Originaire du diocèse d’Avranches [1], il est formé, en même temps que Néel d’Ely, dans les écoles de Laon par Anselme de Laon. Il est le neveu de l’évêque Roger de Salisbury, chancelier d’Angleterre [2] sous le règne de Henri 1er. Alexandre est aussi apparenté à Néel d’Ely, trésorier puis évêque d’Ely [3]. Formé au chapitre de Laon, il entre au service de son oncle en tant qu’archidiacre [4] en 1121. Contrairement à ses parents, Alexandre n’exerce aucune charge administrative avant d’avoir été consacré évêque de Lincoln en 1123.
Il fonde plusieurs institutions religieuses, il fut un grand bâtisseur et un mécène réputé. Il fut particulièrement actif dans l’organisation de son diocèse, où il étend le principe des prébendes pour subvenir aux besoins de ses auxiliaires religieux. Sous le règne du roi Étienne, Alexandre subit les conséquences de la disgrâce de son oncle Roger. Il est arrêté et jeté en prison. Réconcilié avec le roi, il se consacre uniquement à la gestion de son diocèse.
Il change régulièrement d’allégeance dans la guerre civile qui agite le royaume pendant presque tout le règne d’Étienne. Au cours de son apostolat, il entreprend la reconstruction de la cathédrale de Lincoln, qui avait été incendiée, pensionne plusieurs poètes et chroniqueurs dont les plus connus sont Henri de Huntingdon et Geoffroy de Monmouth, et soutient l’action de Gilbert de Sempringham , fondateur de l’Ordre de Saint-Gilbert [5], et de l’ermite Christine de Markyate.
Contrairement à son cousin Néel d’Ely, Alexandre paraît s’être abstenu d’exercer des missions administratives avant sa consécration en tant qu’évêque, et il ne paraphe un décret royal, en tant que témoin, qu’une seule fois avant 1123.
Après la mort de Robert Bloet en janvier 1123, Alexandre est choisi par Henri 1er d’Angleterre pour prendre sa succession à la tête de l’évêché de Lincoln en avril 1123. Il est consacré à Cantorbéry le 22 juillet suivant. Il doit cette promotion à l’influence de son oncle, chef de l’administration anglo-normande, auprès du roi Henri 1er.
Devenu évêque, Alexandre fonde plusieurs monastères, dont probablement le prieuré gilbertin d’Haverholme, les monastères cisterciens de Louth Park dans le Lincolnshire, de Thame [6] dans l’Oxfordshire [7]. Elle se trouve 20 kilomètres à l’est d’Oxford. et l’abbaye arrouaise de Dorchester on Thames [8].
Le nouvel évêque de Lincoln fait également édifier les châteaux de Newark [9], Sleaford [10] et Banbury [11]. Il confirme les privilèges de l’église de Godstow, et fait rattacher l’Abbaye de St Albans [12] à son diocèse.
Sous son épiscopat, treize abbayes cisterciennes dont sept couvents voient le jour dans le diocèse. Alexandre crée aussi une léproserie à Newark-on-Trent [13], et consacre en personne l’église du prieuré de Markyate pour Christine de Markyate et ses religieuses.
Quoique Alexandre apparaisse comme témoin dans la signature de nombreux actes et décrets, rien ne prouve qu’il exerce une charge gouvernementale, comme le font ses parents Roger et Néel. On pense qu’il a pu exercer les fonctions de juge royal pour la ville de Lincoln et le comté du Lincolnshire.
Il est certainement présent au synode de Westminster de 1125 convoqué par le légat du pape [14], Jean de Crema, et on sait qu’il accompagne ce dernier à Rome pour son voyage de retour. Alexandre passe l’hiver 1125-1126 dans la cité papale pendant qu’est discutée, à la curie romaine, le conflit pour la primauté entre les archevêchés de Cantorbéry et York.
En 1126, il est possible qu’il aide à obtenir du souverain pontife la confirmation des droits de son oncle sur les abbayes de Malmesbury [15], d’Abbotsbury [16], et de Horton. Il crée une huitième charge d’archidiacre dans son diocèse, chargée du riding [17] de l’ouest du Lindsey.
Il prend certainement part au concile légatin de 1127, et est présent à celui de 1129, tous deux convoqués par l’archevêque de Cantorbéry Guillaume de Corbeil . En 1133 et 1134, il se querelle avec ce dernier, possiblement pour des problèmes de coutumes et de droits diocésains. Ces deux prélats se rendent finalement en Normandie en 1134 pour en appeler au jugement du roi Henri 1er.
À la mort du roi Henri 1er d’Angleterre, le 1er décembre 1135, le trône doit passer à sa fille Mathilde, qui est connue sous le nom de Mathilde l’Emperesse du fait de son premier mariage avec l’empereur Henri V du Saint Empire. En effet, le seul fils légitime d’Henri, Guillaume, est mort en 1120. Lorsque Mathilde devient veuve en 1125, elle retourne en Angleterre, où son père la remarie au comte Geoffroy V d’Anjou dit Plantagenêt. Mais Henri 1er n’a jamais convaincu ses barons que Mathilde pourrait gouverner par elle-même.
Alexandre a comme tous les barons et grands ecclésiastiques, fait serment de reconnaître Mathilde comme son héritière et successeur. Prévenu de la mort du roi, Étienne de Blois en profite. Il traverse la Manche et rejoint au plus vite Londres. Là, les citoyens le reconnaissent pour roi. Il se rend ensuite à Winchester, siège du trésor et de l’administration royale, où son frère, Henri de Blois , est évêque. Grâce au soutien de ce dernier et de Roger de Salisbury, l’archevêque de Cantorbéry Guillaume de Corbeil accepte de le couronner.
Dans la foulée, les barons normands le reconnaissent comme leur duc. Roger de Salisbury poursuit ses fonctions de chef de gouvernement durant les premières années du règne, avec plusieurs membres de sa famille. Il est probablement le régent du royaume pendant la visite d’Étienne en Angleterre en 1137. Son influence dans les affaires politiques et ecclésiastiques commence à décliner quand Étienne prend la mesure de son royaume et que son frère Henri devient légat papal en 1139. Pendant ce temps, Mathilde réagit avec calme, et s’assure d’abord de l’appui du roi David 1er d’Écosse , son oncle maternel. Puis en 1138, c’est Robert de Gloucester, bâtard d’Henri 1er qui rejoint sa cause.
Au début de 1139, Étienne fait de Guillaume d’Aubigny un comte de Lincoln [18], peut-être pour limiter l’autorité d’Alexandre sur le Lincolnshire. Plusieurs barons, probablement jaloux du train de vie et de la puissance de Roger de Salisbury, essaient de convaincre Étienne que celui-ci pourrait très bien rejoindre la cause de l’Emperesse. Le comte Galéran IV de Meulan arrive finalement à le persuader de se débarrasser de l’évêque Roger et de ses nombreux parents. Roger est convoqué le 24 juin 1139 à la cour royale d’Oxford, avec Alexandre et Néel. Il est alors victime d’une machination organisée contre lui. Un incident armé, provoqué volontairement par les hommes d’Alain de Dinan, dégénère et se conclut par plusieurs morts et blessés.
Roger est accusé d’être responsable de l’incident et donc d’avoir brisé la paix dans le royaume. Il est alors sommé de rendre tous ses châteaux en garantie de sa bonne foi. À son refus, Alexandre est arrêté, et emprisonné à Oxford.
Néel, quant à lui, réussit à s’échapper et se réfugie dans le château de son oncle à Devizes [19]. Étienne l’assiège et menace de pendre Roger le Pauvre, le fils de Roger de Salisbury. Il obtient alors la reddition de l’évêque. Dans la foulée, les autres châteaux en possession de Roger sont confisqués. Ensuite, Alexandre doit accompagner le roi pour lui remettre la garde de tous ses châteaux épiscopaux notamment ceux de Sleaford et Newark. Le roi les confie au comte Robert de Leicester. Ce dernier en profite pour s’emparer du même coup de terres que l’évêque de Lincoln possède près de Leicester.
Selon une chronique de l’époque, la Gesta Stephani [20], cette arrestation est destinée à éviter que les forteresses du Lincolnshire ne tombent aux mains de sa rivale Mathilde.
Alexandre excommunie le comte Robert de Leicester, puis en appelle au pape Innocent II pour obtenir la restitution du château de Newark, et celui-ci lui donne raison. L’évêque de Winchester Henri de Blois, frère d’Étienne, vient d’être nommé légat du pape. Il le convoque donc devant sa cour en août 1139. Le roi est accusé de ne pas avoir tenu sa promesse sur les libertés cléricales et doit répondre de cette accusation. Étienne arrive à écarter les charges qui pèsent sur lui, mais ses arrestations lui ont attiré l’hostilité du clergé. Sa situation s’en tient en fait à un statu quo, les deux partis se menaçant réciproquement d’excommunication et d’en appeler au pape.
Peu après, Alexandre semble s’être réconcilié avec le roi. Durant la suite de son épiscopat, il se consacre uniquement aux affaires diocésaines, quoique dans le conflit opposant Étienne à Mathilde, il change régulièrement d’allégeance.
En 1141, Alexandre et les habitants de Lincoln en appellent au roi pour obtenir qu’il s’occupe du comte de Chester [21] Ranulph de Gernon qui s’est emparé du château de Lincoln. Étienne met le siège devant le château, où la femme du comte et son demi-frère s’étaient retranchés, le comte lui-même ayant fui et proposé ses services à Robert de Gloucester, demi-frère et commandant en chef des forces militaires de Mathilde.
Le 2 février 1141, une bataille d’importance a lieu à Lincoln entre les deux camps, à l’issue de laquelle Étienne est capturé. Alexandre rejoint la cour que Mathilde a convoquée à Oxford en juillet 1141 pour affirmer son autorité sur le Royaume d’Angleterre ; mais lorsque Mathilde arrive à Londres, les citoyens contestent son pouvoir et la chassent de la ville ; puis Robert de Gloucester, le principal appui de Mathilde, est à son tour capturé. Ce revers de fortune se termine par un échange de prisonniers. Étienne contre Robert de Gloucester. La guerre civile continue jusqu’en 1148, aucun des deux camps ne parvenant à prendre le dessus.
En 1145, Alexandre rejoint la cour du pape à Rome et il y reste une grande partie de l’année 1146. Il rejoint la cour papale à Auxerre, en août 1147, pour rencontrer le pape Eugène III.
Alexandre meurt en février 1148, et est inhumé dans sa cathédrale, le 25 février 1148. Il est certainement mort le 20 février, date commémorative retenue par le chapitre de Lincoln.