Nitta Yoshisada (1301-1338)
Chef de la famille Nitta [1] au début du 14ème siècle et partisan de la cour du Sud de l’empereur japonais Go-Daigo au cours de la période Nanboku-chô [2]. Il s’empare en 1333 de Kamakura [3], jusqu’alors dominé par le clan Hôjô [4].
Longtemps ennemi d’Ashikaga Takauji, Nitta Yoshisada est souvent blâmé pour la scission entre les cours du Nord et du Sud, comme il lutte contre les Ashikaga [5] et pour l’empereur Go-Daigo. Cette rivalité provient en grande partie du fait que les Ashikaga jouissent d’un rang supérieur aux Nitta bien qu’ils descendent d’un ancêtre plus récent. Comme les ancêtres des Nitta n’ont pas combattu aux côtés de leurs cousins du clan Minamoto [6] lors de la guerre de Genpei [7], puissance ou prestige ne leur ont jamais été accordés à Kamakura.
En 1331, après avoir reçu l’ordre par le bakufu [8] Ashikaga de joindre une armée à la forteresse de Chihaya, le prince Morinaga et l’empereur Go-Daigo donnent l’ordre à Nitta d’attaquer les Hōjō, aussi quitte-t-il son poste.
De retour dans sa province natale de Kozuke [9], il rallie l’aide d’autres descendants et vassaux, dont son frère Nitta Yoshisuke du clan Minamoto, et entame la marche vers Kamakura [10] par Musashi. Aux abords de la ville, Nitta remporte quelques victoires, déloge des défenseurs Hōjō et les poursuit vers la ville.
La ville est prise et l’influence du clan Hōjō anéantie.
À la suite de la chute de Kamakura et de la régence des Hōjō, Nitta est nommé gouverneur de la province d’Echigo [11] et vice gouverneur des provinces de Harima [12] et Kozuke lorsque l’empereur Go-Daigo redistribue les terres des Hōjō. De plus, il courtise Kōtō-Naishi, la secrétaire de l’empereur et l’épouse par sa médiation.
Au cours des quelques années suivantes, la rivalité de Nitta avec Ashikaga Takauji et son frère Ashikaga Tadayoshi atteint son paroxysme, les deux frères préparant une rébellion et lançant un appel selon lequel Nitta Yoshisada doit être détruit.
Les deux parties s’engagent dans un certain nombre de batailles, beaucoup d’entre elles dans et autour de Kyoto [13], aux mêmes endroits que les célèbres batailles de la guerre de Genpei. Finalement Nitta est défait, mais continue d’être une épine dans le pied des Takauji jusqu’à sa mort le 2 juillet 1338.
La mort de Nitta est aussi remarquable que sa vie. Alors que Nitta se bat aux sièges de Kuromaru [14] contre Hosokawa Akiuji , un allié de Ashikaga Takauji, son cheval est abattu par une flèche enflammée. Nitta, coincé sous le cheval mort et incapable de se déplacer est une cible facile pour les archers. Il tire alors son sabre court et se décapite lui-même avec. On raconte aussi que, témoin de son héroïsme, un certain nombre de ses collègues samouraïs s’engagèrent dans un junshi seppuku [15] à proximité, suivant leur lige dans la mort en signe de loyauté.
Son kami est vénéré au Fujishima-jinja [16] situé à Fukui [17].
Notes
[1] Le clan Nitta est un clan du Japon médiéval qui descend du clan Minamoto et plus précisément de Minamoto no Yoshishige. Le clan est l’un des plus grands ennemis du shogunat des Ashikaga et ensuite des régents du clan Hōjō. Le clan Nitta commence à prendre de l’importance au début du 13ème siècle. Il contrôle alors la province de Kozuke et exerce une petite influence sur la ville de Kamakura, capitale des Ashikaga. Le clan joue un rôle important en s’alliant au clan Date et en soutenant la cour du Sud lors de la période du Nanboku-chō.
[2] L’époque Nanboku-chô aussi appelée « période des cour du Nord et cour du Sud » ou « guerre entre les deux cours » s’étend de 1333 à 1392 au début de l’époque de Muromachi de l’histoire du Japon. Il s’agit d’une guerre civile entre les partisans de l’empereur Go-Daigo dirigeant la cour du Sud basée à Yoshino et les partisans de l’empereur Komyo (1322-1380) de la Cour du Nord établie à Kyoto et soutenue par Takauji Ashikaga. Après presque 60 ans de guerre, le Nord l’emporte en 1392. C’est pourtant la cour du Sud qui est aujourd’hui considérée comme légitime au titre d’empereur du Japon, car elle est en possession du trésor impérial du Japon.
[3] Kamakura est une ville de la préfecture de Kanagawa, au Japon. Elle est située au bord de l’océan Pacifique, à 50 km au sud-ouest de Tokyo (environ une heure de train) et un peu moins de Yokohama, sur la péninsule de Miura. Kamakura s’étend sur 39,60 km². En 1192, le shogun Minamoto no Yoritomo décida d’installer sa nouvelle capitale à Kamakura, qui n’est alors qu’un simple bourg, y déplaçant du même coup le centre politique du Japon. C’était l’époque où les shoguns prenaient le dessus sur l’empereur (Mikado). Le gouvernement de Kamakura domina le Japon pendant plus d’un siècle, jusqu’en 1333. À cette date la ville compte environ 50 000 habitants.
[4] Le clan Hōjō est une famille de samouraïs qui a dominé la politique du Japon durant l’époque de Kamakura. Descendants du clan Taira, ils ont pris leur nom de la petite ville de Hōjō, dans la province d’Izu. Lorsque, en 1180, Minamoto no Yoritomo, gendre de Tokimasa Hōjō, alors chef du clan, sort de son exil pour combattre les Taira au cours de la guerre de Gempei, les Hōjō se rangent de son côté. Après la mort de Yoritomo, ils s’imposent auprès des shoguns suivants en tant que shikken (régents), et dominent de fait le gouvernement du Japon.
[5] Le clan Ashikaga est un important clan japonais de samouraïs qui a établi le shogunat Ashikaga et dirigé le Japon pendant plus de deux siècles, de 1336 à 1573. Les Ashikaga descendent d’une branche du clan Minamoto, originaires de la ville de Ashikaga dans la province de Shimotsuke, de nos jours la préfecture de Tochigi. Pendant près d’un siècle, le clan est divisé en deux branches rivales, les Kantō kubō Ashikaga qui gouvernent depuis Kamakura, et les Ashikaga de Kyoto, les maîtres du Japon. La rivalité se termine avec la défaite des premiers en 1439. Le clan compte de nombreuses branches, dont les clans Hosokawa, Imagawa, Hatakeyama (après 1205), Kira, Shiba et Hachisuka. Après que le chef de famille du clan Minamoto s’est éteint au début de l’époque de Kamakura, les Ashikaga se présentent comme les chefs du clan Minamoto, s’assurant du prestige lié à ce nom. Il a existé un autre clan Ashikaga sans relation de sang mais issu du clan Fujiwara.
[6] Le clan Minamoto fut un des quatre clans qui dominèrent la politique du Japon durant l’ère Heian, les trois autres étant les Fujiwara, les Taira et les Tachibana. « Genji » est l’autre nom du clan Minamoto, d’après la prononciation alternative des caractères chinois pour Minamoto (gen) et ji, ou « clan ».
[7] La guerre de Genpei nommée également Guerre Jishō–Juei est une guerre civile de l’ancien Japon (1180-1185), qui doit son appellation à la contraction des noms des deux clans qu’elle confronta : les Minamoto ou Gen suivant la lecture on’yomi (chinoise) des caractères d’où le nom du clan Genji et les Taira ou Hei d’où le nom de la famille Heike. La guerre de Genpei débute en 1180 lorsque Minamoto no Yorimasa soutient un candidat différent de celui des Taira pour le trône impérial. La guerre s’achève 5 ans plus tard avec la victoire décisive du clan Minamoto à la bataille navale de Dan-no-ura, qui marque la fin de l’ère Heian et le début de la période Kamakura.
[8] Les shoguns Ashikaga dirigeaient le régime militaire féodal appelé shogunat des Ashikaga (1336-1573). Cette époque des shoguns du clan Ashikaga est aussi connue sous le nom de « période Muromachi », du nom du quartier de Kyōto où le troisième shogun Ashikaga Yoshimitsu établit sa résidence.
[9] La province de Kōzuke est une ancienne province du Japon qui correspond à l’actuelle préfecture de Gunma. L’ancienne capitale de la province, Takasaki, était située près de l’actuelle Maebashi. Pendant l’époque Sengoku, Kōzuke a été contrôlée tour à tour par Shingen Takeda, Kenshin Uesugi, le clan Hōjō et Ieyasu Tokugawa. Le clan Yamana est originaire de cette province. Pendant la période Edo, la province était divisée en 14 districts.
[10] La campagne de Kōzuke-Musashi est un assaut rapide et direct au cours de la guerre de Genkō mené par Nitta Yoshisada et qui aboutit au siège de Kamakura en 1333. Elle comprend un certain nombre de batailles sur une courte période. Le résultat final est la fin du shogunat de Kamakura.
[11] Echigo est une ancienne province du Japon. Elle était entourée par les provinces de Dewa, Mutsu, Kozuke, Shinano et Etchū, avec au large la province de Sado. Cette province occupait une région qui est aujourd’hui une partie de la préfecture de Niigata. Pendant la période Sengoku, la province a été gouvernée par Kenshin Uesugi et sa famille, qui en a pris le contrôle en 1551, après en avoir commencé la conquête en 1543. Avant d’appartenir au clan Uesugi, la province d’Echigo appartenait au clan Nagao.
[12] La province de Harima, aussi appelée Banshū est une ancienne province du Japon qui constitue, depuis 1876, la partie sud-ouest de la préfecture de Hyōgo.
[13] Kyoto ou Kyōto est une ville japonaise de la région du Kansai, au centre de Honshù. Elle fut de 794 à 1868 la capitale impériale du Japon, sous le nom de Heian-kyô (« Capitale de la paix et de la tranquillité »). Elle est aujourd’hui, avec ses palais impériaux, ses milliers de sanctuaires shinto et de temples bouddhistes, le cœur culturel et religieux du pays. La ville est aussi la capitale de la préfecture de Kyoto
[14] Le Kuromaru ou Forteresse noire, est une forteresse appartenant au kanrei Shiba Takatsune, située dans la province d’Echizen (de nos jours Nittazuka, à Fukui dans la préfecture de Fukui). Elle est attaquée à 2 reprises au cours des guerres de l’époque Nanboku-chō du 14ème siècle, durant laquelle elle est à la fois détruite et reconstruite.
[15] Le hara-kiri ou harakiri ou seppuku, est une forme rituelle de suicide masculin par éventration, apparue au Japon vers le 12ème siècle dans la classe des samouraïs. Ce rituel est officiellement abandonné par les Japonais en 1868.
[16] Le Fujishima-jinja est un sanctuaire shinto situé à Fukui dans la préfecture homonyme au Japon.
Fondé en 1870, son principal festival se tient tous les 25 août. Consacré à la mémoire du chef de clan, Nitta Yoshisada, il fait partie des 15 sanctuaires de la restauration de Kenmu.
[17] Fukui est une ville du Japon, capitale de la préfecture de Fukui.