Il fut un noble franco normand proche des rois d’Angleterre Henri 1er et Étienne et du roi de France Louis VII.
Fils de Robert de Beaumont, comte de Meulan et 1er comte de Leicester, et d’Élisabeth de Vermandois, fille d’ Hugues le Grand .
Adolescents, avec son frère cadet Robert ils sont adoptés par la cour royale peu après la mort de leur père en 1118. Le roi confie leurs terres à un groupe de gardiens, notamment leur beau-père Guillaume II de Warenne et Néel d’Aubigny.
Ils accompagnent le roi Henri 1er Beauclerc en Normandie, à l’occasion d’une rencontre avec le pape Calixte II, en 1119. Les deux frères engagèrent un débat philosophique avec les cardinaux, preuve de leur haute éducation sous la tutelle d’Henri.
En 1120, les frères sont adoubés, est Galéran reçoit son héritage. Galéran reçoit le stratégique comté de Meulan en Vexin français ainsi que les honneurs normands de Beaumont, Brionne, Pont-Audemer et Vatteville et leurs châteaux. En Angleterre, il acquiert des domaines dans le Dorset [1] et à Winchester. Il est donc à la fois vassal du roi de France et du roi d’Angleterre. Quant à son frère jumeau et cadet Robert, il reçoit les possessions anglaises et le titre de comte de Leicester. Ils deviennent rapidement les principaux conseillers du roi, et leur sœur Isabelle devient sa maîtresse.
Fin 1122 ou début 1123, Galéran prend part à la rébellion menée par Amaury III de Montfort, comte d’Évreux, pour le compte de Guillaume Cliton. Ce dernier, en tant que fils de l’ancien duc Robert Courteheuse, revendique le duché de Normandie.
La participation du comte de Meulan étonne car comme son père, il a témoigné jusque-là d’une fidélité sans faille pour le roi d’Angleterre. Notamment, il n’a pas participé à la précédente révolte des barons contre Henri 1er en 1118-1119.
Le duc-roi débarque donc en Normandie, et s’empare du château de Pont-Audemer après un court siège. Galéran, ses 3 beaux-frères et Amaury de Montfort s’enferment dans le château de Vatteville, près de la Seine. Ils le quittent en mars 1124 pour se rendre à Beaumont-le-Roger mais un fidèle du roi, Ranulph le Meschin , 3ème comte de Chester, leur tend une embuscade sur la route, près de Bourgtheroulde [2], le 25 mars 1124. Ils sont capturés sauf Amaury et Guillaume Louvel qui parviennent à s’enfuir.
Henri 1er condamne Galéran et ses 2 beaux-frères, Hugues IV de Montfort et Hugues de Neufchâtel, à l’emprisonnement. Dépouillé de ses possessions normandes, le comte de Meulan est détenu pendant 5 ans, d’abord à Rouen puis en Angleterre à Bridgenorth et Wallingford [3], parfois attaché à des chaînes.
Il est soudainement libéré et restauré dans la faveur royale en 1129. Une des raisons possibles à ce revirement d’attitude d’Henri 1er est peut-être le besoin d’hommes sûrs pouvant convaincre les barons sceptiques d’accepter sa fille Mathilde comme successeur. Une autre explication pourrait-être qu’il a été convaincu par Isabelle, la sœur de Galéran, sa maîtresse. Tout le restant de règne du roi, Galéran est régulièrement présent à sa cour et jouit pleinement de sa confiance.
Les 2 frères étaient présents au chevet de son lit de mort. La succession est promise à Mathilde l’Emperesse, la fille du roi, mais Étienne de Blois usurpe le trône en prétendant que le roi a changé d’avis en ses derniers instants.
Il s’ensuit une guerre civile pour la couronne d’Angleterre qui prend forme en 1138 et s’accentue avec le débarquement en Angleterre de Mathilde l’Emperesse. Les 2 frères prennent alors parti pour Étienne d’Angleterre en échange d’un don important de terres et du mariage de Galéran avec Mathilde, l’une des filles du roi âgée seulement de 2 ans et qui mourra avant d’être mariée. Les concessions du roi sont les villes de Worcester et Droitwich, ainsi que tous les domaines royaux du Worcestershire [4].
Avec ses terres importantes et ses contacts politiques en Normandie et en Île-de-France, Galéran joue un rôle central en essayant d’obtenir l’allégeance des Normands à Étienne de 1136 à 1139. Apparemment, c’est à lui que le roi confie la défense du duché face aux prétentions de Geoffroy V d’Anjou, l’époux de Mathilde l’Emperesse, et donc le gendre d’Henri 1er. Il repousse deux offensives de ce dernier et fait prisonnier Roger III de Tosny , partisan des Angevins dans une bataille près d’Acquigny [5] le 3 octobre 1136. Au printemps 1137, Étienne est en visite dans un duché pacifié, et il le récompense en lui donnant la garde du comté d’Évreux et la vicomté de la ville.
Il est de retour en Angleterre en 1137, alors que la Normandie est dorénavant sous contrôle. En novembre, il est envoyé pour repousser une invasion écossaise et vient soulager la garnison du château de Wark qui était assiégée. Il est de nouveau dans le duché au printemps 1138 pour combattre des soulèvements, principalement celui de Robert, le comte de Gloucester, fils illégitime d’Henri 1er, et donc demi-frère de Mathilde l’Emperesse. Il accompli sa mission avec succès, ravageant les domaines du comte Robert et mettant fin aux exactions de la famille de Tosny. Il retraverse la Manche à la fin de l’année, pour être fait comte de Worcester en décembre 1138.
La position de Galéran et de son frère Robert à la cour d’Angleterre s’apparente à un statut de favoris du roi. Leur position est renforcée cette même année 1138 par la défection de Robert de Gloucester, fils illégitime d’Henri 1er, au profit de Mathilde l’Emperesse et de son mari. Le clan des Beaumont-Meulan se heurte rapidement à une autre faction puissante, celle formée autour du justicier [6] Roger, évêque de Salisbury . Roger fait partie des conseillers d’Henri 1er qu’Étienne a dû maintenir pour porter à son tour la couronne d’Angleterre. Son fils occupe la charge de chancelier. Ses neveux sont les évêques de Lincoln et d’Ely.
En juin 1139, la cour royale réunie à Oxford ordonne l’arrestation des évêques et la saisie de leurs châteaux et de leurs charges. Roger et son fils meurent peu après tandis que son neveu Alexandre de Lincoln peut recouvrer sa chaire épiscopale mais pas ses forteresses. Étienne d’Angleterre choisit comme nouveau chancelier Philippe d’Harcourt, un proche de Galéran de Meulan. Le parti des jumeaux triomphe donc auprès du roi.
Mathilde l’Emperesse débarque dans le Sussex fin septembre 1139, et la guerre civile éclate véritablement en Angleterre. Le 7 novembre, Robert, le comte de Gloucester, attaque Worcester [7], la détruisant en partie et emportant un large butin. Le 13 novembre, Galéran reprend la ville faisant de nombreux prisonniers.
En représailles, au printemps suivant il ravage des possessions de son ennemi, la ville de Tewkesbury [8] et la vallée d’Evesham. Il combat avec énergie dans le Worcestershire et le Gloucestershire [9], là où les combats sont les plus féroces.
En 1141, il commande pour Étienne à la bataille de Lincoln [10], où le roi est fait prisonnier. Il réussit à s’enfuir.
Après plusieurs mois de résistance, en septembre 1141 à la suite de nombreux officiers de la cour et de barons anglais, Galéran abandonne la cause du roi pour embrasser la cause de l’Emperesse. Ce revirement est d’autant plus urgent qu’en Normandie l’avance des Angevins menace ses terres. Le comte de Meulan part pour le duché, et ne remet plus les pieds en Angleterre. Pourtant ses possessions lui sont confirmées. Il est accueilli par son nouveau suzerain, le comte d’Anjou Geoffroy Plantagenêt. Pour prix de sa soumission, ce dernier lui remet le château de Montfort-sur-Risle [11], soit une nouvelle forteresse dans la vallée de la Risle. Fin 1141 début 1142, il épouse Agnès la fille du défunt comte d’Évreux Amaury III de Montfort. Elle apporte comme dot l’honneur de Gournay-sur-Marne [12].
Il est bien accueilli par les Angevins, étant un guerrier et un leader reconnu, d’une lignée prestigieuse et riche. Il aide notamment Geoffroy Plantagenêt à soumettre Rouen, la capitale ducale en 1144. Le comte d’Anjou devient ainsi duc de Normandie.
Le comte de Meulan est absent de France de 1144 à 1145, car il est en pèlerinage à Saint-Jacques de Compostelle. À peine revenu, il s’engage dans la deuxième croisade aux côtés de Louis VII de France, de l’empereur Conrad III et de Guillaume III de Warenne . Il est peu probable qu’il fasse partie de l’expédition collatérale qui aide le roi du Portugal, Alphonse 1er à prendre Lisbonne aux Maures.
De retour en 1149, l’ancien favori d’Étienne d’Angleterre est peu à peu exclu du pouvoir en Normandie. Son influence décline avec la venue à maturité d’Henri Plantagenêt, le fils de Mathilde l’Emperesse et de Geoffroy Plantagenêt.
En 1153, il est capturé par son neveu Robert de Montfort sur volonté d’Henri Plantagenêt, qui l’emprisonne à Orbec [13]. Il semble qu’Henri reproche à Galéran d’être trop proche du roi de France Louis VII. La même année, son titre de comte de Worcester et ses possessions anglaises lui sont confisqués, et contrairement à son frère, il n’y a pas de place pour lui après l’accession d’Henri Plantagenêt au trône d’Angleterre en 1154.
Il est toujours proche de Louis VII, mais est particulièrement vulnérable dans le conflit entre les deux souverains. En 1160, il accompagne Louis VII dans une campagne dans le Vexin, et en représailles toutes ses terres normandes et ses châteaux sont confisqués dont ceux de Pont-Audemer et Beaumont-le-Roger mais ils lui seront restitués en 1162.
Il est inactif le reste de sa vie. Il tombe malade au printemps 1166 et se fait moine à Préaux. Il meurt quelques jours plus tard, le 9 ou le 10 avril. Il est inhumé dans la salle capitulaire de l’abbaye familiale. Son fils Robert lui succède sauf pour l’honneur de Gournay qui reste en la possession de sa veuve puis passe à son fils cadet Amaury.
Il se montre un grand fondateur de monastères. Il installe les abbayes cisterciennes de Bordesley [14] dans le Worcestershire en 1138. Il est d’ailleurs un ami du pape cistercien Eugène III. Il fonde aussi le prieuré bénédictin à Gournay-sur-Marne, non loin de Paris. L’abbaye familiale de Préaux, près de Pont-Audemer, l’accueillit dans ses derniers jours.