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L’histoire pour le plaisir

Lü Bu ou Lu Pou

mardi 14 juin 2022, par lucien jallamion

Lü Bu ou Lu Pou (153/156-198/199)

Général, petit seigneur de guerre de l’époque de la fin de la dynastie Han

Lü Bu est principalement connu pour avoir trahi et tué ses deux pères adoptifs, Ding Yuan en 189 et le tyran Dong Zhuo en 192. Après avoir trahi le gouverneur Liu Bei par deux fois en 196 et 198 et pris possession de la province de Xu, il fut capturé par le seigneur de guerre Cao Cao. Ce dernier pensa un moment le garder à son service, mais après avoir considéré ses multiples trahisons, préféra l’exécuter en 199.

Son personnage fut popularisé au 14ème siècle par le roman Histoire des Trois Royaumes de Luo Guanzhong. [1] Il y est présenté comme un guerrier invincible, maître de la hallebarde et de l’arc, chevauchant le cheval Lièvre Rouge capable de parcourir mille li en une journée.

Cependant, il y est également dépeint comme une personne arrogante, fourbe et aisée à manipuler.

Il a une fille du nom de Lu Lingqi. Sa concubine préférée était Diao Chan .

Selon le Livre des Han postérieurs [2] et les Chroniques des Trois Royaumes, Lü Bu naît dans le district de Wuyuan dans le Jiuyuan [3]. Lorsque l’inspecteur de la province, Ding Yuan, est promu au rang de colonel de la cavalerie et se poste en garnison à Henei [4], il prend Lü Bu sous ses ordres et le nomme maître des registres.

En 189, à la mort de l’empereur Lingdi, et à la suite de la crise de succession, Ding Yuan se rend avec son armée à Luoyang [5], alors la capitale, et emmène Lü Bu avec lui. Il se range aux côtés du maréchal He Jin et complote contre les eunuques [6] qui détiennent une partie du pouvoir. Cependant, la cabale est éventée et He Jin est assassiné, ce qui déclenche une purge des eunuques au palais impérial.

Le général Dong Zhuo arrive à la capitale peu après avec sa propre armée et s’approprie les soldats de He Jin et He Miao , morts au cours de la purge. Désireux d’annexer également les troupes de Ding Yuan, il parvient à convaincre Lu Bu de tuer celui-ci pour lui, sachant que Ding Yuan lui portait une entière confiance. Lü Bu rapporte à Dong Zhuo la tête de Ding Yuan et reçoit en récompense le rang de colonel de la cavalerie. Dong Zhuo, qui lui voue une véritable affection, le prend comme fils adoptif. En 190, Dong Zhuo détrône Liu Bian, qui venait d’être proclamé empereur, pour introniser à sa place Liu Xe (l’empereur Xiandi). Lorsqu’une coalition se lève contre Dong Zhuo, ce dernier, après avoir pillé Luoyang, déplace la capitale à Chang’an [7], et se proclame Premier ministre et contrôle l’empire au travers de l’empereur.

Lû Bu se révèle être un cavalier et archer accompli, d’une grande force physique, et reçoit le surnom de général volant. Plus tard, il est promu au rang de général de corps d’armée impérial et reçoit le titre de “marquis de Douting”.

Sachant qu’il s’était fait beaucoup d’ennemis et craignant de se faire assassiner, Dong Zhuo utilise Lü Bu comme garde du corps et le garde en permanence à ses côtés. Cependant, il se montre souvent irritable et laisse éclater sa colère sans penser aux conséquences. Un jour, Lü Bu commet une petite faute et Dong Zhuo, furieux, saisit une petite hallebarde et la jette contre lui. Lü Bu parvient à l’esquiver et à faire accepter ses excuses, mais après cet incident conçoit de la rancœur envers Dong Zhuo. Lü Bu, également chargé de la protection des appartements de Dong Zhuo, a une aventure avec une de ses servantes, Diao Chan , et vit dans l’angoisse que Dong Zhuo la découvre.

En mai 192, Lü Bu se confie au ministre du Peuple Wang Yun , et le père de Diao Chan. Ce dernier conspirait alors contre Dong Zhuo et propose à Lü Bu de rejoindre son complot. Lü Bu accepte de se rallier au complot de Wang Yun.

Le 22 mai, Lü Bu se rend aux portes du palais de Chang’an avec une dizaine d’hommes, dont le colonel de la cavalerie Li Su, pour accueillir Dong Zhuo. Li Su attaque Dong Zhuo, et celui-ci, alarmé, appelle Lü Bu à l’aide. Le maître des registres Tian Jing se précipite auprès du corps de Dong Zhuo mais Lû Bu l’abat également. En récompense, Wang Yun le nomme « général qui provoque le prestige » et marquis de Wen et la cérémonie qu’il reçoit en cet honneur est digne de celle des Trois ministres. En outre, il reçoit la charge de s’occuper des affaires d’état avec le nouveau gouvernement.

En raison de l’assassinat de Dong Zhuo, Lü Bu s’attire l’animosité de nombreuses personnes dans la province de Liang, d’autant qu’aucun pardon impérial n’est prononcé pour les anciens subordonnés de Dong Zhuo. L’un d’eux, Li Jue , secondé par Guo Si , lance une attaque contre Chang’an. Selon “la Chronique des héros”, Lü Bu convainc Guo Si de l’affronter dans un duel singulier et parvient à le blesser d’un coup de lance.

Le 28 juin 192, Lu Bü est vaincu et fuit Chang’an à travers le détroit de Wu en compagnie de quelques centaines de cavaliers, tandis que Li Jue s’empare de l’empereur. Le 4 juillet, il fait exécuter Wang Yun et toute sa famille. Lü Bu se réfugie auprès du seigneur de guerre Yuan Shu. En tuant Dong Zhuo, qui était un ennemi de Yuan Shu, Lü Bu pensait avoir rendu à ce dernier un grand service. Mais Yuan Shu, révulsé par les multiples trahisons de Lü Bu au cours de sa carrière, refuse de le prendre à son service. En conséquence, Lü Bu se rend au nord et brigue un poste auprès de Yuan Shao, un puissant seigneur de guerre.

Yuan Shao décide de l’engager et l’envoie en expédition à Changshan contre le bandit Zhang Yan , qui mène alors une rébellion avec 10 000 soldats et plusieurs milliers de cavaliers. Lü Bu part avec son cheval, Lièvre Rouge, ainsi que son conseiller Cheng Lian , et parvient à venir à bout de Zhang Yan. Cependant, ses troupes pillent la région, au grand mécontentement de Yuan Shao. Sentant l’animosité de Yuan Shao à son égard, Lü Bu demande à Yuan Shao la permission de le quitter. Yuan Shao, de peur que Lü Bu ne se retourne un jour contre lui, planifie son assassinat. Selon la Chronique des héros, après ses victoires, Lü Bu se montre arrogant envers les généraux de Yuan Shao, refuse d’obéir à leurs ordres, et réclame qu’on lui offre la ville de Luo. Yuan Shao fait mine de lui offrir un poste de colonel ainsi que trente soldats qui ont pour mission de l’assassiner. Cependant le complot s’ébruite et lorsque les soldats exécutent leurs ordres à la faveur de la nuit, ils ne poignardent que le lit et les draps.

Lü Bu s’enfuit à Henei et Yuan Shao ordonne à ses généraux de le poursuivre, mais ceux-ci craignent tellement Lü Bu qu’ils évitent de trop presser le pas.

Lors de sa fuite, Lü Bu fait la rencontre de Zhang Miao, le grand gouverneur de Chenliu [8], et avant son départ, tous deux se serrent la main pour faire un vœu solennel d’amitié. Cependant ce geste vaut à Zhang Miao de s’attirer les foudres de Yuan Shao, qui était en froid avec celui-ci depuis l’époque de la coalition contre Dong Zhuo. Zhang Miao craint également ne pas pouvoir compter sur la protection du seigneur de guerre Cao Cao malgré les liens d’amitié qui les unissent. C’est pourquoi en 194, Zhang Miao rejoint son frère Zhang Chao et le général Chen Gong dans une rébellion contre Cao Cao. Chen Gong recrute alors Lü Bu et lui offre le poste de protecteur de la province de Yan. Cao Cao, qui menait alors une campagne contre Tao Qian pour venger la mort de son père doit se retirer pour mater la rébellion. Il affronte Lü Bu à Puyang [9] durant une centaine de jours sans parvenir à le vaincre. La famine force cependant Lü Bu à se replier à l’est de Shanyang. Sur les deux années suivantes, Cao Cao parvient à reprendre toutes les villes rebelles et inflige une défaite à Lü Bu à Juye. Lü Bu fuit vers l’est, pour se réfugier auprès de Liu Bei, le gouverneur de la province de Xu.

Selon la Chronique des héros, Lü Bu se montre extrêmement respectueux envers Liu Bei. Il l’invite à sa tente, le laisse s’asseoir sur le lit de sa femme, oblige sa femme à lui présenter ses respects, lui prépare un festin, et le nomme petit frère. Cependant Liu Bei juge les paroles de Lü Bu creuses et fait mine d’accepter sans être convaincu.

Liu Bei prépare une expédition à l’est pour attaquer Yuan Shu, qui s’était proclamé empereur. Lü Bu, avec la complicité de Cao Bao, en profite pour trahir Liu Bei, capturer Xiapi [10] et se proclamer gouverneur de Xu. Yuan Shu envoie le général Ji Ling avec une armée de 30 000 hommes pour attaquer Liu Bei et ce dernier doit se résoudre à demander de l’aide à Lü Bu.

Yuan Shu tente alors de rallier Lü Bu à lui en envoyant un messager, Han Yin , pour proposer de marier le fils de Yuan Shu, Yuan Yao avec la fille de Lü Bu, Lu Lingqi. Ce dernier accepte le mariage et Yuan Shu demande que Lü Bu lui envoie sa fille.

Cependant, Chen Gui , le gouverneur de Pei et ennemi politique de Yuan Shu craint cette union et tente de persuader Lü Bu de refuser ce mariage et de se rallier plutôt à Cao Cao. Lü Bu, qui gardait de la rancœur envers Yuan Shu lorsqu’autrefois celui-ci avait refusé de le garder à son service, se laisse convaincre, fait rappeler le chariot de sa fille qui était déjà en route, et fait décapiter Han Yin. Entre-temps, Cao Cao recommande Lü Bu au poste de général de la gauche. Lorsqu’il reçoit la nouvelle, Lü Bu est fou de joie et envoie Chen Deng, le fils de Chen Gui, à la capitale pour transmettre ses remerciements et briguer officiellement le poste de protecteur impérial de la province de Xu.

Lorsque Chen Deng fait la rencontre de Cao Cao, il lui dit que Lü Bu, quoique brave, n’a aucune tactique, qu’il est prompt à retourner sa veste, et qu’il serait judicieux de l’écarter de la scène politique le plus vite possible. Il récompense Chen Gui et nomme Chen Deng grand gouverneur de Guangling en lui donnant comme instructions de recruter davantage d’hommes qui pourraient servir d’agent double.

Lorsque Chen Deng retourne auprès de Lü Bu et que celui-ci apprend que Cao Cao ne l’a pas fait nommer gouverneur de Xu, il est si furieux qu’il empoigne une hallebarde et en frappe une table.

Yuan Shu, furieux du comportement de Lü Bu, envoie le général Zhang Xun en compagnie de Han Xian et Yang Feng l’attaquer.

Lü Bu envoie alors des messagers pour proposer à Han Xian et Yang Feng de trahir Yuan Shu et d’attaquer Zhang Xun en l’échange de tout l’équipement que leur avait confié Yuan Shu. Ceux-ci acceptent et infligent à Zhang Xun une importante défaite.

En juin 198, Lü Bu trahit à nouveau Liu Bei et s’allie à Yuan Shu. Initialement, Cao Cao envoie le général Xiahou Dun pour venir en aide à Liu Bei, mais celui-ci est défait par Gao Shun. Cao Cao décide de mener personnellement une expédition pour venir à bout de Lü Bu, et, lorsqu’il commence le siège de Xiapi, il envoie une lettre à Lü Bu pour l’inciter à se rendre. Lü Bu pense dans un premier temps accepter, mais son conseiller Chen Gong s’y oppose véhément et Lü Bu demande finalement à Yuan Shu de lui envoyer des renforts. Il tente une sortie avec 1000 cavaliers, mais subit une défaite et s’abrite derrière les murs de la ville et n’ose plus tenter de nouvelle bataille.

Yuan Shu n’envoie à Lü Bu aucun renfort et Lü Bu commence à se montrer méfiant envers sa propre armée, bien qu’il fasse toujours confiance à ses généraux. Ces derniers sont cependant très divisés et perdent la plupart de leurs batailles. Cao Cao fait détourner les eaux de la rivière Yi pour inonder la ville et après trois mois de siège, le moral est au plus bas.

Finalement, le 7 février 199, Lü Bu pose le drapeau blanc aux portes de la ville en guise de reddition. Cao Cao ordonne l’exécution de Lü Bu par strangulation, châtiment délibérément humiliant car réservé aux femmes. Son conseiller Chen Gong et le général Gao Shun choisissent d’être exécutés tandis que le général Zhang Liao accepte de se mettre au service de Cao Cao.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia Lü Bu/ Portail du monde chinois/ Catégories  : Personnalité du IIe siècle/ Héros des Trois Royaumes

Notes

[1] Les Chroniques des Trois Royaumes, est la chronique historique officielle couvrant la fin de la dynastie Han (184/220), et la période des Trois Royaumes de Chine (220/280). Elle fait partie des « Quatre Histoires », avec le Shi ji, le Han Shu et le Hou han shu. Elle est la compilation de textes la plus complète sur les événements qui eurent lieu en Chine durant cette période et a servi de base pour le roman épique Histoire des Trois royaumes, traditionnellement attribué à Luo Guanzhong. Initialement commencée par Chen Shou, elle fut complétée par Pei Songzhi.

[2] Le Livre des Han postérieurs ou Hou Hanshu est l’une des œouvres historiques chinoises officielles compilées par Fan Ye, utilisant comme sources un certain nombre d’ouvrages historiques et de documents antérieurs. Il couvre l’histoire des Han orientaux de 25 à 220.

[3] aujourd’hui Baotou dans le Shaanxi). Reconnu pour ses talents martiaux, il est recommandé pour servir la province de Bing* (région aux alentours de l’actuelle Shanxi

[4] aujourd’hui Hanoï

[5] Luoyang, ou Loyang est une ville-préfecture de la province du Henan en Chine. On y parle le dialecte de Luoyang du mandarin zhongyuan. Située sur le Fleuve Jaune, c’est l’une des quatre capitales historiques de la Chine.

[6] Un eunuque est un homme castré. La castration se limite généralement à l’ablation des testicules mais il arrive qu’elle concerne également le pénis, connue alors sous le nom de pénectomie. Dans la Chine ancienne, la castration était à la fois une punition traditionnelle (jusqu’à la dynastie Sui) et un moyen d’obtenir un emploi dans le service impérial. À la fin de la dynastie Ming, il y avait 70 000 eunuques dans la Cité interdite. La valeur d’un tel poste était importante car elle pouvait permettre d’obtenir un pouvoir immense qui dépassait parfois celui du premier ministre. Cependant, la castration par elle-même fut finalement interdite. Le nombre d’eunuques n’était plus estimé qu’à 470 en 1912, lorsque la fonction fut abolie. La justification de cette obligation pour les fonctionnaires de haut rang était la suivante : puisqu’ils ne pouvaient procréer, ils ne seraient pas tentés de prendre le pouvoir pour fonder une dynastie. À certaines périodes, un système similaire a existé au Viêt Nam, en Inde, en Corée et dans d’autres contrées du monde.

[7] aujourd’hui Xi’an

[8] Chenliu est une ville chinoise située dans la province de Henan, au sud-est de Kaifeng. Ce fut un site important lors de la dynastie Han et la période des Trois Royaumes alors que Cao Cao s’y réfugia en 189. Faisant de ces lieux son centre de commandement, il recruta de nombreux soldats pour combattre le tyranesque Dong Zhuo. Chenliu avait également le statut de district dans l’ancienne province de Yan.

[9] Puyang est une ville du nord-est de la province du Henan en Chine. Elle est située sur la rive nord du Fleuve Jaune.

[10] Xiapi est une dénomination géographique qui désigne un ancien district et un ancien xian de la province de Xu en Chine antique. Son emplacement correspond aujourd’hui au nord-ouest du xian de Suining dans le Jiangsu. Bordé à l’ouest par le district de Pei (province de Yu), au nord par les districts de Pengcheng et Donghai, au sud-est par le district de Guangling et au sud-ouest par le district de Jiujiang (province de Yang), le district de Xiapi est traversé par les rivières Si et Huai. Son territoire occupait grosso modo les villes préfectures contemporaines de Suqian et de Huaian au nord-est de la province de Jiangsu. Jusqu’en l’an 72, le district de Xiapi était connu sous le nom de Linhuai.