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L’histoire pour le plaisir

Bernard Garnier

mercredi 11 juin 2025, par lucien jallamion

Bernard Garnier (vers 1370-vers 1430)

Clerc du diocèse de Rodez

Représentation d'Avignon et du « palais forteresse » datant du début du 15ème siècle. (Atelier du maître de Boucicaut[, ms. 23279, f° 81, Bibliothèque nationale). Source : wiki/ Palais des papes d'Avignon/domaine publicÉlu pape par les ultimes partisans de la papauté d’Avignon [1] après la fin du grand schisme d’Occident [2].

Considéré comme un antipape dans la tradition catholique, il fut le dernier antipape d’Avignon.

Il reçoit le 15 juillet 1412 collation apostolique d’un bénéfice avec cure de 40 livres tournois, et sans cure d’âmes de 30 livres. Il est attesté comme vicaire de l’archidiacre [3] de Millau [4], Guirard Calhol, en 1413 et 1414. Il se rend en 1414 à la cour pontificale comme procureur de Bertrand Déodat acquitter le versement de l’annate [5] pour le prieuré de Saint-Saturnin de Creissels.

Il obtient de Benoît XIII anti pape plusieurs faveurs : le 20 novembre 1418, il reçoit provision du prieuré de Saint-Martin des Faux, puis le privilège de pouvoir choisir son confesseur. L’année suivante, Benoît XIII le désigne comme sous-collecteur apostolique pour le diocèse de Rodez [6], sous l’autorité de Jean Carrier . Il est désigné parmi les schismatiques condamnés par Martin V en juillet 1420.

En 1425, devenu “sacriste” au chapitre cathédral de Rodez [7], il bénéficie de la bienveillance du comte d’Armagnac qui lui attribue le 14 novembre 1425 l’office de conservateur du domaine comtal de Rouergue [8], deux jours seulement après avoir été secrètement élu pape par Jean Carrier.

Une seule pièce d’archive cite nommément Bernard Garnier comme Benoît XIV, mais il est vrai qu’un faisceau d’éléments en fait le personnage désigné pour avoir été celui qui a été élu par Jean Carrier. Il apparaît d’ailleurs dans les sources pontificales en même temps que ce dernier.

Il disparaît curieusement des sources d’archives pendant les années critiques autour de 1430. Il est donc impossible de connaître son attitude.

Il réapparaît à partir de 1437, rétabli comme sacriste, signifiant bien ainsi qu’il avait été démis de sa prébende. Réintégré dans le chapitre et même élu en 1437 comme bayle [9], il est malgré lui rattrapé par son passé.

Jean-Pierre d’Estaing lui conteste en 1450 la sacristie de Rodez devant le parlement de Toulouse l’accusant d’avoir soutenu le parti de Jean Carrier.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu du texte de Gérard Touzeau, Benoît XIII : le trésor du pape catalan, Perpignan, Mare nostrum, coll. « Trésors », 2009, 373 p., ill. en noir et en coul., couv. ill. ; 21 cm (ISBN 978-2-908476-86-6, ISSN 2110-9796, notice BnF no FRBNF42167746)

Notes

[1] La papauté d’Avignon désigne la résidence du pape à Avignon. Cette résidence, qui déroge à la résidence historique de Rome depuis saint Pierre, se divise en deux grandes périodes consécutives : • La première, de 1309 à 1378, celle de la papauté d’Avignon proprement dite, correspond à une époque où le pape, toujours reconnu unique chef de l’Église catholique, et sa cour se trouvent installés dans la ville d’Avignon au lieu de Rome.

[2] On appelle grand schisme d’Occident (ou Grand Schisme) la crise pontificale qui touche le catholicisme au tournant des 14ème et 15ème siècles (1378-1417), divisant pendant 40 ans la chrétienté catholique en 2 courants rivaux. Cette crise survient en Europe en pleine guerre de Cent Ans, à la faveur des transformations d’un système féodal qui ne répond plus aux besoins d’une société en pleine mutation. En effet, l’Église catholique n’a plus le rôle culturel et social qui était le sien au début du Moyen Âge et qui l’avait rendue indispensable à l’exercice du pouvoir. Au Moyen Âge tardif, les mutations économiques induisent la création d’États modernes que l’Église n’a plus les moyens de rassembler culturellement. Sur le terrain politique, cela se traduit par l’affrontement du roi de France Philippe le Bel et du pape Boniface VIII qui cherchent à affirmer la primauté absolue de leur pouvoir. En Italie, les luttes du pape et de l’empereur débouchent sur l’affrontement entre guelfes et gibelins du 12ème au 14ème siècle. Ces tensions et conflits aboutissent dans un premier temps à l’installation en 1309 de la papauté en Avignon puis en 1378, au Grand Schisme. Celui-ci, inscrit dans une crise profonde du sentiment et de la pensée religieuse, est marqué par deux successions pontificales simultanées, l’une à Rome et l’autre en Avignon (dont les tenants en titre sont qualifiés d’antipapes par leurs adversaires). L’Église, dont une partie du rôle social et culturel a été prise en charge par la bourgeoisie depuis le 13ème siècle, sort moralement et spirituellement affaiblie de cette crise : le gallicanisme se développe, les particularismes nationaux s’exacerbent, le sentiment religieux se modifie, de nouvelles hérésies émergent.

[3] Un archidiacre est un vicaire épiscopal à qui l’évêque confie certaines fonctions administratives pour un groupe de paroisses.

[4] Millau est une commune française, sous-préfecture du département de l’Aveyron, en région Occitanie. Située à 70 km au sud-est de Rodez, et à 111 km de Montpellier, elle fait partie de l’ancienne province du Rouergue. Au 9ème siècle, la ville est un gros bourg qui devient le siège d’une viguerie et déjà le centre du gant d’agneau. Elle s’entoure alors de remparts. Au 10 et 11ème siècle c’est la naissance de la vicomté de Millau. Dès le 11ème siècle la cité passe successivement sous domination des comtes de Provence, de Barcelone puis des rois d’Aragon, avec en 1112 le mariage de la fille du vicomte de Millau et de Béranger III, futur Roi d’Aragon. En 1187, le Roi d’Aragon lui concède le sceau et la liberté communale par charte consulaire. Le consulat ainsi créé, est chargé d’administrer la ville, de lever l’impôt et d’appliquer la justice. En 1271, Millau passe à la couronne des rois de France.

[5] Les annates, en latin : annatæ, étaient un impôt perçu par le pape sur les bénéfices ecclésiastiques, à chaque vacance du siège doté. L’origine de cet impôt semble être le cyricsceat, un tribu dû à l’église par le locataire de ses terres. Il est basé sur la législation lévitique reprise dans l’ancien testament et appliquée au ministère chrétien. Ainsi, le Deutéronome rappelle que les Juifs devaient verser aux sacrificateurs les prémices (ou premiers fruits des récoltes) ainsi que les dîmes. La législation la plus ancienne connue sur ce point est celle d’Eádmund vers le milieu du 10ème siècle ; il ordonne le paiement de la dîme, du cyricsceat et de l’aumône, et déclare que celui qui ne le fera pas sera excommunié. Initialement, les annates ou premiers fruits étaient les revenus de la première année d’un bénéfice ecclésiastique versés à la Curie pontificale (ou aux évêques à l’époque médiévale). Au cours du 13ème siècle les bénéfices ecclésiastiques ont été de plus en plus souvent collationnés, c’est-à-dire accordés directement par le pape, que ce soit pour les évêchés et les monastères, dont les postes vacants étaient pourvus par Rome, mais aussi pour les petites communautés ecclésiastiques. À cette occasion, le trésor papal recevait du nouveau titulaire une certaine taxe prélevée sur les revenus de son église. Depuis le 15ème siècle, cette taxe est généralement connue sous le nom d’annates, terme qui englobe toutes les taxes monétaires versées à la Camera apostolique (trésor papal) à l’occasion de la collation d’un bienfait ecclésiastique par le pape

[6] Le diocèse de Rodez et Vabres (en latin : Dioecesis Ruthenensis-Vabrensis) est un diocèse de l’Église catholique en France dont le siège est à la cathédrale Notre-Dame de Rodez.

[7] Rodez est une commune française du Midi de la France, au nord-est de Toulouse. Elle est la préfecture du département de l’Aveyron. Ancienne capitale du Rouergue, la ville est siège du diocèse de Rodez et Vabres. Rodez a été successivement occupée par les Wisigoths, les Francs, les armées des ducs d’Aquitaine et des comtes de Toulouse, ainsi que par les Maures, qui l’investirent en 725 et mirent à bas l’église antique. Quelques siècles plus tard, ce seront les Anglais qui l’investiront lors de la guerre de Cent Ans. L’histoire de la ville resta marquée durant longtemps par une intense rivalité entre les comtes de Rodez, maîtres du Bourg, et les évêques de Rodez, maîtres de la Cité. Une muraille délimitait les deux secteurs. Chaque communauté avait un hôtel de ville, ses consuls, une administration propre ; chacune rivalisant de puissance, de rayonnement. Au bourg, la célèbre dynastie des comtes d’Armagnac et de Rodez, finit par acquérir des privilèges régaliens : battre monnaie à la tour Martelenque, porter la couronne comtale et persister à reconnaître un temps l’antipape Benoît XIII et ses héritiers Bernard Garnier et Jean Carrier. Cela amena inévitablement l’affrontement avec le roi de France en 1443. Le dauphin, futur Louis XI, vint occuper Rodez et soumettre le comte Jean IV. Plus tard, son fils aura une idée séditieuse en essayant de trahir Louis XI. Cela lui vaudra d’être massacré à Lectoure, avec sa famille, lors de sa fuite

[8] Le Rouergue est une ancienne province du Midi de la France correspondant approximativement à l’actuel département de l’Aveyron. Après avoir fait partie du comté de Toulouse, il fut rattaché à la Guyenne avant d’en être détaché lors de la formation de la province de Haute-Guyenne en 1779.

[9] représentant du seigneur dans le village