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L’Espagne durant la 2ème partie du 18ème

lundi 17 février 2025, par lucien jallamion (Date de rédaction antérieure : 17 mars 2018).

L’Espagne durant la 2ème partie du 18ème

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Charles IV d’Espagne et sa famille peinte par Goya. La reine est représentée au centre du tableau pour signifier sa domination sur son mari le roi.

Le règne de Charles III

A la nouvelle de la mort de Ferdinand VI en 1759, Charles III quitta Naples [1] où il régnait depuis 12 ans déjà, laissant la couronne à son second fils Ferdinand 1er des Deux-Siciles , et partit avec son fils aîné pour prendre possession du trône d’Espagne.

L’ambitieuse Élisabeth Farnèse put avant de mourir voir l’élévation inespérée de ses enfants. Charles III était déjà d’âge mûr, rompu aux affaires, et, en Toscane [2] comme à Naples [3], il avait montré un esprit modéré et sagement réformateur. Il se rapprocha de la cour de France, signa en 1761 le pacte de famille [4], et prit ainsi part à la fin de la guerre de Sept ans [5], ce qui valut à l’Espagne de sérieux échecs sur mer.

Sous son règne l’Espagne intervint également dans la guerre d’Indépendance des États-Unis d’Amérique, espérant reprendre aux Anglais Gibraltar [6]. Quelques expéditions contre le Maroc en 1774 et Alger en 1775 et 1785 ne furent pas plus heureuses.

Charles III s’occupa avec plus de succès de réformer l’administration aidé par des ministres tels que Ricardo Wall ou Richard Wall , le marquis d’Esquilache Leopoldo de Gregorio , Grimaldi, Pedro Rodríguez de Campomanes , le comte d’Aranda Pedro Pablo Abarca de Bolea , José Moñino y Redondo de Floridablanca , il ramena un peu d’ordre dans les finances et créa d’utiles institutions. Quand il mourut en 1788, il laissait à son fils un État qui commençait, semblait-il, à sortir d’une longue décadence et à se relever.


Le règne de Charles IV

Charles IV , qui succède à Charles III n’avait aucune des qualités de son père ; esprit étroit, caractère faible, il laissa tout le pouvoir à la reine et aux ministres, Florida Blanca, puis d’Aranda, faisant déclarer aux Cortès, par une loi qui ne fut pas publiée, le droit pour les infantes d’hériter de la couronne, principe qui avait toujours prévalu en Espagne, mais avait été ensuite répudié par les Cortès sous Philippe V. L’intrigue et la faveur firent tout à la cour que dominait Manuel Godoy , le favori de la reine. A l’extérieur, le gouvernement, fidèle au pacte de famille, fut en bons termes avec la France tant que Louis XVI régna ; mais son procès et son arrestation, au commencement de 1793, amenèrent de la part de la cour de Madrid des représentations qui furent mal accueillies de la Convention et auxquelles celle-ci répondit par une déclaration de guerre.

Les Espagnols, sous les ordres de Pedro Caro y Sureda et Antonio Ricardos , l’emportèrent d’abord sur la frontière des Pyrénées qu’ils envahirent. Les Français commandés par Luc Dagobert et Louis Marie Turreau en 1793, puis sous Jacques François Dugommier et Bon-Adrien Jeannot de Moncey , prirent le dessus et pénétrèrent en Espagne. Godoy, qui était devenu ministre et avait conseillé la guerre, signa le traité de Bâle le 22 juillet 1795 [7] et fut décoré pour cela du titre de prince de la Paix en 1797, la France et l’Espagne conclurent une alliance offensive et défensive. Cependant il ne pu rester longtemps ministre en titre et, sans perdre la faveur du roi, en 1798, fut remplacé par Urquijo.

L’Angleterre faisait alors à l’Espagne une guerre acharnée et ruineuse ; Bonaparte voulut resserrer l’alliance avec elle pour lutter contre la marine britannique, et en faisant luire aux yeux de Charles IV l’espoir d’un agrandissement notable de territoire pour son gendre, le prince de Parme, il l’entraîna à lui donner quelques-uns de ses navires et à lui promettre l’entier concours de sa flotte. Le roi devint le jouet de Bonaparte et, quand il perdit sa flotte à Trafalgar, il n’eut pas pour cela de compensation en 1804.

L’année suivante, il vit avec douleur son parent, le roi de Naples, dépossédé, et, comme il ne pouvait se résoudre à reconnaître pour son remplaçant le frère de Napoléon, Joseph , il s’attira, outre le mépris, la haine de l’empereur. Celui-ci, dès lors, dut songer à mettre la main sur l’Espagne. Il flatta les espérances de Charles IV et de Godoy lui-même au sujet du Portugal, exploita habilement l’inimitié du prince des Asturies, Ferdinand , à l’égard du favori de son père, et, attendant les événements, envoya Junot conquérir le Portugal en même temps qu’il massait une armée sur la frontière des Pyrénées, prête à agir.

C’est alors qu’éclata une tragédie domestique qui eut pour effet de faire arrêter le prince Ferdinand. Mais le 17 mars, à Aranjuez [8], le peuple se souleva en sa faveur et en haine de Godoy, et Charles IV dut abdiquer tandis que son fils était proclamé roi.

On sait comment Napoléon se joua de cette famille royale si peu unie, comment il les attira à Bayonne [9], les amena à abdiquer en sa faveur et donna cette couronne d’Espagne à son frère Joseph, que Murat alla remplacer sur le trône de Naples. A cette nouvelle, la nation poussa un long cri de colère et de haine. De Madrid, où le signal fut donné le 2 mai, l’insurrection gagna en quelques jours toute la péninsule et arma contre la France tout un peuple, pour cette longue et impitoyable lutte que l’histoire a appelée la guerre de l’Indépendance de 1808 à 1813 [10], et qui marqua pour l’Espagne l’entrée dans le 19ème siècle

P.-S.

L’Europe au 18ème siècle Source : Imago mundi Texte de Léonardon/ article de Fabienne Manière/herodote/ evenement/17720428/dossier 414

Notes

[1] Le royaume naquit de la scission de fait du royaume de Sicile, provoquée par les Vêpres siciliennes de 1282. Le roi Charles d’Anjou, chassé de l’île de Sicile par les troupes de Pierre III d’Aragon, ne se maintint que sur la partie continentale du royaume. Naples devint la capitale de ce nouveau royaume, ce qui provoqua une forte croissance de la ville qui était auparavant supplantée par Palerme. Sous le règne de Robert 1er, le royaume connaît une période de paix et de prospérité. Le roi fit de Naples l’un des centres culturels de l’Italie, invitant à sa cour Giotto, Pétrarque et Boccace. La seconde partie du 14ème siècle vit cependant s’amorcer une période de déclin due à la lutte fratricide entre deux branches adverses de la dynastie angevine pour régler la succession de Robert 1er puis celle de sa fille, la reine Jeanne 1ère. La maison d’Anjou-Duras finit par triompher, avec Charles III, duc de Duras, qui fit assassiner la reine Jeanne en 1382. Son fils, Ladislas 1er, étendit provisoirement le royaume sur une bonne partie de l’Italie centrale, caressant le rêve d’unifier la péninsule. À sa mort sans héritier en 1414 c’est sa sœur, Jeanne II, qui monta sur le trône.

[2] La Toscane, dirigée d’abord par des margraves et des marquis aux 9ème et 10ème siècles, devint un ensemble de cité-États à statut républicain-oligarchique. Au 15ème siècle, avec Cosme de Médicis, elle est progressivement réunifiée dans une seule entité politique et passe entre les mains de la famille des Médicis, l’une des plus puissantes durant la Renaissance. Cette famille a gouverné la Toscane du 15ème au 18ème siècle.

[3] Le royaume naquit de la scission de fait du royaume de Sicile, provoquée par les Vêpres siciliennes de 1282. Le roi Charles d’Anjou, chassé de l’île de Sicile par les troupes de Pierre III d’Aragon, ne se maintint que sur la partie continentale du royaume. Naples devint la capitale de ce nouveau royaume, ce qui provoqua une forte croissance de la ville qui était auparavant supplantée par Palerme. Sous le règne de Robert 1er, le royaume connaît une période de paix et de prospérité. Le roi fit de Naples l’un des centres culturels de l’Italie, invitant à sa cour Giotto, Pétrarque et Boccace. La seconde partie du 14ème siècle vit cependant s’amorcer une période de déclin due à la lutte fratricide entre deux branches adverses de la dynastie angevine pour régler la succession de Robert 1er puis celle de sa fille, la reine Jeanne 1ère. La maison d’Anjou-Duras finit par triompher, avec Charles III, duc de Duras, qui fit assassiner la reine Jeanne en 1382. Son fils, Ladislas 1er, étendit provisoirement le royaume sur une bonne partie de l’Italie centrale, caressant le rêve d’unifier la péninsule. À sa mort sans héritier en 1414 c’est sa sœur, Jeanne II, qui monta sur le trône.

[4] Le 3ème pacte de famille est le traité signé le 15 août 1761, en pleine guerre de Sept Ans, à l’instigation du duc de Choiseul, entre le roi de France, le roi d’Espagne et le duc de Parme, qui avait pour but de prévenir, par l’union des forces françaises, espagnoles et parmesanes, la supériorité de la marine anglaise. Ce traité n’eut pas tous les résultats espérés : le roi des Deux-Siciles refusa d’y souscrire du fait de la prudence du conseil de régence dirigé par Tanucci (le roi étant alors mineur). Une convention secrète prévoyait l’entrée en guerre de l’Espagne le 1er mai 1762 si la paix n’était pas rétablie à cette date. L’Espagne anticipa son entrée dans le conflit dès janvier 1762.

[5] La guerre de Sept Ans, qui se déroule de 1756 à 1763, est un conflit majeur de l’histoire de l’Europe, le premier qui puisse être qualifié de « guerre mondiale ». Elle concerne en effet les grandes puissances européennes de cette époque, regroupées en deux systèmes d’alliance, et a lieu sur des théâtres d’opérations situés sur plusieurs continents, notamment en Europe, en Amérique du Nord et en Inde.

[6] Gibraltar est un territoire britannique d’outre-mer, situé au sud de la péninsule Ibérique, en bordure du détroit de Gibraltar qui relie la Méditerranée à l’océan Atlantique. Il correspond au rocher de Gibraltar et à ses environs immédiats et est séparé de l’Espagne par une frontière de 1,2 kilomètre. Gibraltar est possession du Royaume-Uni depuis 1704. Au début du 8ème siècle, dans le cadre de la conquête musulmane de l’Espagne wisigothique, le chef Tariq ibn Ziyad y établit une tête de pont en Europe, donnant son nom au rocher. Le site est conquis, en 1309, par le royaume de Castille, puis repris par le général mérinide Abd-el-Melek en 1333 expulsant les Castillans. En 1374, les Mérinides cèdent le rocher au royaume de Grenade. Gibraltar est définitivement reconquis par Ferdinand V en 1492.

[7] La version définitive du traité a été signée le 22 juillet 1795. Il était composé d’un préambule et de 17 articles mais également de 3 articles secrets et séparés. Dans le traité, on établissait que la France restituait les territoires occupés en Espagne, qui, en compensation du recouvrement des territoires des Pyrénées, céderait à la France la partie orientale de Saint-Domingue (la République dominicaine actuelle). Les Français contrôlaient déjà la partie occidentale de l’île, Saint-Domingue, l’actuel Haïti, depuis la signature du traité de Rijswijk en 1697, les relations commerciales entre les deux pays seraient régularisées. Les autorités espagnoles sont obligées d’évacuer le territoire dominicain. La colonisation française de l’île de Saint-Domingue entière est officielle.

[8] Aranjuez est une commune espagnole située dans la communauté de Madrid. Elle s’étend sur un territoire de 189,1 km2 à la forme allongée, limité à l’ouest par le cours du Tage, qui forme comme une excroissance de la communauté de Madrid dans la Castille-La Manche. Le centre urbain d’Aranjuez est situé à 44 km au sud de Madrid. Le 17 mars 1808, la ville est le théâtre d’une révolte contre le favori du roi Charles IV, qui a pour conséquence l’abdication de ce dernier en faveur de son fils Ferdinand VII

[9] Bayonne est située au point de confluence de l’Adour et de la Nive, non loin de l’océan Atlantique, aux confins nord du Pays basque et sud de la Gascogne, là où le bassin aquitain rejoint les premiers contreforts du piémont pyrénéen. Elle est frontalière au nord avec le département des Landes, et la limite territoriale franco-espagnole se situe à une trentaine de kilomètres au sud.

[10] La guerre d’indépendance espagnole opposa l’Espagne des Bourbons, le Portugal et le Royaume-Uni à la France entre 1808 et 1814, dans le contexte des guerres napoléoniennes. La guerre commença en 1808 lorsque Madrid se souleva contre l’armée française occupant la capitale espagnole. L’insurrection se généralisa à tout le pays après que Napoléon eut obtenu l’abdication du roi d’Espagne au profit du frère de l’empereur, Joseph. L’armée française se heurta à une guérilla puis à l’armée britannique venue aider le Portugal, également occupé par les troupes de Napoléon. En 1813, les soldats de l’empereur durent refluer en deçà des Pyrénées ; l’invasion de la France par les Espagnols, Britanniques et Portugais commandés par Wellington, devenait imminente.