Clou de fondation dédié par Entemena, roi de Lagash, au roi de la ville de Bad-Tibira, à l’occasion du traité de paix conclu entre Lagash et Uruk. Le texte est le plus ancien document diplomatique connu ; il en existe en tout 46 exemplaires sur cône d’argile. Découvert à Tello, ancienne cité de Girsu, 2400 av. J.-C. (Musée du Louvre)
Notre alphabet provient, en ligne directe, de celui qu’utilisaient les Romains qui l’avaient eux-mêmes reçu des Grecs. Pourtant, ni les Grecs ni les Romains ne sont les inventeurs de l’alphabet dont la paternité revient aux Phéniciens. En effet, l’histoire de l’alphabet a commencé sur l’eau. Ce sont les Phéniciens [1], peuple de marins installés au Liban actuel, qui en dispersèrent le principe autour de la Méditerranée entre le 10ème et le 8ème siècle av. jc. Leur apport fut souligné dès l’Antiquité par Hérodote comme par Pline. C’est un alphabet de type linéaire composé de 22 signes se distinguant nettement des signes cunéiformes [2] par leur tracé en ligne droite ou courbe. Grâce à leurs 22 consonnes représentant les sons élémentaires de la langue et certainement empruntées aux Syriens d’Ougarit [3], ils feront entrer les Araméens [4] (8ème av. jc), Hébreux (7ème av. jc) et autres Arabes (6ème de notre ère) dans le monde de l’écrit. Les Phéniciens ont transmis ce système révolutionnaire aux Grecs. L’alphabet tire son nom des deux premières lettres de sa version grecque : alpha et bêta. Avec un peu d’imagination, on peut reconnaître dans alpha (notre A) l’image d’une bête à corne car à l’origine, cette lettre représentait le bœuf. Quant à bêta, c’est le signe phonétique inspiré du mot maison. Maison se dit en effet beth dans les langues sémitiques (comme dans Bethléem, lieu de naissance de Jésus-Christ). Mais ce sont les Grecs qui eurent le plus d’influence sur les écritures européennes : perfectionnistes, ils intègrent au 8ème siècle av. jc des voyelles, héritées de consonnes araméennes et prennent soin de distinguer capitales et minuscules. Leur goût pour le commerce, qui leur fait traverser les mers, et surtout la richesse de leur littérature leur permirent de diffuser leur alphabet dans tout le bassin méditerranéen [5]. Les Grecs ont modifié l’alphabet phénicien afin qu’il puisse rendre compte de leur propre langage, qui comporte de nombreuses voyelles. En effet, l’alphabet phénicien ne compte que des consonnes. Cette particularité, assez peu gênante pour des langues sémitiques comme l’arabe et l’hébreu, qui offrent peu de voyelles, devenait insurmontable pour transcrire le grec. Pour tourner la difficulté, les Grecs eurent l’idée d’emprunter à l’alphabet araméen divers signes représentant des consonnes inconnues de leur langue et d’en faire des voyelles. Ainsi sont nées les lettres A (alpha), E (epsilon), O (omicron) ou Y (upsilon). En 405 avant Jésus-Christ, un archonte [6] du nom d’Euclide (rien à voir avec le mathématicien), introduit à Athènes la variante milésienne [7], avec ses 24 lettres. Du fait du rayonnement intellectuel d’Athènes, la réforme euclidienne ne tarde pas à se généraliser à l’ensemble de la Grèce continentale. Mais en Grande Grèce, autrement dit dans les colonies de la péninsule italienne, on en reste à d’autres variantes. En 146 av. jc, après l’annexion de la Grèce par Rome, l’alphabet grec fut assimilé par les nouveaux maîtres, moyennant des modifications. Il s’est étendu, à partir des 2ème et 3ème siècles de notre ère, à toutes les régions de l’Europe où les Romains s’étaient implantés et où s’écrivait le latin. Lorsque Rome, une cité latine en plein essor, adopte à son tour un alphabet, elle choisit celui de Neapolis [8], une colonie fondée par les habitants de Chalcis [9], une cité de l’île d’Eubée [10], en mer Egée [11]. C’est ainsi que les Grecs continuent aujourd’hui d’utiliser l’alphabet athénien, avec quelques modifications mineures, tandis que les lointains héritiers des Romains (les Européens de l’Ouest) utilisent l’alphabet chalcidien. Voilà l’origine des principales différences entre les alphabets grec et latin (par exemple le P grec qui s’écrit R en latin) La ponctuation Art d’accommoder les textes, ces petites pattes de mouches qui viennent s’intercaler entre les mots ont eu du mal à s’imposer. Pourtant, on s’est vite rendu compte que, sans cette aide, la lecture d’un texte devient vite pénible.
Les érudits de la bibliothèque d’Alexandrie [12] se penchent sur le problème au 2ème siècle av. jc et finissent par imposer 3 types de point. L’espace entre les mots, qui nous semble aujourd’hui naturel, n’apparaît qu’au 7ème siècle. Le texte commence à être observé pour ses qualités esthétiques qui inspirent aux enlumineurs et copistes la création des majuscules ornées. Ce n’est qu’après la diffusion de l’imprimerie que l’apostrophe fait son entrée dans la ponctuation, accompagnée des points d’interrogation et d’exclamation.