Encore mineur, il était écuyer en 1412. En 1417, il répondit à l’appel du comte d’Armagnac, désireux de réparer les pertes immenses d’Azincourt en 1415 et lutter contre les Anglais qui se préparaient à envahir le Maine [1].
Au hasard des combats, il était revenu dans sa petite seigneurie de Fontaine [2]. Son château, ruiné par tant de combats ne représentait plus que sa motte féodale aux ruines indéfendables. Le château primitif avait été bâti par Foulques Nerra, puis avait été reconstruit par les Plantagenets [3] sur l’autre versant du coteau, près de l’Altrée [4]. Yolande d’Aragon, reine de Sicile et comtesse d’Anjou, le fera fortifier et réparer en 1430.
A cette époque, Jean de Fontaine commandait la place de Baugé [5], quand les Anglais tentèrent de conquérir les terres situées au nord de la Loire. Elles appartenaient à Yolande d’Aragon, belle mère du dauphin Charles, une femme énergique qu’ils leur étaient conseillés de neutraliser.
Le soin de conduire l’offensive avait été confié à Thomas de Clarence. Ayant rencontré une certaine résistance devant Angers le 14 mars, il s’était installé à Beaufort en Vallée [6] et se dirigeait vers le nord, pensant que la région était dégarnie de troupes et que les Armagnacs ne disposaient que de faibles garnisons incapables de lui résister.
Guérin, renseigné par un espion, savait que les Anglais étaient proches et avaient pris ses dispositions lors du conseil de guerre du vendredi saint 21 mars.
Par un heureux hasard, les Écossais de Jean Stuart se trouvaient disponibles à proximité:ainsi que les Français du maréchal Gilbert de La Fayette Ils n’hésitèrent pas à rejoindre Guérin de Fontaines pour en découdre avec les Godons [7]. Guérin, enfant du pays, en connaissait les moindres recoins et avait choisi un terrain propice à la surprise, le « champ de la Lande-Charles », mais par respect envers l’interdiction canonique de combattre le dimanche, il avait fixé le jour de l’attaque au lundi suivant.
Clarence ignorait qu’il avait maintenant une véritable armée devant lui, supérieure au 1500 hommes dont il disposait. Le hasard voulut aussi que ses éclaireurs fassent prisonniers quatre Écossais qui devaient souffrir de déprime, car ils lui décrirent les Français comme une force assez négligeable.
Fort de cette conviction qu’il ne prit pas la peine de contrôler, Clarennce ordonna aussitôt le combat bien que l’on soit la veille de Pâques.
Pressé qu’il était de combattre, Clarence et sa troupe arrivèrent devant un petit pont sur le Couasnon [8], au val Boyer, gardé par des archers écossais. Poursuivant sa marche, il se heurta devant Baugé au lieu dit “le Pont des Fées”, à un petit détachement français commandé par Jean de la Croix en route pour rejoindre Jean de Fontaine.
Surpris, les Français se réfugièrent dans l’église Saint-Laurent de Baugé, alors en ruines et s’apprêtaient à résister dans le clocher. Clarence négligea cette faible résistance incapable de contrecarrer ses plans.
Il ne savait pas que les Français de Guérin de Fontaine et les Écossais de Jean Stuart l’attendaient à Vieil Baugé où ils l’attaquèrent.
Clarence, surpris par cette attaque en force aussi soudaine, trouva la mort au premier affrontement, peut être de la main de Carmichaël de Douglasdale [9] qui avait une dent contre lui. Les autres Anglais, surpris et démoralisés, furent taillés en pièces. Les pertes françaises se montaient quand même à 1100 hommes.
Les Anglais qui avaient survécu, déconfits se replièrent en Normandie Les rubriques disent qu’ils se cousirent des croix blanches pour feindre d’être français, passèrent sans être reconnus au pays de Maine et se sauvèrent ainsi des Angevins qui les poursuivaient.
Le bilan, cette fois ci, était favorable aux Français. Plus de 1200 chevaliers anglais étaient restés sur le champ de bataille avec Clarence et 14 autres seigneurs, sans compter les 600 piétons prisonniers qui n’avaient pu fuir.
L’étendard de Clarence sera porté en triomphe au Puy Notre-Dame [10] en signe de victoire. On dépêcha un courrier au dauphin Charles. Le dauphin en avait bien besoin car la victoire de Bauge en 1421 était la première victoire française après le désastre d’Azincourt en 1415. Elle avait coupé court à l’habituel raid de pillage des Anglais en Anjou et permettait de nouvelles espérances.
Jean Guérin avait bien mérité du dauphin qui, le 26 février 1422, lui donna la terre de Saint-Jean des Mortiers en marque de reconnaissance. Connaissant la pingrerie du futur Charles VII, cette attribution devait donc être amplement méritée. Jean Guérin épousa lors Jeanne Amenart. Il sera capitaine de la ville du Mans nouvellement reconquise et poursuivra la lutte contre les Anglais.
Un autre jour, Guérin de Fontaine et les capitaines voisins tombèrent sur un convoi anglais chargé des produits du pillage de Segré [11] qu’ils s’apprêtaient à mener en Normandie avec un troupeau de 1200 bovins. Ces richesses changèrent de propriétaire pour la plus grande satisfaction des services de trésorerie et du ravitaillement Le 26 janvier 1423, il est envoyé sous les ordres de Baudouin de Champagne au secours de Meulan [12].
Le dauphin Charles, désireux de conquérir la Champagne pour couper en deux les terres des ducs de Bourgogne, avait mis le siège devant Cravant [13], près d’Auxerre, occupée par les Bourguignons. Ce fut un désastre.
Jean Guérin de Fontaine y trouva la mort avec 2 ou 3000 franco écossais. C’était le 30 juillet 1423. Il n’avait que 27 ans. Sa veuve, encore jeune se remaria le 26 septembre 1427 avec Olivier de la Porte.