La qualification de roi est contredite par Gildas, qui le décrit plutôt soit comme président, soit comme principal du conseil des Bretons [1]. Si la réalité historique du personnage n’est pas remise en cause, il convient cependant d’être prudent, car ce qui nous a été transmis à son propos relève plus du légendaire de la matière de Bretagne, d’autant qu’on le retrouve associé à la légende arthurienne.
On retient l’année 410 pour situer la fin de la présence romaine dans l’île de Bretagne. C’est peu après que Vortigern apparaît, à cette époque que l’historiographie anglaise nomme les Dark Ages [2]. Il est considéré comme un notable britto-romain.
Selon les sources, il est souverain de toute l’île, vers 425, ou roi des Brittons-romains du Kent [3], vers 450.
L’Historia regum Britanniae [4] raconte que Constant , fils de Constantin de Bretagne , retiré dans son couvent, laisse le gouvernement du royaume à Vortigern, sans qui rien ne se fait. Vortigern songe alors à s’emparer de la royauté. Tous les prétendants au trône sont trop jeunes pour régner.
Il commence donc par s’emparer des trésors royaux, ainsi que des villes fortifiées, au prétexte de menaces étrangères, et y place ses hommes. Il fait venir des Pictes [5] d’Écosse et les place auprès du roi, tout en les traitant somptueusement. Par stratagème, il fait naître chez les Pictes l’idée qu’il serait un meilleur roi que Constant. Constant est assassiné par les Pictes qui le décapitent et offrent sa tête à Vortigern, qui feint la douleur et fait châtier les meurtriers.
Vortigern devient roi et assujettit les seigneurs du royaume. Mais son forfait vient à être su, et les Pictes forment une coalition au royaume d’Alba [6].
Vers 430, une armée étrangère, menée par les frères Hengist et Horsa débarque dans le Kent [7]. Vortigern les prie de venir le rencontrer alors qu’il séjourne à Dorobernia [8]. Hengist lui apprend qu’ils sont originaires de Saxe en Germanie [9], dont ils ont été chassés selon une coutume en cas de surpopulation.
Le roi les questionne sur leur religion, puis leur propose une alliance : en échange de leur aide, il fera leur fortune. Les Saxons acceptent et s’installent à la cour du roi. Les Pictes envahissent le royaume et pillent les terres du nord, Vortigern et ses guerriers se déplacent vers l’ennemi pour une terrifiante bataille. L’aide des Saxons est décisive, les Pictes sont défaits et s’enfuient.
Conformément à sa promesse, le roi donne des terres à Hengist, afin qu’il récompense ses guerriers. Considérant les dangers qui menacent le royaume, le Saxon propose de faire venir d’autres guerriers de Germanie [10]. Le roi accepte et lui accorde le droit de se construire une forteresse, Castrum Corrigiae.
Dix huit navires arrivent de Germanie, pleins de guerriers saxons. Ronwen, la magnifique fille d’Hengist est du voyage. Le Saxon invite le roi dans sa nouvelle résidence, il tombe instantanément amoureux de la jeune fille. Il l’épouse la nuit suivante en échange du territoire du Kent. Ce mariage n’est pas du goût des autres seigneurs, ni de ses trois premiers fils. C’est à cette époque que saint Germain, l’évêque d’Auxerre [11] et saint Loup, évêque de Troyes [12], viennent dans l’île de Bretagne combattre le Pélagianisme [13].
Hengist demande à Vortigern de faire venir son fils Octa et son cousin Ebissa, afin qu’ils défendent les terres proches de l’Écosse. Ce sont 300 navires qui débarquent dans l’île. L’aide de cette puissante armée saxonne permet au roi de battre ses ennemis. Mais les Bretons demandent à Vortigern de se débarrasser des alliés saxons qui terrifient la population. Face à ses réticences, on lui retire la souveraineté et son fils Vortimer est proclamé roi. Ce dernier attaque les Saxons qui sont magistralement battus à quatre reprises et retournent en Germanie.
Le nouveau roi confisque et redistribue les biens des Saxons à son peuple, mais il est empoisonné par Ronwen, l’ancienne reine. Il est inhumé dans la cité de Trinovantum [14]. Vortigern reprend sa place royale et il apprend qu’Hengist, en Germanie, s’apprête à revenir dans l’ile avec 300 000 soldats.
La crainte d’une nouvelle invasion saxonne et la ruse d’Hengist débouche sur la décision d’une réunion à Ambrius. Lors de cette conférence où l’on devait parler de paix, Hengist saisit Vortigern et les Saxons égorgent 460 seigneurs bretons, ils sont enterrés à Kaercaradoc [15].
Il s’ensuit une bataille entre les deux camps, dont les Saxons sortent vainqueurs, non sans dommage. Vortigern est retenu comme otage, on lui laisse la vie et on lui accorde la liberté en échange de l’occupation du royaume. De nombreuses villes sont investies et les habitants massacrés. Le roi se réfugie en Cambrie [16].