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Lanfranc ou Lanfranc du Bec dit Lanfranc de Cantorbéry ou Lanfranc de Pavie

mardi 2 juin 2015, par lucien jallamion (Date de rédaction antérieure : 16 novembre 2011).

Lanfranc ou Lanfranc du Bec dit Lanfranc de Cantorbéry ou Lanfranc de Pavie (vers 1010-1089)

Théologien et réformateur de l’Église d’Angleterre

Lanfranc, à ses pieds, Bérenger de Tours qui soutient que la présence du Christ dans l'Eucharistie est purement symbolique et à qui Lanfranc s'est violemment opposé. Toile du 18ème siècle.Après des études à Pavie [1], en particulier de droit canonique, il quitte sa patrie pour la France. En 1039, il devient professeur à Avranches [2] et vers 1042, il entre à l’abbaye du Bec [3], en Normandie, fondée en 1034 par Herluin qui le nomme prieur 3 ans plus tard. Il fonde alors l’école abbatiale, qui acquiert rapidement une réputation et attire des élèves comme Yves de Chartres, le futur pape Alexandre II et Anselme de Cantorbéry.

Parallèlement, il se consacre à l’exégèse [4] et à l’édition des textes des Pères de l’Église. Il compose des commentaires sur “le Psautier, la Cité de Dieu d’Augustin d’Hippone et les Morales de Job de Grégoire le Grand”.

En 1049, il prend également part à la controverse eucharistique, il s’oppose à Béranger de Tours, qui soutient que la présence du Christ est purement symbolique. Lui-même est partisan de ce qui deviendra la doctrine de la transsubstantiation [5]. Il est l’un des premiers à recourir aux catégories aristotéliciennes pour distinguer l’apparence du pain et du vin de leur essence ou substance, qui selon lui est changée lors de la consécration. En 1050, il assiste au concile de Rome et fait condamner Béranger. Il est également présent aux conciles de Vercelli la même année et de Tours en 1055, où il continue à croiser le fer avec Béranger. En 1059, la "présence réelle" est adoptée par l’Église catholique lors d’un autre concile tenu à Rome. Béranger est de nouveau condamné et doit lire une rétractation.

Vers 1063, Lanfranc rédige le "De corpore et sanguine Domini" en réponse au "Scripta contra synodum" de Béranger, rétractation de sa rétractation de Rome.

En 1063, Lanfranc est choisi comme abbé de Saint-Étienne de Caen  [6], abbaye nouvellement créée sur l’initiative de Guillaume le Conquérant, qui entend faire de Caen le centre du pouvoir en Normandie. Après son couronnement en 1066, celui-ci entreprend la réforme de l’Église d’Angleterre. En 1070, Guillaume fait déposer l’archevêque de Cantorbéry, Stigand, par le concile de Winchester [7], sous le prétexte de simonie [8].

Ce dernier est remplacé par Lanfranc, qui reçoit le pallium [9] en 1071 des mains de son ancien élève, Alexandre II. Son épiscopat est marqué par le compromis dans la lutte de pouvoir entre princes et papauté ainsi que par la concurrence de l’archevêché d’York, qui prétend également à la primatie.

En 1075, il rend au Conquérant son plus grand service politique. Il lui révèle une conspiration formée par Raoul de Gaël, le comte de Norfolk [10], etRoger de Breteuil, comte d’Hereford [11]. Waltheof, comte de Huntingdon [12], Northampton et Northumbrie qui avait fait serment de silence, le lui avait confessé. Lanfranc pressa Roger de Breteuil de faire de nouveau allégeance, et finalement l’excommunia lui et ses complices. Il prévient ensuite Guillaume, qui était en Normandie.

Il intercéda pour la vie de Waltheof, qui était probablement innocent, ne voulant pas qu’il fût exécuté pour la faute des autres, mais il échoua à convaincre Guillaume.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Mondes normands/ Lanfranc de Pavie/ François Neveux. - La Normandie des ducs aux rois, Xe-XIIe s. - Rennes : Ouest-France, 1998./

Notes

[1] Pavie est une ville de la province de même nom en Lombardie (Italie). Pavie est située sur les rives du Tessin, à une dizaine de kilomètres en amont de son confluent avec le Pô. Milan, au nord, est distante de 35 km ; Gênes, au sud, de 90 km ; Turin, à l’ouest, de 110 km.

[2] Avranches est une commune française située dans le département de la Manche.

[3] L’abbaye Notre-Dame du Bec est une abbaye catholique bénédictine faisant aujourd’hui partie de la congrégation de Sainte-Marie de Mont-Olivet et située au Bec-Hellouin, près de Brionne, dans le département de l’Eure. Elle a été fondée en 1034 par Herluin, chevalier du comte Gilbert de Brionne. Avec l’arrivée de l’Italien Lanfranc de Pavie, prieur et maître de l’école monastique, puis d’Anselme de Cantorbéry, le Bec devient l’un des principaux foyers de la vie intellectuelle du 11ème siècle : le futur pape Alexandre II y étudie vers 1050 ainsi que nombre de futurs légats et évêques.

[4] En philologie, une étude approfondie et critique d’un texte. On pratique donc l’exégèse comme un travail préalable à l’édition sur les travaux de tous les auteurs, anciens comme contemporains.

[5] La transsubstantiation est, littéralement, la conversion d’une substance en une autre. Le terme désigne, pour certains chrétiens (en particulier les catholiques), la conversion du pain et du vin en corps et sang du Christ lors de l’Eucharistie.

[6] L’abbaye aux Hommes est une des deux grandes abbayes, avec l’abbaye aux Dames, fondées par Guillaume le Conquérant à Caen, en France. Elle s’élève à l’ouest du centre-ville et donna le nom de Bourg-l’Abbé au quartier qui l’entoure. La construction de l’abbaye aux Hommes, confiée à Lanfranc, commence en 1063. L’église a été construite entre 1065 et 1083. La conquête de l’Angleterre, en 1066, en apportant des moyens supplémentaires, mais aussi la présence de carrières de pierre à ciel ouvert à proximité, expliquent la rapidité de cette construction. La guerre de Cent Ans met l’abbaye en première ligne des combats. Après la prise de Caen par les Français en 1346, les religieux reçoivent l’ordre de fortifier l’enceinte, Saint-Étienne se trouvant en dehors des fortifications de la ville.

[7] Le concile de Winchester, réuni dans l’octave de Pâques en 1070, fait déposer l’archevêque de Cantorbéry Stigand et certain de ses suffrageants.

[8] Commerce de biens religieux ou de choses spirituelles, qui fut courant jusqu’à sa condamnation formelle par le concile de Trente.

[9] Le pallium est un ornement liturgique catholique dont le port, sur la chasuble, est réservé au pape, aux primats et aux archevêques métropolitains pendant la célébration de la messe. Il vient du latin pallium (au pluriel pallia) qui signifie manteau.

[10] Le Norfolk est un comté situé en Angleterre, constituant la partie septentrionale de la région d’Est-Anglie. Sa ville principale, et centre administratif, est Norwich.

[11] Le comté est entouré par le Shropshire au nord, le Worcestershire à l’est, le Gloucestershire au sud et le Pays de Galles à l’ouest. Le nom du comté vient de sa ville principale et capitale, Hereford, qui signifie « Gué d’armée » en vieil anglais.

[12] Aux 11ème et 12ème siècle, le titre de comte d’Huntingdon comprenait les comtés d’Huntingdon, Northampton, Bedford et Cambridge.