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L’histoire pour le plaisir

André de Crète

samedi 19 août 2017, par lucien jallamion

André de Crète (vers 660-740)

Hymnographe

Né à Damas, André de Crète a fait l’objet de quatre Vies, qui se ramènent à une seule, écrite par le patrice [1] et questeur [2] Nicétas. Nicétas, très bien documenté, mais très discret sur l’activité d’André en faveur du culte des images, écrivait sans doute peu après la mort du saint, sous le règne de l’empereur iconoclaste [3] Constantin V.

À l’âge de quinze ans, il se rendit à Jérusalem et y devint moine dans le monastère attenant au Saint Sépulcre. Il entra ensuite dans le clergé assistant Théodore, du patriarcat de Jérusalem, et devint un de ses secrétaires.

En 685, il accompagna à Constantinople les deux prêtres chargés de porter à l’empereur Constantin IV la confirmation de l’adhésion de l’Église de Jérusalem aux décrets du concile œcuménique de 680 [4]. Ils arrivèrent dans la capitale à l’époque de l’avènement de Justinien II.

André resta ensuite à Constantinople où il fut simple moine pendant une longue période. Remarqué par un empereur qui n’était pas Justinien II, mais probablement Léonce, il fut consacré diacre de la cathédrale Sainte-Sophie [5] et nommé administrateur de l’orphanotropheion [6] et de la diaconie Tou Eugeniou.

En 712 il était métropolite [7] de Gortyne [8], en Crète, et à ce titre participa au concile réuni par l’empereur Philippicos pour annuler celui de 680 et rétablir le monothélisme [9]. Il contresigna cette décision comme la plupart des autres évêques.

Après la chute de Philippicos en juin 713, il confessa son erreur et revint à l’orthodoxie [10]. A Gortyne, il fonda une église dédiée à la Vierge des Blachernes et un hospice pour les malades pauvres. Il se réfugia avec la population dans la forteresse “Tou Drimeos” pendant une attaque arabe, et la forteresse ne fut pas prise.

Vers la fin de sa vie, il quitta Gortyne pour Constantinople pour prêcher contre l’iconoclasme, ayant sans doute, comme le patriarche Germain 1er, refusé de signer l’édit iconoclaste de Léon III en janvier 730 [11], il avait dû être déposé de son siège.

En 740 il quitta la capitale, peut-être exilé, et mourut à Mytilène [12]. Son corps fut ramené à Constantinople et enterré dans l’église Sainte-Anastasie.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Marie-France Auzépy, « La carrière d’André de Crète », Byzantinische Zeitschrift 88(1), de Gruyter, 1995,

Notes

[1] Patrice est un titre de l’empire romain, créé par Constantin 1er. Dans les années 310-320, Constantin abolit le patriciat romain, vieille distinction sociale qui avait ses racines au début de la république romaine. Le titre de patrice est désormais accordé par l’empereur à des personnes de son choix, et non plus à des familles entières. Dès son apparition, le titre de patrice permet à son titulaire d’intégrer la nobilitas, comme le faisait déjà le patriciat républicain. Le titre était décerné à des personnages puissants mais non membres de la famille impériale ; il vient dans la hiérarchie immédiatement après les titres d’Auguste et de César. Ce titre fut ensuite conféré à des généraux barbares au service de l’empire. Le titre fut encore porté par des notables gallo-romains au 6ème siècle. Sous les Mérovingiens, le titre de patrice était donné au commandant des armées burgondes. Les papes l’ont notamment décerné à plusieurs reprises pour honorer des personnages qui les avait bien servis. Le titre fut également conservé dans l’Empire byzantin, et son importance fut même accrue au 6ème siècle par Justinien 1er, qui en fit la dignité la plus haute de la hiérarchie aulique. C’était une dignité accordée par brevet. Dans les siècles suivants, elle fut progressivement dévaluée par la création de nouveaux titres. La dignité de patrice disparut à Byzance au 12ème siècle.

[2] Dans la Rome antique, les questeurs sont des magistrats romains annuels comptables des finances, responsables du règlement des dépenses et de l’encaissement des recettes publiques. Ils sont les gardiens du Trésor public, chargés des finances de l’armée et des provinces, en relation avec les consuls, les promagistrats et les publicains.

[3] L’iconoclasme est, au sens strict, la destruction délibérée de symboles ou représentations religieuses appartenant à sa propre culture, généralement pour des motifs religieux ou politiques. Ce courant de pensée rejette l’adoration vouée aux représentations du divin, dans les icônes en particulier. L’iconoclasme est opposé à l’iconodulie. L’iconoclasme ou Querelle des Images est un mouvement hostile au culte des icônes, les images saintes, adorées dans l’Empire romain d’Orient. Il se manifesta aux 8ème et 9ème siècles par des destructions massives d’iconostases et la persécution de leurs adorateurs, les iconophiles ou iconodules. Il caractérise également la Réforme protestante.

[4] Le troisième concile de Constantinople, compté comme sixième concile œcuménique, se tint du 7 novembre 680 au 16 septembre 681.

[5] Ancienne église chrétienne de Constantinople du vie siècle, devenue une mosquée au 15ème siècle sous l’impulsion du sultan Mehmet II. Elle est édifiée sur la péninsule historique d’Istanbul. Depuis 1934, elle n’est plus un lieu de culte mais un musée.

[6] D’après les Patria (Les Patria de Constantinople sont une collection d’origine byzantine de textes sur l’histoire et les monuments de Constantinople.), l’Orphanotropheion lui-même aurait été construit sous le règne de Justin II, à l’initiative du souverain et de sa femme Sophie, près d’une église placée sous l’invocation des saints Pierre et Paul, plus tard appelée simplement église Saint-Paul. Ces édifices se trouvaient près de la porte d’Eugène des murailles maritimes, un peu à l’ouest de la pointe de l’Acropole (au débouché de la Corne d’Or sur le Bosphore). Une novelle des empereurs Léon VI et Alexandre, datée de 909 et déposée en l’église des Princes des Apôtres de l’Orphelinat (c’est-dire saint Pierre et saint Paul), rappelle qu’une rente annuelle de 443 nomismata d’or avait été instituée par Justin II en faveur de l’établissement, et proclame que cette donation continuera à avoir ses pleins effets, les biens de l’institution étant d’autre part déclarés inaliénables. À la fin du 11ème siècle, cet orphelinat était fort délabré. L’empereur Alexis 1er le restaura et l’accrut considérablement : selon sa fille Anne Comnène, il aurait édifié autour de l’église Saint-Paul une véritable cité, dont l’importance était telle qu’il fallait toute une journée pour en faire le tour. De nombreuses maisons logeaient des pauvres et des infirmes : vieillards, nourrissons, impotents, paralytiques, aveugles, estropiés, au nombre de plusieurs milliers. L’orphelinat lui-même, restauré, fut doté d’immenses revenus ; une école fut fondée tout à côté, où des orphelins et des enfants pauvres recevaient une éducation gratuite. Le nom d’Orphanotropheion désigna désormais l’ensemble de cette « ville dans la ville » qu’avait créée l’empereur.

[7] Métropolite est un titre religieux porté par certains évêques des Églises d’Orient. À l’origine, le métropolite est l’évêque d’une capitale de province (métropole) romaine investi de la charge de présidence des conciles ou synodes provinciaux. Dans l’Église d’Occident, on prit l’habitude de dire « métropolitain » pour désigner un archevêque assurant un rôle de coordination entre les évêques titulaires des sièges qui composent la province ecclésiastique. En Orient on utilise le terme de métropolite qui, au cours de l’histoire, est souvent synonyme d’archevêque.

[8] Gortyne est une cité grecque de Crète, située sur les bords du fleuve Léthée et au pied du mont Ida.

[9] Le monothélisme est un courant de pensée du christianisme, développé au 7ème siècle dans le but de réunifier l’Église chalcédonienne et les Églises des trois conciles, et condamné comme hérésie au troisième concile de Constantinople en 681.

[10] dans une lettre conservée adressée à l’archidiacre Agathon de Sainte-Sophie

[11] L’édit iconoclaste fut promulgué en janvier 730, prescrivant la destruction non seulement des icônes mais aussi des reliques. Cette politique reçut l’opposition non seulement de Jean Damascène, mais aussi du pape Grégoire III. En représailles, il confisqua tous les biens pontificaux situés en Sicile et en Calabre, alors terres byzantines.

[12] Mytilène est la principale ville de Lesbos, une île grecque de la mer Égée. Elle est bâtie sur la pointe sud de l’île, à proximité de la côte turque.