Il était chargé de l’École théologique de Nisibe [1] lorsque surgirent les Perses. Il se réfugia avec ses élèves à Amida puis à Édesse [2] en 363 où il demeura jusqu’à sa mort en 373. Il mena une vie de contemplation, qu’il a entretenue par une austérité extrême.
Auteur prolifique d’hymnes en langue syriaque [3], il est important autant pour l’Église latine que pour les Églises orientales. Il fut reconnu comme docteur de l’Église catholique.
Éphrem a écrit avec la plus grande variété des hymnes, des poésies et des homélies en vers, aussi bien que des commentaires bibliques en prose. Il s’agissait pour ces derniers d’ouvrages de théologie pratique pour l’édification de l’Église en des temps troublés.
Les écrits d’Éphrem témoignent d’une expression de la foi chrétienne encore primitive mais vibrante, peu influencée par les modes de pensée européens et plus enracinée dans les façons de parler de l’Orient.
En se fondant sur l’hymnologie d’Éphrem, la critique interne suggère que ses deux parents faisaient partie de la communauté chrétienne croissante de la ville, bien que plus tard des hagiographes aient écrit que son père était un prêtre païen qui, de colère en voyant son fils converti, l’aurait chassé de sa maison. On parlait de nombreuses langues à Nisibe*(Nusaybin est une ville du sud-est de la Turquie située dans la province de Mardin, à la frontière turco syrienne. Elle est un haut lieu de l’histoire du christianisme de langue syriaque. C’est l’ancienne Antioche de Mygdonie. En 298 un accord de paix y est conclu entre l’Empire romain et les Sassanides à la suite de la victoire l’année précédente de Galère sur le « Grand Roi » Narseh. La ville fut le siège de l’École théologique de Nisibe, une des grandes écoles théologiques des premiers siècles du christianisme, en prenant la suite de l’école d’Édesse (dite aussi école des Perses) après la fermeture de celle-ci en 489. En 530, Nisibe est le théâtre d’une bataille pendant la guerre d’Ibérie opposant l’empire byzantin sous le commandement du général Bélisaire, aux Sassanides de Kavadh 1er. Kavadh 1er, avec l’aide des Lakhmides, battit les forces de Bélisaire, résultant en une victoire sassanide après la défaite de la bataille de Dara.) au temps d’Éphrem, surtout des dialectes araméens [4]. La communauté chrétienne se servait du dialecte syriaque. Diverses religions païennes, le judaïsme et quelques-unes des premières sectes chrétiennes rivalisaient entre elles pour gagner les cœurs et les esprits du peuple. C’était une époque de grande tension religieuse et politique.
En 298 l’empereur romain, Dioclétien avait signé avec son homologue de Perse, Narseh, un traité qui transférait Nisibe aux Romains. La persécution violente et le martyre de chrétiens sous Dioclétien étaient un souvenir vivace de l’Église nisibienne dans la jeunesse d’Éphrem.
Jacques de Nisibe , le premier évêque de Nisibe, fut nommé en 308 et Éphrem grandit alors qu’il dirigeait la communauté. Jacob de Nisibe est signalé comme un des signataires au premier concile de Nicée en 325 [5]. Éphrem fut baptisé quand il était jeune homme, il est entré dans l’ordre des fils de l’alliance [6]. Jacob le nomma malp̄ānâ [7]. Il fut ordonné diacre [8], soit à l’occasion de son baptême, soit plus tard.
Il commença à composer des hymnes et écrire des commentaires bibliques dans le cadre de ses fonctions éducatives.
En 337 mourut l’empereur Constantin, qui avait favorisé le christianisme dans l’Empire romain. Saisissant cette occasion, Shapour II de Perse commença une série d’attaques dans le Nord de la Mésopotamie romaine. Nisibe fut assiégée en 338, 346 et 350. Éphrem affirme que, pendant le premier siège, c’est l’évêque Jacob qui a défendu la ville par ses prières. Cet évêque pour lequel Éphrem avait beaucoup d’affection mourut peu après et Babou dirigea l’Église dans ces temps troublés, remplis d’escarmouches de frontière. Lors du troisième siège, en 350, Chapour détourna le cours de la rivière Mygdonius [9] pour faire crouler les murs de Nisibe. Les Nisibéniens réparèrent rapidement les murs tandis que la cavalerie d’éléphants de l’armée perse s’embourbait dans la terre humide. Éphrem célébra le sauvetage miraculeux de la ville dans un hymne où il la comparait à l’Arche de Noé flottant en sécurité au-dessus de l’inondation.
Éphrem, vers la fin de la cinquantaine, se remit au travail dans sa nouvelle Église et semble avoir continué à enseigner, peut-être à l’école d’Édesse [10]. Au cœur du monde de langue syriaque, cette ville abritait un grand nombre de philosophies et de religions rivales. Éphrem remarque que les chrétiens fidèles à l’orthodoxie nicéenne étaient simplement appelés palutiens à Édesse [11].
Dans cette confusion, Éphrem écrivit un grand nombre d’hymnes pour défendre l’orthodoxie nicéenne. Un auteur syriaque tardif, Jacques de Saroug , a écrit qu’Éphrem utilisa des chœurs entièrement féminins pour faire chanter sur le forum d’Édesse ses hymnes adaptées aux mélodies populaires syriaques.
Après avoir résidé 10 ans à Édesse, et alors qu’il avait dépassé la soixantaine, Éphrem succomba à la peste pendant qu’il prodiguait ses soins spirituels aux malades. La date la plus probable pour sa mort est le 9 juin 373.
Plus de 400 hymnes composés par Éphrem ont été conservés. Comme on sait que certains ont été perdus, la productivité d’Éphrem n’est pas douteuse.