison, Defoe, et Steele. Bolingbroke, ancien ministre d’Anne Stuart et négociateur de la paix d’Utrecht, tour à tour proscrit et réhabilité, avide d’agitation politique, ennemi de la révélation chrétienne, passionné pour l’étude des lettres, est le précurseur de Voltaire. La secte des méthodistes commence avec John Wesley.

En France, les controverses du jansénisme*, qui enfantent tant de libelles et de scandales, sont cause de la disgrâce de Rollin. Privé de toute fonction dans l’Université de Paris, il consacre aux lettres les dernières années de sa vie. La science morale et pratique de l’éducation, l’histoire des peuples de l’Antiquité exposée avec les monuments littéraires de la Grèce et de Rome, sont ses titres de gloire. Montesquieu fait une révolution dans l’art historique par son livre sur la Grandeur et la Décadence des Romains en 1734. Voltaire étonne, excelle dans tous les genres. Brutus, César, Mahomet, mis sur la scène, aussi bien que des personnages de l’époque des croisades ou des héros du nouveau monde ; l’Histoire de Charles XII ; les Lettres philosophiques ; l’esquisse du Siècle de Louis XIV, l’Essai sur les moeurs et l’esprit des nations ; l’étude des sciences dans la retraite ; son voyage à Berlin auprès de Frédéric II, roi despote et bel esprit, pour lequel la philosophie et les lettres étaient un passe-temps mais non un enseignement, disent l’activité merveilleuse, la tolérance, le bon sens, mais aussi le caractère adulateur du grand écrivain.

Les progrès des sciences exactes sont attestés par l’invention du thermomètre de Réaumur, et par les résultats des voyages qu’entreprennent, dans le nord de l’Europe, des savants pour déterminer la forme de notre planète* (Forme et dimensions de la Terre aux 17 et 18ème siècles). La Hollande possède, dans Boërhaave, le plus célèbre médecin de l’Europe, qui renferme en un seul système général l’histoire, les causes, les symptômes, et le traitement de toutes les maladies.

Dans la deuxième moitié du 18ème siècle, La royauté de l’esprit se partage entre Montesquieu qui publie l’Esprit des lois, Buffon qui donne les premiers volumes de son Histoire naturelle, Jean Jacques Rousseau qu’un premier succès de rhéteur et de sophiste enhardit à rechercher l’origine de l’inégalité sociale parmi les humains, à réformer à la fois l’humain et l’État, Voltaire enfin qui domine tout le siècle. Voltaire, après avoir joui tour à tour de la protection de Mme de Pompadour, de la duchesse du Maine, du bon duc de Lorraine, Stanislas Leckzinski , et du roi de Prusse, trouvera la liberté et l’aisance du grand seigneur dans le pays de Gex. Il deviendra le patriarche de Ferney. Il enrichit à la fois les deux scènes de la tragédie et de la comédie ; il crée un nouveau genre de romans, tout en achevant ses grands travaux d’histoire. Diderot et d’Alembert fondent l’Encyclopédie qui est comme une tribune offerte aux orateurs de la raison en guerre avec la religion révélée. L’Italie perd Muratori, érudit infatigable qui a rendu de grands services à l’histoire nationale. L’écossais David Hume, historien et philosophe, affiche un nouveau scepticisme. Lessing crée pour sa part la nouvelle littérature de l’Allemagne ; par la critique et l’analyse, il pose les lois de l’art et de la poésie. L’Angleterre et bientôt l’Europe se passionnent pour la brillante production de Richardson, Clarisse Harlowe. Rousseau donne coup sur coup le Contrat social, qui sera le symbole de foi de la démocratie révolutionnaire. La Nouvelle Héloïse, qui s’adresse au coeurs faibles et ardents, l’Émile, code hardi et impraticable d’éducation privée et de croyances déistes. Ce dernier ouvrage vaut des persécutions à son auteur. Le parlement de Paris ne ménage pas plus les philosophes que les protestants et les jésuites, le jansénisme, devenu une faction jugée odieuse et ridicule, obtient cependant l’expulsion des jésuites, qui est un triomphe pour les philosophes.

Le mathématicien Euler, expose avec clarté d’importants résultats en mécanique, astronomie, optique, acoustique. Condorcet compose ses premiers ouvrages de mathématiques. Franklin publie sa théorie de l’électricité, et apprend à éviter les effets terribles de la foudre. La Suède a un grand naturaliste, Linné ; en France, Bernard de Jussieu forme une nouvelle classification botanique, et bientôt Lavoisier renouvellera la science de la chimie. En Angleterre Jenner découvrira la vaccine.

Le 17ème siècle avait pénétré jusqu’aux profondeurs de l’espace pour y découvrir la forme elliptique des astres, mesurer leur grandeur, assigner la force respective de leurs attractions. Les observations du 18ème se portent sur notre globe, sur la matière qui le compose, l’atmosphère qui l’entoure, les fluides mystérieux qui l’agitent, les êtres variés qui l’animent. A la fondation véritable de l’astronomie succède celle de la physique, de la chimie, de l’histoire naturelle positive. A Galilée, à Képler, à Huygens, à Newton, à Leibniz succèdent Franklin, Priestley, Lavoisier, Berthollet, Laplace, Volta, Linné, Buffonet Cuvier.

L’ardeur des voyages par Terre et surtout par mer, qui étendent les limites du monde connu, se communique de l’Angleterre à la France, à la Hollande, même à la Russie. Les terres océaniques, les régions polaires sont explorées. Les missions chrétiennes y suivront bientôt les navigateurs. La nouvelle image du monde est un tissu de merveilles sous la plume des navigateurs Bougainville et Cook. L’histoire des deux Indes de Raynal, l’Histoire de l’Amérique de Robertson, déjà célèbre comme historien de Charles-Quint, paraissent à quelques années l’une de l’autre. La première, surtout est empreinte profondément de l’esprit philosophique.

A ce moment même, les colonies anglaises de l’Amérique septentrionale deviennent le théâtre de la révolution qui débouchera sur l’indépendance des États-Unis. Au début de la guerre d’Amérique, beaucoup d’hommes ayant marqué le siècle de leurs empreintes s’éteignent. William Pitt, qui est devenu lord Chatham, le naturaliste Linné, Haller, savant, médecin et auteur de poésies allemandes. Jean Jacques Rousseau, 5 semaines après Voltaire, dont la correspondance embrasse plus d’un demi-siècle et en retrace presque toute l’histoire politique et littéraire.

Les excès de la Révolution française ont conduit à la mort des savants et des intellectuels tels que Lavoisier, Bailly, Condorcet et beaucoup d’autres. Mais la fin du 18ème siècle va aussi, à l’occasion de la campagne d’Égypte, permettre l’expression de la dernière grande manifestation de "l’esprit des Lumières", avec la préparation d’une nouvelle Encyclopédie, cette fois plus thématique. Ce sera la monumentale Description de l’Égypte, publiée au début du siècle suivant.

P.-S.

L’Europe au 18ème siècle Source : Imago mundi Texte de Léonardon/ article de Fabienne Manière/herodote/ evenement/17720428/dossier 414