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Pépin III le Bref

lundi 17 février 2014, par lucien jallamion (Date de rédaction antérieure : 23 septembre 2011).

Pépin III le Bref (714-24 sept. 768)

Maire du palais de 741 à 751-Roi des Francs de 751 à 768

Pépin III le Bref Maire du palais de 741 à 751-Roi des Francs de 751 à 768

Fils cadet de Charles Martel. Bien que gouvernant en tant que maires du palais, Pépin et Carloman sont les maîtres du royaume. Mais, s’ils exercent un pouvoir de fait, ils n’en détiennent pas pour autant le titre royal. Le trône est vacant depuis la mort de Thierry IV en 737. Ils y installent Childéric III en 743.

Acte d’apaisement pour les partisans de la dynastie mérovingienne, mais également volonté de maintenir juridiquement l’unité de l’État. Unité vacillante qu’il faut sans cesse, sur tous les fronts, protéger. Ainsi, secondé par Carloman, Pépin doit faire face à de nombreuses révoltes. Elles sont réprimées en Alsace, en Saxe, chez les Alamans en 742 et en 746. Peu après, Carloman abdique en faveur de son frère pour se faire moine à l’abbaye italienne du mont Cassin [1] en 747. Pépin soumet la Bavière en 749. Depuis le retrait de Carloman, il reste unique maire du palais. De nouveau, l’Austrasie [2] et la Neustrie [3] se trouvent réunies entre les mains d’un seul homme. La fiction royale mérovingienne devient inutile et profitant d’une relative paix intérieure, Pépin pense que les conditions sont favorables pour prétendre au trône. Prudent, il demande conseil au pape Zacharie qui donne un avis favorable en déclarant, “Mieux vaut appeler roi celui qui possède le pouvoir.” Childéric III est déposé pour incapacité et relégué dans un monastère en 751. C’est en 751 que Pépin se fait alors élire roi des Francs par une assemblée des grands du royaume, au “champ de mai” de Soissons. C’est un véritable coup d’État, très habilement conçu. Le principe ancestral de la désignation du roi par son peuple en armes est respecté. Le lieu choisi pour la cérémonie est également significatif , en choisissant Soissons, Pépin s’inscrit dans la continuité franque et rassure les éléments conservateurs. Reste à justifier que la royauté change de famille.

Conciliante, l’Église vient à l’aide de Pépin, en puisant dans des références bibliques pour trouver un précédent. Ainsi le 5 mars 752 à lieu à Soisson son sacre à l’instigation de l’évêque de Mayence Saint Boniface qui n’était pas présent, il reçut l’onction sainte de la main de plusieurs évêques.

Ses fils Charles et Carloman sont également sacrés. Par cette action, la légitimité de Pépin est désormais établie, mais elle implique des obligations. Si le souverain est devenu un personnage sacré, envers qui l’obéissance est un devoir religieux, il est tenu, en contrepartie, de pourvoir à la protection de l’Église. L’occasion se présente lorsque le pape Etienne II, pressé par l’avance des Lombards sur Rome, vient lui-même trouver le nouveau roi en France pour le supplier d’intervenir. Après avoir obtenu la promesse écrite de son intervention, le pape procède personnellement, en l’église abbatiale de Saint-Denis, au renouvellement du sacre de Pépin puis au sacre de ses fils, Charles et Carloman le 28 juillet 754. Le même jour, le souverain pontife bénit la reine Bertrade, femme de Pépin, et fit défense à tous, sous peine d’interdit et d’excommunication, d’oser jamais choisir un roi issu d’un autre sang que celui de ces princes, que la divine piété avait daigné confirmer et consacrer de la main du bienheureux pontife, leur vicaire. ”La royauté de droit divin était née. Le roi, comme ses descendants, est montré comme l’élu du dieu des chrétiens.

Après cette confirmation solennelle, Pépin s’acquitte aussitôt de sa dette envers l’Église. Il prend la tête de 2 expéditions en Italie en 754 et en 756 contre les Lombards, auxquels il enlève l’exarchat [4] de Ravenne et la Pentapole [5] pour les remettre à la papauté. Ces territoires libérés consolident le pouvoir temporel du pape et constitueront l’embryon des États pontificaux. En serviteur zélé de l’Église, il patronne les missions évangélisatrices en Germanie de saint Boniface, qui réforme le clergé franc et devient le haut dignitaire ecclésiastique de l’Austrasie.

Si les relations entre Pépin et le Saint-siège se révèlent solides, l’autorité du roi demeure fragile à l’intérieur du royaume. L’esprit de révolte des populations et des familles aristocratiques n’est jamais complètement étouffé, les assises territoriales sont rarement définitives. Des menées subversives dans les régions périphériques obligent le roi à reprendre les armes. En 759, il guerroie contre les Sarrasins, s’empare de Narbonne et soumet la Septimanie [6]. De 760 à 768, il doit entreprendre 5 campagnes pour réduire des rébellions en Aquitaine et finir par annexer la totalité du duché. Cette dernière conquête terminée, Pépin tomba malade alors qu’il faisait une halte dans la ville de Saintes. Revenu à Saint-Denis, il y meurt quelques jours plus tard, le 24 septembre 768. Mais, avant de mourir, fidèle à la vieille conception franque selon laquelle le royaume est le patrimoine privé du roi, il avait partagé ses États entre ses 2 fils, Charles et Carloman. A Charles vont l’Austrasie, la Neustrie, la Gascogne, la Frise et la Thuringe. Carloman reçoit le Languedoc, la Provence, l’Alsace, l’Alémanie, l’Île-de-France et le centre de la France. A la mort de Carloman, son frère Charles prend possession de l’ensemble.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de l’histoire des rois de France personnages histoire de France/ Pépin le bref/ Le petit mourre dictionnaire d’histoire universelle édition Bordas 2004 p 1008

Notes

[1] L’abbaye territoriale du Mont-Cassin est une église particulière (ecclesia particularis) de l’Église catholique située comme son l’indique, sur le mont Cassin dans la commune de Cassino en Italie.

[2] L’Austrasie désignait durant la période mérovingienne un royaume franc couvrant le nord-est de la France actuelle, les bassins de la Meuse et de la Moselle, jusqu’aux bassins moyen et inférieur du Rhin. La capitale en fut d’abord Reims, puis Metz. Les habitants de l’Austrasie étaient les Austrasiens. Ce royaume est apparu à la mort de Clovis en 511, lorsque le territoire de celui-ci est partagé entre ses fils. Berceau de la dynastie carolingienne, l’Austrasie disparaît en 751 avec le dernier roi mérovingien pour être intégrée dans le grand royaume franc que réunirent Pépin le Bref et Charlemagne.

[3] Royaume franc qui couvrait le nord-ouest de la France actuelle, et avait pour capitale Soissons. Néanmoins, il semble que le terme de Neustrie ne soit apparu qu’un siècle après la création du royaume. La Neustrie avait été créée lors du partage qui suivit la mort de Clovis 1er, en 511, et revint à Clotaire 1er, qui, au terme de son long règne de 50 ans, avait réussi à reconstituer le royaume de son père. Elle fut le 2ème grand royaume franc né lors des partages successoraux mérovingiens à partir des territoires conquis sur Syagrius. Son aire géographique était limitée par la Loire au sud, l’océan Atlantique et la Basse-Bretagne à l’ouest, et la Champagne à l’est. Elle s’étendait jusqu’en Flandre au nord.

[4] L’exarchat peut prendre deux sens, le premier est politique et administratif qui est propre à l’empire romain d’Orient et l’autre est ecclésiastique propre à l’Église orthodoxe. L’exarchat est une organisation de certains territoires périphériques de l’empire byzantin, mise en place au 6ème siècle pour faire face à la menace d’envahisseurs. L’exarchat est dirigé par un exarque qui concentre les pouvoirs civils et militaires. Cette organisation visait à réagir de façon optimale aux dangers menaçant l’empire dans ses régions périphériques, sans avoir à attendre les ordres venus de Constantinople. Ils bénéficiaient d’un plus grand degré d’indépendance que les autres gouverneurs provinciaux. Seuls deux exarchats furent constitués, à Ravenne contre l’invasion des Lombards, et à Carthage. Les autres provinces de l’empire byzantin reçurent progressivement une organisation semblable, mais sous le nom de « thèmes ». Les exarques civils étaient de véritables vice-rois, à qui l’on confiait le gouvernement de plusieurs provinces tandis que les exarques ecclésiastiques étaient des délégués du patriarche de Constantinople ou du Saint-Synode, chargés de visiter les diocèses, et de surveiller la discipline et les mœurs du clergé. Dans les Églises d’Orient, un exarque est un évêque qui a reçu mission de représenter un patriarche auprès d’un autre patriarche ou dans un lieu qui n’est le territoire d’aucune Église orthodoxe autocéphale. L’exarchat est à la fois la dignité de l’exarque, l’ensemble des paroisses et des fidèles placés sous sa responsabilité ainsi que l’église et les bâtiments qui en constituent le siège. C’est en quelque sorte un évêché sans diocèse et sans structure prévue pour durer. C’est une façon de s’adapter à des circonstances particulières, absence d’une église locale organisée, nécessité d’assurer une vie liturgique à un personnel diplomatique. Un exarchat possède un statut dérogatoire par rapport au principe de la territorialité de l’organisation ecclésiastique. L’évêque mentionné dans les diptyques n’est pas l’évêque du lieu mais le primat représenté par l’exarque. On peut comparer l’exarchat ecclésiastique à extra-territorialité de bâtiments diplomatiques. Les métropolites des "Nouvelles Terres" du Nord et de l’Est de la Grèce ont reçu du patriarche œcuménique de Constantinople des titres d’exarque qui rappellent leur appartenance au Patriarcat œcuménique de Constantinople.

[5] Nom donné, dans l’Antiquité, à plusieurs contrées où se trouvaient cinq villes principales.

[6] Désigne une partie du sud de la Gaule, correspondant peut-être plus ou moins aux 7 provinces du diocèse de Vienne : Aquitaine première, Aquitaine seconde, Novempopulanie, Narbonnaise, Viennoise, Alpes Maritimes, par opposition aux 10 provinces constituant le diocèse des Gaules. Par la suite, après la conquête de l’Aquitaine par Clovis, le mot est utilisé, en particulier à l’époque carolingienne, pour désigner la partie de la Gaule restée jusqu’au début du 8ème siècle aux mains des Wisigoths, occupée un moment par les Musulmans d’Al-Andalus avant d’être reconquise par les Francs vers 740. Elle correspond approximativement à la partie occidentale de l’ancienne province romaine de Gaule narbonnaise. Elle est alors aussi appelée "Gothie".