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L’histoire pour le plaisir

Jacques d’Armagnac

mercredi 23 septembre 2020, par ljallamion

Jacques d’Armagnac (1433-1477)

Comte de Pardiac-Vicomte de Carlat. de 1462 à 1477-Comte de la Marche-Duc de Nemours de 1464 à 1477

Fils de Bernard d’Armagnac dit Bernard de Pardiac , comte de Pardiac [1] et vicomte de Carlat [2], et d’ Éléonore de Bourbon , comtesse de la Marche [3] et duchesse de Nemours [4].

Il a épousé à Poitiers le 12 juin 1462 Louise d’Anjou, fille de Charles IV du Maine et d’Isabelle de Luxembourg.

Il fut dans sa jeunesse comblé de bienfaits par Louis XI, qui lui fit épouser une de ses cousines, l’investit du duché de Nemours et lui confia des commandements importants. Loin de se montrer reconnaissant, Jacques d’Armagnac se rangea parmi les ennemis du roi, et accéda à la Ligue du Bien public [5]. Il obtint deux fois son pardon.

Mais, tandis qu’il résidait à Carlat, ayant à nouveau comploté contre le roi Louis XI, celui-ci envoie une armée contre lui et lui fait des offres de pactiser. Si bien que le 17 janvier 1469 il fut conclu à Saint-Flour [6], entre lui et le comte de Dammartin [7] Antoine de Chabannes, stipulant au nom du roi, un traité par lequel Jacques renouvelait ses assurances de fidélité, consentait, en cas de récidive, à ce que ses terres fussent confisquées, ses privilèges de pair de France [8] abolis et à être jugé par tels juges qu’il plairait au roi de choisir.

Il fut en outre convenu qu’il serait mis des garnisons royales dans les châteaux du diocèse d’Albi [9] ; de Murat [10] en Auvergne ; Crozant dans le comté de la Marche, et Montaigut en Combrailles [11] ; et, de plus, que tous les vassaux nobles du vicomte prêteraient serment au roi, ce qui fut accompli à Carladès [12], au mois d’avril 1470, entre les mains de Draguinet de Lastic [13], chambellan [14] du roi, délégué à cet effet.

Ayant pu constater que tous ses vassaux restaient fidèles à la couronne et qu’aucun ne suivait le duc de Nemours dans ses trahisons, le roi le fait assiéger dans Carlat, saisir et amener au château de Pierre Encise [15] puis à la Bastille, où il le fait enfermer dans une fillette [16].

Le duc de Nemours fut interrogé à la Bastille, dans sa cage de fer, il y subit la question et y reçut son arrêt.

On le confessa ensuite, selon l’usage reçu pour les princes condamnés, dans une salle tendue de noir et il obtint pour toute grâce d’être enterré en habit de cordelier. Condamné par le parlement de Paris pour "factions, conspirations, machinations, grands et énormes crimes, délits et maléfices par lui commis et perpétrés contre le roi et monseigneur le dauphin son fils", selon les termes de la sentence, il est mis à mort le 4 août 1477, âgé de 44 ans.

Après cette exécution, on conduisit ses enfants à la Bastille, dans les cachots faits en forme de hottes où la gêne que leur corps éprouvait était un continuel supplice. Leurs pieds n’y pouvaient y trouver une place, leur corps n’y pouvait se reposer.

On les tirait deux fois par semaine de ce lieu épouvantable pour les fustiger. On leur faisait subir des tourments inouïs. L’aîné Jacques, âgé de 9 ans, mourut des mauvais traitements subis. Ce récit est connu et attesté par la requête que le plus jeune, Louis de Nemours, fit après la mort de Louis XI en 1483, l’aîné étant devenu fou

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu du texte de Joël Blanchard, « Sémiologie du complot sous Louis XI : le procès de Jacques d’Armagnac, duc de Nemours (Bibliothèque Sainte-Geneviève ms. 2000) », in Corinne Leveleux-Texeira et Bernard Ribémont (dir.), Le crime de l’ombre. Complots, conspirations et conjurations au Moyen Âge, Paris, Klincksieck, 2010,

Notes

[1] Le comté de Pardiac est une partie du comté d’Astarac, comprenant le pays de Rivière-Basse, qui fut donné en apanage par le comte Arnaud II d’Astarac à son fils cadet Bernard 1er. Il passa ensuite dans les familles de Montlezun, puis d’Armagnac.

[2] L’ancienne vicomté de Carlat était une subdivision du comté d’Auvergne, dont les dimensions étaient sensiblement plus vastes que la région naturelle actuelle du Carladès.

[3] La Marche est une région historique et culturelle française, correspondant à une ancienne province et dont la capitale est Guéret. La Marche fut aussi un comté. Ses frontières ont fluctué tout au long de son histoire et ce, depuis le Moyen Âge, époque de sa création. Dans ses limites du 18ème siècle, la province correspondait au département actuel de la Creuse mais regroupait aussi une bonne part de la Haute-Vienne (arrondissement de Bellac) ainsi que des paroisses de l’Indre, de la Vienne et de la Charente. Rattachée à la couronne de France par Philippe le Bel, elle revient à Charles IV le Bel en 1309 et devient duché-pairie en 1317. En 1327 elle est échangée contre le comté de Clermont-en-Beauvaisis. Elle revient ensuite aux Bourbon, et en 1527 François 1er la confisque. Après quelques apanages, elle est définitivement réunie au domaine royal vers 1531 et gouvernée par les Foucault de Saint Germain-Beaupré entre 1630 et 1752.

[4] Préalablement comté français à la suite de l’acquisition de Philippe le Hardi en 1274, Nemours fut érigé en duché-pairie en 1404 par le roi Charles VI et donné à Charles III le Noble, roi de Navarre, en échange de la ville de Cherbourg qu’il avait rachetée en 1399 à Richard II d’Angleterre.

[5] La ligue du Bien public est une révolte de princes, menés par Charles, comte de Charolais et d’autres grands seigneurs, contre l’accroissement des pouvoirs du roi de France Louis XI. Elle s’étend de mars à octobre 1465.

[6] Saint-Flour est une commune française située dans le département du Cantal. Siège d’un diocèse depuis 1317, la ville fut pressentie pour être la préfecture du Cantal lors de sa création.

[7] Le nom Dammartin-en-Goële viendrait de Domnus Martinus, le nom latin de saint Martin de Tours, qui évangélisa la région de la Goële au 4ème siècle. Petite ville de l’arrondissement de Meaux dans le département de Seine-et-Marne, ancien bourg de la région d’Île-de-France, elle paraît remonter aux temps les plus reculés ; Dammartin-en-Goële, dit Velly, était en 1031 une des places les plus considérables de France. Au centre de la plaine céréalière de France, le comté de Dammartin contrôlait les routes de Paris à Soissons et Laon. Il semble que ce comté soit initialement détenu par Constance, l’épouse de Manassès Calvus, le premier comte.

[8] La pairie de France est composée des grands officiers, vassaux directs de la couronne de France, ayant le titre de pair de France. Ils représentent les électeurs primitifs à la royauté à l’époque où la primogéniture n’est pas de règle, et assurent la dévolution de la couronne selon les lois fondamentales du royaume, ainsi que le choix de la régence en cas de minorité. Le nombre de pairs de France est un temps fixé à douze : six pairs ecclésiastiques et six pairs laïcs. Depuis 1180, on les voit chargés d’assurer la succession et être associés à la cérémonie du sacre où ils représentent chacun une fonction symbolique de l’investiture. À partir de la fin du 13ème siècle, les six pairies laïques, dont les terres sont revenues à la couronne, sont des apanages princiers, et les nouveaux pairs qui sont créés ne jouent qu’un rôle cérémoniel. La pairie, qui est un office de la couronne et non un titre de noblesse, devient un moyen pour les rois de distinguer et de s’attacher les nobles les plus importants du royaume. Le mouvement s’accélère au 16ème siècle : le roi nomme alors de simples gentilshommes à la pairie, les hissant au sommet de la pyramide des dignités en France. Il faut, pour être pair, jouir d’un fief auquel est attaché une pairie et descendre de la première personne à qui avait été attribué l’office. Le rôle des pairs de France, à l’époque de l’Ancien Régime, à la différence des pairs britanniques, est seulement honorifique.

[9] Le diocèse d’Albi a été érigé dès le 3ème siècle. Il a été élevé au rang d’archidiocèse le 3 octobre 1678. Depuis le concordat de 1817, le diocèse d’Albi a fusionné avec ceux de Castres et Lavaur. Ce diocèse a notamment été le théâtre de la croisade des Albigeois. Diocèse important et riche, de nombreux évêques mécènes se sont succédé dont Louis d’Amboise qui ont permis de réaliser la riche décoration intérieure de la cathédrale, dont les peintures datent de 1509

[10] Murat est une commune française située dans le département du Cantal

[11] Les Combrailles sont une région naturelle et culturelle de France, située au nord-ouest du Massif central. Cette région de basse montagne était sous l’Ancien Régime partagée entre les provinces d’Auvergne, du Bourbonnais, Marche et Limousin.

[12] Le Carladès ou Carladez est un pays traditionnel de France, situé au centre-ouest du massif central. Une partie de cette région se trouve dans le départements du Cantal et l’autre dans celui de l’Aveyron. Ses origines remontent à l’ancienne vicomté de Carlat, une subdivision du comté d’Auvergne, dont les dimensions étaient sensiblement plus vastes que la région naturelle actuelle.

[13] La famille de Lastic est une famille subsistante de la noblesse française, d’extraction chevaleresque, originaire d’Auvergne. La famille de Lastic est l’une des plus anciennes d’Auvergne encore subsistantes, elle prouve en effet sa filiation depuis 1298. Elle donna entre autres un grand maître de l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem en 1437, un grand maréchal du même ordre en 1555, trois lieutenants généraux des armées du roi, cinq évêques. Elle fut maintenue noble en 1666 et reçue aux Honneurs de la Cour en 1757.

[14] Un chambellan ou chambrier est un gentilhomme chargé du service de la chambre d’un monarque ou d’un prince, à la cour duquel il vit.

[15] Le château de Pierre Scize, également appelé Château de Pierre Encise aujourd’hui disparu, était situé sur la commune de Lyon, dans le département du Rhône. Il occupait une place stratégique, face à la Saône, qui matérialisait la frontière entre le royaume de France et le Saint Empire romain germanique. Le rocher sur lequel a été édifié le château semble avoir été fendu en deux, d’où son nom, qui signifie pierre fendue. Les origines de la forteresse remontent au 10ème siècle. Elle domine la Saône d’une cinquantaine de mètres, à un endroit où la rivière s’engouffre entre la colline de Fourvière et celle de la Croix-Rousse. De cet ensemble assez massif, se détachait une haute tour ronde édifiée au sommet du rocher et tenant lieu de donjon. On accédait au château par une porte, appelée porte de Pierre Scize, située au bas de la colline, puis par un escalier de plus de 200 marches, taillé dans le roc.

[16] Les fillettes du roi sont les fers et les chaînes dont se servait le roi de France Louis XI pour enchaîner ses prisonniers politiques.