Née dans le Poitou, nièce de Mme de Maintenon, elle est l’auteur de Souvenirs sur la cour de Louis XIV, fille d’un lieutenant général des armées navales qui a laissé lui-même d’intéressants mémoires.
Elle fut enlevée à l’âge de 7 ans à la fin de 1680 alors qu’elle n’était que Mademoiselle de Mursay, ainsi que son frère aîné, par son cousin, Philippe de Villette, protestant farouche, et de sa femme, que Madame de Maintenon se proposait de la convertir au catholicisme. La lutte ne fut pas longue, à peine l’enfant eut-elle assisté à la messe du roi qu’elle consentit à abjurer sous la double condition qu’elle entendrait cette fameuse messe tous les jours et qu’on la « garantirait du fouet ».
A 13 ans en 1686 elle fut mariée à un officier de haute naissance, mais de mince fortune, Jean-Anne III de Grimoard de Caylus , frère aîné d’un évêque d’Auxerre, enclin à l’ivrognerie et que les ordres formels de la cour retenaient à la frontière de Flandre, où il mourut en novembre 1704 avec le grade de lieutenant général. Elle se fit remarquer à la cour de Louis XIV par ses grâces et son esprit joyeux.
Elle a joué, sur commande du Roi et pour Jean Racine qui composa le prologue “d’Esther où la Piété” parlait par sa bouche ; elle interpréta d’ailleurs devant la cour divers personnages de cette tragédie, et notamment le principal rôle, en l’honneur du Roi et de Madame de Maintenon et jouée en la Maison des Dames de Saint-Cyr [1] où Mme de Sévigné la trouvait « trop touchante ». Bientôt cependant un ordre d’exil, qu’on a tenté d’expliquer par ses liaisons avec le duc de Villeroy, tint Mme de Caylus à l’écart de la cour.
La disgrâce ne dura pas moins de 13 à 14 ans. Elle s’en consolait à Paris au sein d’une société de gens d’esprit, avec laquelle elle faillit rompre au cours d’un accès de dévotion dont Mme de Maintenon elle-même la détourna, parce que son confesseur, le Père de La Tour, de l’Oratoire, était suspect de jansénisme [2]. Mme de Caylus reparut en 1707 à Versailles, rentra promptement en faveur auprès du vieux roi et s’y maintint jusqu’à sa mort en 1715. Elle revint alors habiter Paris et ne quitta plus guère la petite maison située au milieu des jardins du Luxembourg, dont elle a vanté les agréments champêtres dans une charmante lettre à sa tante.
C’est très probablement dans les 15 dernières années de sa vie qu’elle jeta sur le papier les anecdotes ou les récits auxquels elle n’osait donner le titre de Mémoires, et que son fils lui conseilla d’intituler modestement Souvenirs de Mme de Caylus, d’intéressants mémoires sur son temps et sur la vie de Madame de Maintenon, qui la considérait comme sa fille.