Amaury 1er de Jérusalem (1136-1174)
Comte de Jaffa et d’Ascalon de 1157 à 1163-Roi de Jérusalem de 1163 à 1174
Fils cadet de Foulque V d’Anjou, roi de Jérusalem [1] et de Mélisende de Jérusalem. Son père meurt quand il a l’âge de 7 ans et son frère aîné devient roi sous la régence de leur mère Mélisende. Baudouin III est couronné roi en 1152, et inféode le comté de Jaffa [2] à son frère Amaury en 1157. Le 19 octobre 1157, Baudouin III prend la ville d’Ascalon [3] qu’il rattache au comté de Jaffa. L’année suivante, en 1158, Amaury épouse Agnès de Courtenay , fille de Josselin II de Courtenay, comte d’Edesse [4] et de Béatrice de Saône.
Baudouin III meurt sans enfant le 10 janvier 1162 et Amaury est son plus proche parent. Initialement élective, la couronne du royaume de Jérusalem était devenue au fil du temps héréditaire, mais le nouveau roi devait toujours être approuvé par la Haute Cour des barons. Or la plupart d’entre eux déclarent à la mort de Baudouin qu’ils jugent Agnès de Courtenay indigne de devenir leur reine et somment Amaury de choisir entre sa femme et le trône, ce qu’il fait en choisissant le trône. Il semble que les barons jugeaient Agnès trop frivole, mais le mariage est officiellement annulé en raison d’une parenté entre les deux époux, et il est couronné le 18 février 1162.
Au cours du règne de son frère, les erreurs des derniers bourides [5], atabegs [6] de Damas [7], avait affaibli l’émirat et Baudouin III n’a pas réussi à empêcher Nur ad-Din de s’emparer de la ville en 1154. Baudouin III avait pu éviter que la situation ne tourne au désastre, obligeant même Nur ad-Din à la défensive, mais le fait est que les états latins d’Orient sont confrontés à une Syrie [8] musulmane puissante et unifiée. Aussi décide-t-il d’innover sa politique extérieure et de se tourner vers l’Égypte fatimide [9], tombé dans les derniers degrés de la décadence et en proie à des luttes de pouvoir.
Profitant des guerres civiles, Baudouin III avait obtenu en 1160 le versement d’un tribut de 160 000 dinars des fatimides. En septembre 1163, prétextant le non versement de ce tribut, il organise une première expédition, défait l’armée du vizir [10] Dirgham et assiège Bilbéis [11], mais la crue du Nil et des opérations de diversion de Nur ad-Din en Syrie obligent les Francs à se retirer. Toutefois, cette première expédition lui permis de mesurer l’ampleur de la faiblesse du califat fatimide.
Shawar, le vizir chassé d’Égypte par Dirgham, se réfugie à Damas auprès de Nur ad-Din, et parvient à le persuader de l’aider à reprendre le pouvoir en Égypte, malgré les réticences de ce dernier. En mai 1164, Nur ad-Din envoie en Égypte un de ses lieutenants, Shirkuh, pour rétablir Shawar comme vizir. Mais Shawar refuse de verser les indemnités et le tribut promis, Shirkuh reste alors en Égypte et impose un protectorat si bien que Shawar fait alors appel à Amaury 1er pour s’en débarrasser.
Amaury attaque et remporte plusieurs succès sur Shirkuk, mais Nur ad-Din envahit à son tour les états latins en guise de diversion pour protéger son lieutenant, prend les places fortes d’Arim [12] et de Paneas [13] et capture Bohémond III d’Antioche à Harim [14] le 11 août 1164. Seule l’intervention des byzantins [15] empêche les musulmans de prendre Antioche [16]. Un compromis intervient, et Amaury et Shirkuh évacuent simultanément l’Égypte.
Méfiant vis-à-vis du califat égyptien et préférant le statu quo, évitant ainsi la présence franque en Égypte, Nur ad-Din ne souhaite pas envoyer de nouvelle expédition au contraire de Shirkuh qui a mesuré le grand état de faiblesse de l’état égyptien ainsi que ses richesses et souhaite également prendre sa revanche et faire payer à Shawar ses traitrises.
Il semble que Shirkuh aie joué des querelles religieuses entre sunnites [17] et chiites [18], mobilisant l’opinion publique en faveur d’une nouvelle expédition et en appelant au calife abbasside [19] de Bagdad [20].
De guerre lasse et voyant qu’il ne parviendra pas à empêcher Shirkuh de se lancer à la conquête de l’Égypte, Nur ad-Din finit par confier une armée à son lieutenant, qui quitte Damas en janvier 1167. Shawar fait immédiatement appel à Amaury 1er, qui rassemble en hâte à Ascalon et quitte la ville le 30 janvier 1167.
Un pacte d’assistance est signé entre le roi et le calife Al-Adid, puis Amaury affecte son armée à la défense du Caire [21] et empêche Shirkuh de prendre la ville.
Shirkuh se dirige vers le sud, poursuivi par les coalisés franco-égyptiens, les bat le 19 mars 1167, puis se dirige vers Alexandrie [22] qu’il occupe et confie à son neveu Saladin. Les Francs et les Égyptiens assiègent la ville, pendant que Shirkuh se dirige vers la Haute Égypte [23] et assiège la ville de Qûs [24] et Nur ad-Din attaque le royaume de Jérusalem par le nord.
Finalement une paix est signée permettant à l’armée de Saladin de quitter Alexandrie avec les honneurs et les forces de Shirkuh et de Saladin évacuent l’Égypte, pendant que les Francs établissent un protectorat sur le pays en août 1167.
Depuis l’annulation de son mariage, le roi et la Haute Cour avaient conclu qu’il était nécessaire de négocier une alliance militaire et matrimoniale avec Byzance [25]. Hernesius, archevêque de Césarée [26] et Hugues de Saint-Amant furent envoyés dans la ville impériale et revinrent au bout de 2 ans avec la princesse Marie Comnène , nièce de Manuel 1er Comnène.
Ils abordent à Tyr [27] en août 1167 et le mariage fut célébré le 29 août 1167.
Manuel Comnène suivait de près la campagne égyptienne et forme le projet de conquérir le califat fatimide pour en faire une colonie franco byzantine. Au début de l’année 1168, il envoie à Jérusalem [28] 2 ambassadeurs, Alexandre de Gravina et Michel d’Otrante, puis Guillaume de Tyr part en ambassade à Byzance et un traité de partage de l’Égypte est signé en septembre 1168.
Mais lorsque Guillaume de Tyr revient à Acre [29], en octobre 1168, il s’aperçoit que les Francs ont commencé l’invasion de l’Égypte, sans attendre les forces byzantines. L’armée franque arrive devant Bilbéis le 1er novembre 1168 qui refuse de lui ouvrir ses portes. La ville est prise d’assaut le 4 et pillée de fond en comble, ce qui a pour effet de rallier toute la population égyptienne, y compris les indécis et les derniers partisans francs dans le camp de la résistance. Amaury arrive devant le Caire le 13 novembre, mais les égyptiens préfèrent brûler la ville plutôt que de la laisser aux Francs.
Comprenant que s’il persiste, il n’aurait devant lui que des cités brûlées, anéantissant les richesses de l’Égypte, et en permanence des révoltes, Amaury négocie une retraite honorable en échange d’indemnités et quitte le pays le 2 janvier 1169. Mais Shirkuh arrive avec une armée peu après le départ des Francs et s’empare de l’Égypte après avoir fait tuer Shawar 18 janvier 1169. Il meurt peu après, le 23 mars 1169, laissant le pays à son neveu Saladin.
Mesurant le péril auquel se trouve confronté les états latins d’Orient, Amaury envoie des ambassades en Europe afin de promouvoir une nouvelle croisade.
Mais Louis VII est occupé à défendre son royaume contre l’empire Plantagenêt qui possède les deux tiers de la France, l’empereur Frédéric Barberousse est en lutte contre les cités italiennes et le Saint-Siège et les autres souverains ont encore en mémoire le souvenir des échecs de la 2ème croisade et ne souhaitent pas s’engager dans une 3ème croisade.
Voyant l’échec de ses ambassades en Europe, il se tourne une nouvelle fois vers l’alliance byzantine et l’empereur Manuel accepte d’appliquer le traité d’octobre 1169. Il envoie sa flotte en juillet 1169 et la coalition franco byzantine assiège Damiette [30] en octobre novembre 1169.
Le siège s’éternise, car des renforts sont envoyés en permanence de la Haute Egypte, ou les vivres commencent à manquer dans le camp des assiégeants. La mésentente commence à s’installer entre les Francs et les Byzantins, et le siège est levé en décembre 1169.
Fort heureusement pour les Francs, Saladin cherche à se ménager une indépendance vis-à-vis de Nur ad-Din et trouve des prétextes pour éviter d’engager avec ce dernier des actions concertés contre les Francs. Amaury tente une nouvelle fois de persuader l’Europe de se lancer dans une croisade, mais sans succès. La situation devient également délicate pour Byzance.
Amaury se rend en personne à Byzance pour négocier une alliance et conclut un pacte d’assistance au printemps 1171. Au printemps 1174, il prépare une invasion de l’Égypte en concertation avec le roi normand Guillaume II de Sicile, et les mécontents chiites d’Égypte qui projettent de se révolter.
Il était en train de préparer une nouvelle expédition en Égypte, quand il meurt du typhus le 11 juillet 1174.
Notes
[1] Le royaume de Jérusalem fut fondé par des princes chrétiens à la fin de la première croisade, lorsqu’ils s’emparèrent de la ville. C’est l’un des États latins d’Orient. On peut distinguer plusieurs périodes dans son histoire : celles où le titre de roi de Jérusalem est associé à la mainmise croisée sur la ville (1099-1187 et 1229-1244), et celles où le titre représente le plus haut niveau de suzeraineté des croisés en Terre sainte, mais durant lesquelles la ville en elle-même n’appartient pas aux soldats croisés. Le royaume de Jérusalem fut créé en 1099 après la prise de la ville et ne disparut réellement qu’avec le départ des derniers croisés de Tortose en août 1291, soit moins de deux siècles plus tard.
[2] Le comté de Jaffa est un fief sur le littoral du royaume de Jérusalem, qui est aussi une marche face à l’Égypte fatimide. La ville de Jaffa fut prise dès 1099, et Baudoin 1er en fit un comté qu’il confia à Hugues du Puiset. En 1135 le comte Hugues II fut accusé d’adultère avec la reine Mélisende de Jérusalem, et son comté fut confisqué, pour être donné en apanage à des membres de la famille royale. En 1153, la ville d’Ascalon est prise, et le comté devient comté de Jaffa et d’Ascalon. Jaffa fut prise par Saladin après la bataille de Hattin en 1187, et reconquise en 1191 par Richard Cœur de Lion. Elle fut définitivement prise par les musulmans en 1268. À la suite de la perte définitive de Jaffa en Terre sainte, les comtes de Jaffa se réfugièrent, comme d’autres seigneurs du royaume de Jérusalem, à Chypre où leurs titres continuèrent d’être transmis.
[3] Ashkelon ou Ascalon est une ville balnéaire d’Israël sur la côte méditerranéenne dans le district sud, au nord de la Bande de Gaza. En 1098, le calife fatimide Al-Mustansir Billah fait construire un mechhed (lieu d’un martyr) pour y recevoir le crâne de Husayn troisième imam chiite. Ce crâne aurait été transféré au Caire dans un autre mechhed. En août 1099, les Croisés, sous le commandement de Godefroi de Bouillon, assiègent la ville. Ils la prennent provisoirement aux Fatimides en 1102, mais la forteresse résiste jusqu’en 1153. Ce n’est qu’à cette date que la ville est véritablement intégrée au royaume de Jérusalem par Baudouin III. La bataille navale d’Ascalon, confirme la domination maritime de Venise sur Constantinople en 1126. La ville est reprise par Saladin en 1187. La forteresse est rasée pour ne pas tomber entre les mains de Richard Cœur de Lion roi d’Angleterre. Le roi d’Angleterre prend Ascalon et Jaffa, négocie auprès de Saladin le libre accès des pèlerins à Jérusalem et retourne en Angleterre en 1192. En 1270, le sultan mamelouk Baybars rase complètement la ville.
[4] Le comté d’Édesse est l’un des premiers États latins d’Orient, le plus avancé dans le monde islamique. C’est aussi le premier à être reconquis par les musulmans, une cinquantaine d’années après sa création. À son avènement, le comté d’Édesse se réduit à la ville et à ses alentours, ainsi que des cités de Turbessel et de Ravendel. Les Ortoqides tiennent les environs de Saruj et de Mardin, les Danichmendides dominent le nord jusqu’à Samosate et les Byzantins tiennent la région de Marach, au bord de la Cilicie, qui leur a été remise par les Francs en 1097. Quelques cités, comme Bira et Malatya, sont tenues par des chefs arméniens.
[5] La dynastie bouride est une famille d’atabegs qui a régné sur Damas de 1104 à 1154.
[6] Atabeg, atabey ou atabek (père du prince) est un titre de noblesse turc. À l’époque des Seldjoukides, il s’agissait d’un dignitaire jouant le rôle de tuteur d’un jeune prince. Quand un prince seldjoukide mourait, la régence était attribuée à un atabeg chargé de protéger et de guider les héritiers. Ils épousaient souvent les mères veuves et de ce fait, assumaient d’une certaine manière la paternité par procuration. Aux 11ème et 12ème siècles, des dynasties ont été fondées par des mamelouks affranchis qui occupaient des hauts postes administratifs dans la cour des puissants émirs. À la mort de ces derniers, ils se sont retrouvés titulaires eux-mêmes de la régence et ont privé les héritiers de la légitimité de leur pouvoir, profitant de l’occasion pour usurper le trône. Ces usurpateurs prirent le titre d’atabeg car ils n’osaient pas prendre le titre de sultan. Aussi, le 12ème siècle, en Mésopotamie (Irak) est l’"âge des atabegs" (des régents). Ils ont fondé différentes dynasties
[7] Damas est l’une des plus anciennes villes continuellement habitées. Elle est aussi la ville la plus peuplée de la grande Syrie (Assyrie) (des traces archéologiques remontent au 4ème millénaire av. jc). Elle est citée dans la Bible, dans le livre de la Genèse, et plusieurs fois dans les Livres des Rois et des Prophètes. Damas connut l’influence de nombreuses civilisations dont celles des Assyriens, Perses, Grecs, Séleucides, Romains, Arabes et Turcs. De la fin du 12ème siècle av. jc à 734 av. jc, elle est la capitale du royaume d’Aram-Damas. Elle fut l’un des berceaux du christianisme et vit saint Paul prononcer ses premières prédications, notamment dans la maison d’Ananie, où celui-ci a ouvert une église domestique dès l’année 37. Cette dernière est la plus vieille de Syrie (aujourd’hui dans le quartier chrétien de Bab Touma). En 635, Damas se soumit aux musulmans et devint la capitale de la dynastie des Omeyyades de 661 à 750. Avec l’adoption de la langue arabe, elle devint le centre culturel et administratif de l’empire musulman durant près d’un siècle. Par la suite, elle demeura un foyer culturel majeur et un pôle économique de premier plan profitant de sa situation géographique privilégiée, à la croisée des chemins de La Mecque, l’Afrique, l’Anatolie, la mer Méditerranée et l’Asie (route de la soie en direction de la Chine et du commerce des épices avec l’Inde).
[8] La Syrie fut occupée successivement par les Cananéens, les Phéniciens, les Hébreux, les Araméens, les Assyriens, les Babyloniens, les Perses, les Grecs, les Arméniens, les Romains, les Nabatéens, les Byzantins, les Arabes, et partiellement par les Croisés, par les Turcs Ottomans et enfin par les Français à qui la SDN confia un protectorat provisoire pour mettre en place, ainsi qu’au Liban, les conditions d’une future indépendance politique.
[9] Les Fatimides (également appelés Obeydides ou Banu Ubayd depuis le manifeste de Bagdad ont formé une dynastie califale arabe chiite ismaélienne d’ascendance alide qui régna, depuis l’Ifriqiya (entre 909 et 969) puis depuis l’Égypte (entre 969 et 1171), sur un empire qui englobait une grande partie de l’Afrique du Nord, la Sicile et une partie du Moyen-Orient. Issus de la branche religieuse chiite des ismaéliens pour laquelle le calife doit être choisi parmi les descendants d’Ali, cousin et gendre du prophète de l’islam Mahomet, les Fatimides considèrent les Abbassides sunnites comme des usurpateurs de ce titre. L’établissement de leur califat débute au Maghreb, grâce à l’appui des Berbères Kutama, grande tribu qui était établie à l’est de l’actuelle Algérie qui vont renverser le pouvoir local aghlabide. Après un intermède en Ifriqiya, ils finiront par s’établir dans la ville du Caire qui pendant leur règne prendra un essor considérable.
[10] Le mot persan vizir, désigne un fonctionnaire de haut rang, ayant un rôle de conseiller ou de ministre auprès des dirigeants musulmans (califes, émirs, maliks, padishah ou sultans).
[11] Bilbeis est une ancienne cité fortifiée sur le bord est de la partie sud du delta du Nil en Égypte. La cité a joué un rôle lors des campagnes pour le contrôle du vizirat fatimide : d’abord en 1164, quand Shirkuh est assiégé par les forces combinées de Shawar et d’Amaury 1er de Jérusalem pendant trois mois ; puis de nouveau en 1168, quand la ville est prise d’assaut par l’armée d’Amaury, qui prend la ville au bout de trois jours le 4 novembre et massacre tous les habitants sans discrimination. Ces atrocités révoltent les égyptiens coptes, qui considéraient jusqu’alors les Francs comme des libérateurs et qui souffrent autant que les habitants musulmans de Bilbéis. Les coptes cessent alors de soutenir les croisés et rejoignent leurs voisins non chrétiens contre les étrangers.
[12] Harim (Harenc) est une ancienne forteresse au nord de la Syrie, située dans le djebel Al-Ala au nord-est d’Antioche. Elle domine au nord la riche plaine de l’Amik arrosée par l’Oronte. Ce site stratégique tient la route d’Alep (au nord-est) vers la Méditerranée. La forteresse, endommagée par les tremblements de terre au 12ème siècle, est reconstruite par les Ayyoubides, mais ne résiste pas aux invasions mongoles de 1260.
[13] Baniyas, Banias ou Panéas est un site archéologique qui s’est appelé Césarée de Philippe pendant la période romaine. Le site est situé sur le mont Hermon à la source de la rivière Baniyas, près d’une des sources du Jourdain. Il a donné son nom à la seigneurie de Banias un des fiefs du royaume de Jérusalem pendant les croisades.
[14] La bataille de Harim, de Harenc ou de Artah est une victoire de Nur ad-Din d’Alep sur une coalition de princes croisés, de l’empire byzantin et du prince Thoros II d’Arménie, survenue entre le 10 et le 12 août 1164. Le roi de Jérusalem Amaury Ier est alors en Égypte où il fait siège de Bilbeis, pour soutenir le vizir Shawar contre l’intervention de Shirkuh, envoyé par le Zengide Nur ad-Din. Ce dernier rassemble ses forces pour faire diversion en Syrie. Il obtient l’aide de son frère Qutb ad-Dîn Mawdûd de Mossoul et celle des Artukides et commence à mettre le siège devant les forteresses franques d’Artah et de Harenc. Konstantinos Kalamanos, gouverneur byzantin de Cilicie, Thoros, prince d’Arménie, Raymond III de Tripoli, Bohémond III d’Antioche, Josselin III d’Édesse et les Templiers se rassemblent pour lever le blocus. Nur ad-Din se retire à leur approche. Les chrétiens attaquent son aile droite : elle feint de prendre la fuite, et dans le temps qu’ils sont occupés à la poursuivre, le reste des Musulmans fond sur eux le sabre à la main, et en font un affreux carnage. 60 chevaliers du Temple sont tués ; 10 000 chrétiens seraient restés sur le champ de bataille, selon le chroniqueur kurde Ali Ibn al-Athîr. De nombreux prisonniers sont emmenés à Alep, dont Raymond III de Tripoli, Bohémond III d’Antioche, Josselin III d’Édesse et Hugues VIII de Lusignan. Nur ad-Din prend Harim et Panyas le 18 octobre suivant.
[15] L’Empire byzantin ou Empire romain d’Orient désigne l’État apparu vers le 4ème siècle dans la partie orientale de l’Empire romain, au moment où celui-ci se divise progressivement en deux. L’Empire byzantin se caractérise par sa longévité. Il puise ses origines dans la fondation même de Rome, et la datation de ses débuts change selon les critères choisis par chaque historien. La fondation de Constantinople, sa capitale, par Constantin 1er en 330, autant que la division d’un Empire romain de plus en plus difficile à gouverner et qui devient définitive en 395, sont parfois citées. Quoi qu’il en soit, plus dynamique qu’un monde romain occidental brisé par les invasions barbares, l’Empire d’Orient s’affirme progressivement comme une construction politique originale. Indubitablement romain, cet Empire est aussi chrétien et de langue principalement grecque. À la frontière entre l’Orient et l’Occident, mêlant des éléments provenant directement de l’Antiquité avec des aspects innovants dans un Moyen Âge parfois décrit comme grec, il devient le siège d’une culture originale qui déborde bien au-delà de ses frontières, lesquelles sont constamment assaillies par des peuples nouveaux. Tenant d’un universalisme romain, il parvient à s’étendre sous Justinien (empereur de 527 à 565), retrouvant une partie des antiques frontières impériales, avant de connaître une profonde rétractation. C’est à partir du 7ème siècle que de profonds bouleversements frappent l’Empire byzantin. Contraint de s’adapter à un monde nouveau dans lequel son autorité universelle est contestée, il rénove ses structures et parvient, au terme d’une crise iconoclaste, à connaître une nouvelle vague d’expansion qui atteint son apogée sous Basile II (qui règne de 976 à 1025). Les guerres civiles autant que l’apparition de nouvelles menaces forcent l’Empire à se transformer à nouveau sous l’impulsion des Comnènes avant d’être disloqué par la quatrième croisade lorsque les croisés s’emparent de Constantinople en 1204. S’il renaît en 1261, c’est sous une forme affaiblie qui ne peut résister aux envahisseurs ottomans et à la concurrence économique des républiques italiennes (Gênes et Venise). La chute de Constantinople en 1453 marque sa fin.
[16] Antioche est une ville de Turquie proche de la frontière syrienne, chef-lieu de la province de Hatay.
[17] Le sunnisme est un courant religieux majoritaire de l’islam. 90 % des musulmans sont sunnites. Il est souvent apparenté à une vision orthodoxe de l’islam. Constituant l’une des trois grandes divisions de l’islam, les sunnites sont désignés en arabe comme les gens de la « sunna » et de la majorité religieuse (ahl al-sunna wa’l-djama‘a). Par opposition aux chiites et aux kharidjites, on les appelle parfois « musulmans orthodoxes ». Ce qui distingue les courants de l’islam est principalement l’interprétation de la religion.
[18] Le chiisme constitue l’une des deux principales branches de l’islam, l’autre étant le sunnisme. Il regroupe environ 10 à 15 % des musulmans, dont 90 % de la population iranienne]. Il pensait que les Perses étaient favorables aux Hachémites[[La dynastie des Hachémites désigne les descendants de Hachim ibn Abd Manaf, de la tribu des Quraychites. Les Hachémites ont longtemps été les gardiens de la ville sainte de La Mecque, ils sont aujourd’hui la famille royale régnant en Jordanie, et ont régné sur le Royaume d’Irak jusqu’à la révolution républicaine de 1958.
[19] Les Abbassides sont une dynastie arabe musulmane qui règne sur le califat abbasside de 750 à 1258. Le fondateur de la dynastie, Abû al-Abbâs As-Saffah, est un descendant d’un oncle de Mahomet, Al-Abbas ibn Abd al-Muttalib. Proclamé calife en 749, il met un terme au règne des Omeyyades en remportant une victoire décisive sur Marwan II à la bataille du Grand Zab, le 25 janvier 750. Après avoir atteint son apogée sous Hâroun ar-Rachîd, la puissance politique des Abbassides diminue, et ils finissent par n’exercer qu’un rôle purement religieux sous la tutelle des Bouyides au 10ème siècle, puis des Seldjoukides au 11ème siècle. Après la prise de Bagdad par les Mongols en 1258, une branche de la famille s’installe au Caire, où elle conserve le titre de calife sous la tutelle des sultans mamelouks jusqu’à la conquête de l’Égypte par l’Empire ottoman, en 1517.
[20] Bagdad ou Baghdad est la capitale de l’Irak et de la province de Bagdad. Elle est située au centre-Est du pays et est traversée par le Tigre. Madīnat as-Salām fut fondée ex nihilo au 8ème siècle, en 762, par le calife abbasside Abou-Djaafar Al-Mansur et construite en quatre ans par 100 000 ouvriers. Selon les historiens arabes, il existait à son emplacement plusieurs villages pré-islamiques, dont l’un s’appelait Bagdad.
[21] Le Caire est la capitale et la plus grande ville d’Égypte. C’est la plus grande ville du Moyen-Orient et la seconde d’Afrique derrière Lagos. Les Fatimides et leur troupes composées de Berbères kotamas d’Algérie fondent le noyau urbain actuel, alors nommé Al-Mansûriyyah, pour en faire leur nouvelle capitale. Située sur la route des épices entre l’Europe et l’Asie, la ville connaît une longue période de prospérité : vers 1340, la population du Caire atteint un demi-million d’habitants, ce qui en faisait déjà l’une des plus grandes villes du monde arabe.
[22] Alexandrie est une ville en Égypte. Elle fut fondée par Alexandre le Grand en -331 av. jc. Dans l’Antiquité, elle a été la capitale du pays, un grand centre de commerce (port d’Égypte) et un des plus grands foyers culturels hellénistiques de la mer Méditerranée centré sur la fameuse bibliothèque, qui fonda sa notoriété. La ville d’Alexandrie est située à l’ouest du delta du Nil, entre le lac Maréotis et l’île de Pharos. Cette dernière était rattachée à la création de la ville par l’Heptastade, sorte de digue servant aussi d’aqueduc, qui a permis non seulement l’extension de la ville mais aussi la création de deux ports maritimes.
[23] La Haute-Égypte est la partie sud de l’actuelle Égypte. De tout temps, le Nil ayant été l’axe de préoccupation principal des Égyptiens, c’est donc à lui que fait référence le qualificatif haut. Le Nil prenant sa source en Afrique centrale (dans la région des Grands Lacs) et se jetant dans la mer Méditerranée dans le delta au nord, il est logique (selon la loi de l’écoulement des fleuves) que le sud du pays soit plus élevé que le nord. C’est pourquoi la Haute Égypte correspond à la partie méridionale du pays, de la région d’Aphroditopolis (au sud de Memphis) jusqu’au haut barrage d’Assouan, près de la première cataracte, c’est-à-dire à la frontière nord de la Basse Nubie.
[24] Qus ou Qûs est une ville sur la rive droite du Nil en Haute-Égypte dans le gouvernorat de Qena entre Qena au nord et Louxor au sud. La ville eut une grande importance au Moyen Âge. Les géographes arabes la décrivent comme la 3ème ville d’Égypte au 13ème siècle. Sa position sur une boucle du Nil en fait le point le plus proche de la mer Rouge et elle était un relais pour les marchandises allant d’Alexandrie vers les Indes (sous les Romains) ou venant de Chine (au Moyen Âge), transportées par chameaux entre le Nil et l’ancien port d’Aydhab, qui était son débouché sur la mer Rouge. Car, à cette époque, il n’y avait que les navires d’un faible tirant d’eau qui remontaient jusqu’à la ville actuelle de Suez. Qûs était aussi une étape sur la route du pèlerinage de La Mecque.
[25] Byzance est une ancienne cité grecque, capitale de la Thrace, située à l’entrée du Bosphore sous une partie de l’actuelle Istanbul. La cité a été reconstruite par Constantin 1er et, renommée Constantinople en 330, elle est devenue la capitale de l’Empire romain, puis de l’Empire romain d’Orient et enfin de l’Empire ottoman à partir de 1453 date de la prise de la ville par les Turcs. Elle fut rebaptisée Istanbul en 1930.
[26] Le siège archiépiscopal de Césarée en Palestine, également connu sous le nom de Césarée Maritime, est le siège métropolitain du Patriarcat orthodoxe oriental de Jérusalem et le siège titulaire de l’ Église catholique. C’était l’un des premiers évêchés chrétiens, et était un siège métropolitain à l’époque du premier concile de Nicée, mais fut plus tard soumis au patriarcat de Jérusalem. La ville resta largement chrétienne jusqu’aux croisades, son évêque entretenant des liens étroits avec l’ empire byzantin. Après la mise en place du Royaume de Jérusalem par les croisés, le siège est transformé en archidiocèse, subordonné au patriarche latin de Jérusalem.
[27] Tyr se situe dans la Phénicie méridionale, à un peu plus de 70 km au sud de Beyrouth et à 35 km au sud de Sidon, presque à mi-chemin entre Sidon au nord et Acre au sud, et à quelques kilomètres au sud du Litani.
[28] Ville du Proche-Orient que les Israéliens ont érigée en capitale, que les Palestiniens souhaiteraient comme capitale et qui tient une place centrale dans les religions juive, chrétienne et musulmane. La ville s’étend sur 125,1 km². En 130, l’empereur romain Hadrien change le nom de Jérusalem en « AElia Capitolina », (Aelius, nom de famille d’Hadrien ; Capitolina, en hommage au dieu de Rome, Jupiter capitolin) et il refonde la ville. Devenue païenne, elle est la seule agglomération de la Palestine à être interdite aux Juifs jusqu’en 638. Durant plusieurs siècles, elle est simplement appelée Aelia, jusqu’en 325 où Constantin lui redonne son nom. Après la conquête musulmane du calife Omar en 638, elle devient Iliya en arabe, ou Bayt al-Maqdis (« Maison du Sanctuaire »), équivalent du terme hébreu Beit ha-Mikdash (« Maison sainte »), tous deux désignant le Temple de Jérusalem, ou le lieu du voyage et d’ascension de Mahomet, al-Aqsa, où se situait auparavant le temple juif
[29] Acre est une ville d’Israël, située au nord de la baie de Haïfa, sur un promontoire et dotée d’un port en eaux profondes. Acre est située à 152 km de Jérusalem et dépend administrativement du district nord. Cette ville côtière donne son nom à la plaine d’Acre qui comporte plusieurs villages. Son ancien port de commerce florissant dans l’Antiquité, est devenu une zone de pêche et de plaisance de moindre importance. Elle devient au 13ème siècle la capitale du Royaume de Jérusalem et le principal port de Terre sainte.
[30] Damiette est un port du gouvernorat du même nom, en Égypte, dans le delta du Nil, à environ 200 kilomètres au nord-est du Caire. Dans l’Égypte ancienne, la cité était nommée Tamiat, mais elle perdit de l’importance durant la période grecque après la construction d’Alexandrie. Damiette reprit de l’importance durant les 12ème et 13ème siècles dans le cadre des Croisades. En 1169 une flotte du Royaume de Jérusalem, avec des soutiens de l’Empire byzantin attaqua le port, mais fut défaite par Saladin. Durant les préparations de la cinquième croisade en 1217, il fut décidé que Damiette serait la cible de l’attaque. Le contrôle de Damiette impliquait le contrôle du Nil, et les croisés pensaient pouvoir conquérir l’Égypte à partir de là. Après l’Égypte ils pourraient attaquer la Palestine et reprendre Jérusalem. Le port fut assiégé et occupé par des croisés de Frise en 1219, mais en 1221 les croisés furent vaincus devant Le Caire et chassés d’Égypte. Damiette fut aussi la cible de la septième croisade, menée par Saint Louis. Sa flotte arriva en 1249 et s’empara rapidement du fort. Il refusa de le rétrocéder au roi de Jérusalem, à qui il avait été promis durant la cinquième croisade. Toutefois à la suite de nouvelles défaites militaires, les croisés furent contraints de rendre la ville. Saint Louis donna aux remparts d’Aigues-Mortes la forme qu’avaient ceux de la ville égyptienne. Du fait de son importance pour les croisés, le sultan Mamelouk Baybars détruisit la ville et la reconstruit quelques kilomètres plus loin avec de meilleures fortifications. Aujourd’hui un canal la relie au Nil, ce qui en fait de nouveau un port important.