Georges Dunbar (10ème comte de March) ou George 1er Dunbar (vers 1338-1420)
10ème comte de Dunbar et de March de 1368 à 1420
Fils de Sir Patrick Dunbar et de son épouse, Isabelle Randolph, fille cadette de Thomas Randolph 1er comte de Moray [1].
Le 25 juillet 1368 il devient comte de Dunbar [2] ou de March [3] par nomination du roi David II d’Écosse, entre les mains duquel son grand-oncle paternel, Patrick V Dunbar, le 9ème comte a résigné ce qui n’est qu’un unique comté dont les titres sont portés de façon interchangeables depuis la fin du 13èmesiècle.
L’héritage paternel de Georges comprend de vastes domaines dans l’est des Scottish Borders [4], avec celui de sa mère cohéritière des Randolph comte de Moray, il hérite d’autres territoires incluant la seigneurie d’Annandale [5], qui fait aussi de lui une figure importante des marches frontières de l’ouest.
De plus il hérite également des prétentions au contrôle de l’Île de Man [6] qu’il prend au sérieux, en y effectuant des donations de domaines vers 1372. L’influence régionale du comte de March est contrecarrée par le contrôle anglais de large régions du sud de l’Écosse, notamment dans le Berwickshire [7] et dans l’Annandale, et ses efforts d’y accroître les possessions de son héritage par son habileté militaire est l’objectif initial de son action.
Il obtient des succès significatifs au début de la décennie 1370 en rétablissant les écossais sur le Berwickshire ; à l’exception de la cité de Berwick [8] et de la région alentour. La conquête de l’Annandale est plus longue et elle est seulement achevée avec la prise du château de Lochmaben [9] le 5 février 1384.
Ces actions militaires des décennies 1370 et 1380 ne constituent pas moins que la récupération des zones frontière disputées. Le comte de March s’est aussi engagé dans des entreprises plus larges, nationales et aussi personnelles. La guerre anglo-française qui recommence en 1369 est globalement défavorable aux anglais et s’accompagne pendant une vingtaine d’années de crises parfois sanglantes dans le gouvernement et la société anglaise. Ces circonstances sont mises à profit par Georges II Dunbar et les autres nobles écossais.
Malgré cette carrière extrêmement active dans les conflits frontaliers avec l’Angleterre et comme diplomate le comte de March adopte souvent une position en retrait sur la scène de la politique intérieure du royaume.
Au cours des dernières années du règne de David II d’Écosse le comte et son frère John Dunbar comte de Moray sont en grande faveur auprès du roi, en partie du fait, que depuis au moins 1369 leur sœur Agnès est devenue la maîtresse du souverain.
Lors de l’accession au trôner de Robert II d’Écosse en 1371 Georges Dunbar ne semble pas avoir pâti de sa proximité avec le régime précédent ; avec John Dunbar, ils sont parmi les partisans du nouveau roi lors des obscures manœuvres du clan Douglas [10] qui précèdent son couronnement.
Par la suite les rapports du comte et du pouvoir royal se distendent mais on ne décèle pas de trace d’hostilité. Sur le long terme le comte est en bons termes avec Robert Stuart le second fils du roi Robert II, qui deviendra ensuite duc d’Albany [11] et Gardien de l’Écosse [12]. Dans les décennies 1370 et 1380 il collabore de façon heureuse particulièrement sur le plan militaire avec les autres magnats du sud de l’Écosse et en prend le commandement en 1388 après la bataille d’Otterburn.
Pendant la décennie 1390, cependant, il assume de nouveau une place importante dans la politique nationale. Cette reprise de son influence à partir de 1395 est liée à la relation entretenue par sa fille, Élisabeth, et l’héritier présomptif du trône David Stuart, comte de Carrick [13]. Leur union non validée préalablement par le Saint-siège rencontre l’opposition du roi Robert III d’Écosse, dont les relations avec le comte de March s’étaient sans doute rafraîchies, et qui s’empare du château de Dunbar [14], la principale forteresse du comte et le siège de ses états à l’automne 1396, dans le but de s’opposer à l’union de son fils avec Élisabeth Dunbar. Le couple est contraint de se séparer, mais le comte Georges espère encore que le mariage projeté se réalisera.
Le comte de March devient furieux quand David Stuart, désormais duc de Rothesay [15], renonce à Élisabeth en 1400 pour Marie Douglas, une fille du vieil Archibald Douglas le Hideux , 3ème comte de Douglas [16], et sœur d’Archibald, Maître de Douglas qui devient le 4ème comte en 1402 et qui est son grand rival politique et militaire depuis plusieurs années. Georges II Dunbar répond au déshonneur de sa famille en faisant appel au nouveau roi, Henri IV d’Angleterre.
Le 28 juin 1401, Henri IV accorde par lettre patente à George de Dunbarre comte de la Marche d’Écosse et à son épouse Christiane la seigneurie de Somerton dans le Lincolnshire [17], ainsi qu’a leurs héritiers qui doivent rendre l’hommage et le service armé. Le même jour le roi Henri IV fait don à George de Dunbarre de £ 100 sterling par faveur spéciale et en octobre pour les dépenses occasionnées ainsi qu’à son épouse pour elle-même et ses héritiers.
La même année, il commence ses incursions en Écosse et le 22 juin 1402 il est victorieux à Nesbit [18] d’une petite troupe écossaise qui effectue un raid. Le 14 septembre suivant, lors de la bataille de Homildon Hill [19], il combat de nouveau aux côtés des Anglais lorsque Murdoch Stuart, le fils du Gardien de l’Écosse et Archibal 4ème comte de Douglas sont capturés.
À l’été 1403, Henri Percy dit Hotspur, se déclare en révolte ouverte contre le roi Henri IV et se soulève à Chester [20]. Une contre attaque est rapidement organisée par le fils du roi le jeuneprince de Galles Henri et lors de la bataille de Shrewsbury [21] le 21 juillet 1403, Georges Dunbar combat de nouveau pour Henri IV pour cette victoire royale où Hotspur est tué et Archibald Dougas capturé une seconde fois, ce qui met fin à la révolte.
La famille de Dunbar rencontre toutefois l’hostilité dans le nord de l’Angleterre où le sentiment national continue à voir en lui un Écossais, particulièrement après la mort de Hotspur le fils et homonyme du duc.
En 1407, 7 ans après son ralliement au roi d’Angleterre, un groupe de 80 des suivants de Georges II Dunbar occupe et met à sac le village de Navenby dans Lincolnshire.
La famille de Georges II Dunbar semble avoir été dans une situation financière désespérée en Angleterre comme le montre leurs nombreux appels à des aides. Finalement par la médiation de Sir Walter Haliburton de Dirleton [22], une réconciliation intervient avec le clan Douglas en 1408, et Georges II obtient de revenir en Écosse l’année suivante.
C’est désormais un homme âgé d’environ 70 ans qui reprend possession de son comté de March alors que la seigneurie d’Annandale est définitivement perdue.
Son expérience militaire continue toutefois d’être appréciée et les années suivantes il est consulté par le Régent duc d’Albany qui doit faire face à la menace que représente le seigneur des Îles*.
En 1411 il est encore l’un de négociateurs écossais de la trêve avec l’Angleterre. Il tombe ensuite dans une relative obscurité et il serait mort en 1420, et est inhumé dans la collégiale de Dunbar*.
Notes
[1] Le titre de comte de Moray de la pairie d’Écosse succède à celui de mormaer de Moray qui était à la tête du mormaerdom celtique de Moray. Le territoire des mormaers de Moray s’étendait le long de la rive sud du Moray Firth, à partir de la rivière Spey au travers du nord de l’Écosse jusqu’à la côte occidentale du pays. Le Moray était séparé du comté de Ross par la rivière de Beauly.
[2] Comte de Dunbar ou comte de Lothian à l’origine, puis comte de March, est un titre de noblesse écossaise dont le titulaire possédait un comté au sud-est du royaume entre le 12 et le15ème siècle. Le titre a également été un titre dans la pairie d’Écosse.
[3] Le titre de comte de March a été créé plusieurs fois dans la pairie d’Angleterre et dans la pairie d’Écosse. Le titre tient son nom des territoires de marches entre les royaumes d’Angleterre et Royaume d’Écosse ou le pays de Galles. C’est pour cela que le titre a d’abord été porté par des familles puissantes de ces régions. Plus tard, ce titre devient seulement honorifique et le lien géographique avec les marches disparait.
[4] Les Scottish Borders (les Marches écossaises) sont l’un des 32 council area d’Écosse et une ancienne région située au sud du pays entre Édimbourg et la frontière de l’Angleterre. Cette région a longtemps constitué une zone tampon entre les deux nations.
[5] Annandale est une vallée de Dumfries et Galloway, en Écosse, qui tient son nom de la rivière Annan. Elle s’étend du nord au sud des Southern Uplands à Annanhead (au nord de Moffat) à Annan dans le Solway Firth. Annandale est également un ancien district d’Écosse, situé en bordure du Liddesdale à l’est, du Nithsdale à l’ouest, du Clydesdale et du Tweeddale au nord et du Solway Firth au sud.
[6] L’île de Man, est un territoire formé d’une île principale et de quelques îlots situés en mer d’Irlande, au centre des îles Britanniques. L’île de Man forme une dépendance de la Couronne britannique, c’est-à-dire que l’île n’appartient ni au Royaume-Uni ni à l’Union européenne mais relève directement de la propriété du souverain britannique, actuellement la reine Élisabeth II, qui agit en qualité de « seigneur de Man ». Ce statut n’en fait pas un État reconnu indépendant, mais l’île dispose d’une large autonomie politique et économique. L’île de Man est une terre celte depuis la protohistoire, puis devient un royaume viking au Moyen Âge, soumis à l’influence anglo-saxonne. Les dominateurs scandinaves y ont fondé un système politique basé sur le principe des « citoyens libres » et s’organisant autour du Tynwald qui serait le plus ancien parlement en fonctionnement continu du monde.
[7] Le Berwickshire est l’un des anciens comtés d’Écosse, mais le comté est dissous en 1975 au cours de la réorganisation du gouvernement. Sa capitale était Berwick-upon-Tweed à l’origine, mais le royal burgh change de mains en 1482, et est rattaché au comté du Northumberland, en Angleterre. L’administration du comté est alors déplacée vers Duns ou Lauder jusqu’à ce que Greenlaw ne devienne capitale en 1596
[8] Berwick-upon-Tweed, ou simplement Berwick, est située dans le comté de Northumberland et est la ville la plus au nord de l’Angleterre, sur la côte Est, à l’embouchure de la Tweed. Elle est située à 4km au sud de la frontière écossaise. La ville a été fondée durant la période du royaume de Northumbrie qui faisait alors partie de l’Heptarchie. Le site a joué un rôle central dans les guerres qui ont opposé l’Angleterre et l’Écosse pendant des siècles ; la dernière fois que la ville a changé de main fut en 1482 quand les Anglais l’ont reconquise.
[9] Lochmaben est une petite ville d’Écosse, et dispose d’un château autrefois important. La ville se trouve à 6,5 km de Lockerbie, en Dumfries and Galloway.
[10] Le clan Douglas est un clan écossais historique originaire des Lowlands écossais et tirant son nom du village de Douglas, dans le South Lanarkshire. Ses membres ont ensuite essaimé dans les Scottish Borders, l’Angus, le Lothian et au-delà. Le clan n’a actuellement pas de chef qui soit reconnu par le droit écossais et le Lord Lyon. Les Douglas ont été par le passé le plus puissant clan d’Écosse. Ses chefs portaient les titres de comte de Douglas (Black Douglas), comte d’Angus (Red Douglas) et, à un moment, comte de Morton. Beaucoup de Douglas se sont mariés avec des membres de maisons nobles ou royales écossaises ou européennes, assurant le pouvoir du clan en Écosse par le moyen de leur richesse ainsi accumulée. Le siège ancestral du clan est le château de Douglas, dans le Lanarkshire, mais ses membres ont ensuite occupé divers domaines à travers l’Écosse.
[11] Le titre de duc d’Albany a appartenu à la pairie d’Écosse. Il a été donné occasionnellement aux jeunes fils de la famille royale écossaise, et plus tard britannique, particulièrement dans les maisons Stuart et Hanovre. Le royaume d’Alba est le nom donné primitivement à toute l’Écosse, puis à un duché au nord du fleuve Forth et comprenant les districts de Bread-Albane, Athol, Glenurchy, avec en partie de ceux de Perth et d’Inverness.
[12] ]Entre les 13ème et 16ème siècles, l’histoire du royaume d’Écosse se caractérise par de nombreuses minorités, périodes au cours desquelles, les rois sont captifs, absents ou empêchés, voire de vacances du pouvoir qui impliquèrent la mise en place de régences, parfois collectives, pendant lesquelles le pouvoir fut exercé par des Régents ou des Gardiens du Royaume.
[13] e titre de comte de Carrick a été créé plusieurs fois dans la pairie d’Écosse, et une fois dans la pairie d’Irlande. En Écosse, la première création intervint autour de 1186, quand Duncan de Galloway (dit aussi Donnchadh de Carrick) fut fait comte de Carrick. Le gros des terres associées à ce titre sont dans l’Ayrshire. Marjorie de Carrick, la petite-fille de Duncan, qui plus tard porta le titre de son propre droit, épousa Robert VI de Brus, qui devint plus tard le 6ème lord d’Annandale. Leur fils, aussi nommé Robert, et connu en tant que Robert le Bruce, allait ensuite régner sur l’Écosse sous le nom de Robert 1er d’Écosse, rattachant le titre à la couronne. Robert fut aussi créé baron dans la pairie d’Angleterre par acte de sommation en 1295 en tant que Baron Bruce d’Anandale. Le titre s’éteint avec la mort de son frère Édouard, puis de son fils David de Brus en 1371. Ensuite, les rois d’Écosse recréèrent le titre à plusieurs reprises, mais le firent non-héritable, spécifiant qu’il serait rattaché à la couronne à la mort de chaque porteur.
[14] Le château de Dunbar, aujourd’hui en ruines, était une des plus importantes forteresses d’Écosse, dominant le port de la ville de Dunbar, dans l’East Lothian. Au début du Moyen Âge, le château de Dunbar dépendait d’un Ealdorman vassal des rois du château de Bamburgh, puis de ceux de York. En 678, saint Wilfrid fut enfermé à Dunbar, à la suite de son expulsion de son siège de York par Ecgfrith de Northumbrie. Plus tard, le château aurait été incendié par Kenneth 1er d’Écosse, roi des Scots, qui le possédait
[15] Le titre de duc de Rothesay était le titre officiel utilisé par l’héritier présomptif au trône du royaume d’Écosse. Depuis l’acte d’Union (1707), le trône d’Écosse est rattaché au trône d’Angleterre, formant ainsi le royaume de Grande-Bretagne (qui devint plus tard le Royaume-Uni à la suite du rattachement du royaume d’Irlande en 1800). Le titre est depuis détenu par les héritiers présomptifs au trône du Royaume-Uni. Il est utilisé quand ces derniers sont sur le territoire écossais, alors qu’ils utilisent duc de Cornouailles (s’ils le détiennent) et prince de Galles ailleurs. Le duc de Rothesay détient d’autres titres écossais, dont celui de comte de Carrick, baron de Renfrew et seigneur des Îles, ainsi que prince et grand Steward d’Écosse. Le titre tient son nom de Rothesay sur l’île de Bute, Argyll and Bute, mais n’est lié à aucune entité ou propriété terrienne que ce soit, contrairement au duché de Cornouailles.
[16] Comte de Douglas est un titre de noblesse de la pairie d’Écosse. Accordé aux barons de Douglas, il fut créé en 1358 pour William Douglas, fils d’Archibald Douglas, Gardien de l’Écosse. Le titre disparut en 1455, à la suite de la destitution de James Douglas, 9e comte de Douglas, et l’attribution de ses terres à George Douglas, 4e comte d’Angus.
[17] Le Lincolnshire est un comté d’Angleterre situé sur le littoral de la mer du Nord. Il a pour voisins, du nord au sud, les comtés du Yorkshire de l’Est, du Yorkshire du Sud, du Nottinghamshire, du Leicestershire, du Rutland, du Cambridgeshire et du Norfolk. Son chef-lieu est la ville de Lincoln.
[18] La bataille de Nesbit Moor (ou Nisbet Muir), opposa le royaume d’Angleterre et le royaume d’Écosse le 22 juin 1402. Peu après que les deux royaumes ont répudié la trêve de Leulinghem, ils commencèrent à lancer des raids le long de la frontière. Robert Stuart, 1er duc d’Albany et régent du royaume d’Écosse au nom de son frère Robert III, encouragea les raids écossais en Angleterre.
[19] La bataille de Homildon Hill (ou Humbleton Hill), opposa le royaume d’Angleterre et le royaume d’Écosse le 14 septembre 1402.
[20] Chester est une ville britannique située dans le Cheshire en Angleterre, proche de la frontière avec le pays de Galles.
[21] La bataille de Shrewsbury se déroula le 21 juillet 1403 à l’emplacement de la ville actuelle de Battlefield dans le comté de Shropshire en Angleterre. Une armée commandée par le roi Henri IV d’Angleterre y affronta et vainquit une armée rebelle menée par Henry Percy, dit Hotspur, fils d’Henry Percy, 1er comte de Northumberland.
[22] Dirleton est un village de l’East Lothian, en Écosse, à environ 30 kilomètres à l’est d’Édimbourg. Dirleton doit sa notoriété à son château, une forteresse médiévale remarquablement conservée. Au sud du village se dressent les collines de Lammermuir et au nord s’étend le Firth of Forth. Dirleton se trouve entre North Berwick (à l’est), Gullane (à l’ouest), Fenton Barns (au sud) et la réserve naturelle de Yellowcraigs, le domaine d’Archerfield et le Firth of Forth (au nord).