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L’histoire pour le plaisir

Bituitos

mardi 5 avril 2022, par lucien jallamion

Bituitos

Roi des Arvernes du 2ème siècle av. jc

Il succéda à son père Luern sur le trône et fut vaincu par les Romains en 121 av.jc.

En 125 av.jc, appelés à l’aide par leurs alliés Marseillais, contre les Salyens [1], les Romains commencent des campagnes militaires dans les territoires de Gaule méridionale. Assez rapidement la zone de conflit s’étend par contiguïté, engageant des peuples puissants comme les Voconces [2] puis les Allobroges [3] et leurs alliés Arvernes [4], qui se trouvaient en position hégémonique en Gaule.

En 122 av. jc le consul Gnaeus Domitius Ahenobarbus pénètre en Gaule avec son armée. Les chefs Salyens se réfugient chez les Allobroges. Bituitos envoie alors une ambassade à Domitius Ahenobarbus, afin d’obtenir une paix.

Appien nous a gardé la description de cette ambassade fastueuse avec chiens de garde et bardes, même s’il identifie de manière erronée Bituitos au roi des Allobroges. Domitius Ahenobarbus refuse cependant de traiter. Par ailleurs les Arvernes se portent contre les Éduens [5], alliés des Romains.

Une seconde armée, commandée par Fabius Maximus, rejoint celle de Domitius. Les Gaulois sont battus par les Romains en 121 av. jc, les Allobroges d’abord sur la Sorgue [6] par Domitius, puis Bituitos et ses troupes dans une bataille dont la localisation serait à proximité du confluent Rhône-Isère [7]. Bituitos et ses alliés avaient alors rassemblé 200 000 hommes dont de nombreux archers Rutènes [8].

Les peuples arvernes et allobroges, dont les forces auraient comptées jusqu’à 200 000 hommes, marchèrent alors contre le consul Quintus Fabius Maximus, qui était à la tête de 30 000 hommes et d’éléphants. Ils livrèrent la bataille du confluent [9], et furent vaincus. Les deux chefs romains érigèrent des trophées sur les lieux de leur victoire, coutume qui n’était alors pas familière aux Romains.

Après la défaite, Bituit tenta de négocier. À cette fin, il conseille aux Allobroges de se rendre à Fabius et envisage de faire de même. Ce faisant, il irrite Domitius qui est encore en Gaule et voit sa victoire niée au profit de son collègue.

Selon Valère Maxime , prétextant une entrevue, Domitius rencontre Bituit et le fait prisonnier. Selon le résumé de Tite-Live, c’est après s’être rendu en ambassade au Sénat qu’il aurait été capturé. Le roi arverne est alors emmené en triomphe à Rome. Il aurait été, selon Florus, l’élément le plus spectaculaire du triomphe avec ses armes bariolées, son char d’argent dans son équipement de combat.

Le Sénat ne voulant pas approuver l’acte de traîtrise de Domitius, mais craignant par ailleurs Bituitos, il est décidé, selon Valère Maxime, qu’il ne retournerait pas dans son pays, mais resterait en détention libre dans la ville d’Alba Fucens [10], dans les Abruzzes [11], avec son fils Congentiatos. La raison d’État l’emporte sur la fides [12] romaine.

Cette défaite des Arvernes induit le caractère définitif de la présence romaine en Gaule du sud, future Province romaine, dont le nom sera à l’origine de la Provence, aussi nommée Gaule narbonnaise [13]. Les Allobroges entrent dans la domination romaine, la puissance Arverne est amoindrie et la monarchie ne tarde pas à être remplacée par une assemblée de magistrats.

Une partie du peuple Rutène se trouve compris dans la Provincia romana, sous le nom de Rutènes provinciaux, les autres toujours indépendant restent néanmoins clients du peuple arverne.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu du texte de Venceslas Kruta, Les Celtes, Histoire et dictionnaire, Robert Laffont, coll. « Bouquins », Paris, 2000, (ISBN 2-7028-6261-6)

Notes

[1] Les Salyens, appelés aussi Salluviens (en latin Salluvii), formaient une confédération localisée dans la majeure partie de la basse-Provence et dont la capitale était Entremont sur l’actuelle commune d’Aix-en-Provence.

[2] Les Voconces sont une fédération de peuples gaulois installés dans les Préalpes. Ils sont battus par les légions romaines entre 125 et 118 av. jc lors de la conquête de la province de Narbonnaise. Ils figurent à ce titre sur les marbres capitolins, à Rome, donnant les noms des peuples vaincus durant ces opérations militaires. Sous l’Empire, ils constituent des civitates. Ce peuple occupait un territoire important qu’ils avaient pris aux Ligures au 4ème siècle av.jc et qui englobait le Vercors au nord, les contreforts du mont Ventoux au sud-ouest, Manosque au sud-est et Embrun à l’est, réparti sur 5 départements actuels (Drôme, Isère, Hautes-Alpes, Alpes-de-Haute-Provence, Vaucluse). Ils étaient également membres d’une fédération comprenant les Avantiques et les Sogiontiques. Dans le courant du 1er siècle av. jc, les Voconces signèrent avec Rome un traité d’amitié (fœdus) qui leur permit de garder une certaine autonomie et leurs institutions traditionnelles : on trouve ainsi un praetor et un sénat à la tête de cette civitas, assistés par des praefecti envoyés dans les circonscriptions périphériques (les pagi), lesquels sont conseillés par des assemblées locales (vigintiviri). Des édiles et des esclaves publics complètent cet organigramme administratif. Dès cette époque, les chefs-lieux sont Luc-en-Diois et Vasio, l’actuelle Vaison-la-Romaine selon Pline.

[3] Les Allobroges sont un peuple gaulois dont le territoire était situé entre l’Isère, le Rhône et les Alpes du Nord. Ils passaient dans l’Antiquité pour de grands guerriers. Ce peuple celte se serait installé dans les Alpes du Nord au début du 4ème siècle av. jc. Les auteurs antiques grecs (Polybe, Ptolémée, Plutarque) les ont appelés Allobriges ou Allobryges. César mentionne Allobrogum fines pour désigner le territoire des Allobroges. Le territoire des Allobroges s’étendait sur la plus grande partie des pays qui seront nommés plus tard la Sapaudia (ce « pays des sapins » deviendra la Savoie) et au nord de l’Isère. Mais, à l’est, dans les montagnes alpines, des peuples indépendants, les Ceutrons, occupaient la vallée de la Tarentaise et la haute vallée de l’Arve et les Médulles occupaient la vallée de l’Arc. Au sud, la rivière Isère (puis le Doux, en rive droite du Rhône) marquerait leur frontière avec les Ségovellaunes dont le territoire deviendra la cité de Valence. L’ensemble de l’Allobrogie est donc usuellement définie comme le territoire correspondant en grande partie aux actuels départements de la Savoie, de la Haute-Savoie et de l’Isère. Les Allobroges étaient réputés être de bons guerriers. Certains fournirent pendant des siècles des mercenaires, les Gésates, bien connus en Gaule cisalpine où ils vinrent aider leurs frères gaulois à résister aux Romains.

[4] Peuple gaulois du Massif central. Ils furent un des peuples les plus puissants de la Gaule centrale, s’opposant à plusieurs reprises à la puissance romaine. Les Arvernes ont légué leur nom à l’Auvergne. Leur capitale, lors de la guerre des Gaules, Gergovie, se trouvait sur un plateau qui domine l’actuelle ville de Clermont-Ferrand.

[5] Les Éduens étaient un peuple de la Gaule celtique. Ils étaient établis dans les actuels départements français de la Nièvre et de la Saône-et-Loire ainsi qu’au sud de celui de la Côte d’Or et à l’est de celui de l’Allier. Bibracte était leur capitale. Ils étaient régis par un chef électif, le vergobret. Les Romains firent, dès le 1er siècle av. jc, alliance avec eux, et le sénat romain les proclama frères de la république. Rome profita de la rivalité qui divisait les Éduens et les Arvernes pour intervenir dans les affaires de la Gaule et l’asservir plus facilement.

[6] La Sorgue est une rivière française issue de la fontaine de Vaucluse qui est la plus importante exsurgence de la France métropolitaine. La Sorgue se partage d’abord en deux en amont de L’Isle-sur-la-Sorgue au niveau du partage des eaux. Elle crée dès lors le « bassin des Sorgues » à partir de deux grands bras, la Sorgue de Velleron et la Sorgue d’Entraigues. Ceux-ci se subdivisent en plusieurs dizaines de cours aux noms différents

[7] carrefour des Sept Chemins

[8] peuple client des arvernes, selon Strabon

[9] La bataille du confluent est une bataille s’étant déroulée en 121 av. jc, opposant les troupes alliées des peuples arverne et allobroge aux légions romaines du consul Q. Fabius Maximus. Les Arvernes étaient menées par le roi Bituit selon Tite Live (Épitomé, 61). Le combat est gagné par les troupes romaines et permet ainsi à Rome d’annexer le sud de la Gaule, depuis la côte méditerranéenne jusqu’au cours moyen du Rhône en 121 av. jc, donnant ainsi naissance à la Provincia Romana ou Narbonnaise.

[10] Alba Fucens est une colonie romaine fondée à la fin du 4ème siècle av. jc après une victoire des Romains sur les Èques. Elle est située dans les Apennins, dans la région des Abruzzes, sur la via Valeria entre Carseoli et Corfinium/Italica, à quelques kilomètres au nord du lac Fucin, aujourd’hui à sec. Le site se trouve sur l’actuelle commune de Massa d’Albe, dans la province de L’Aquila, à une altitude d’environ 1 000 mètres.

[11] La région des Abruzzes, plus couramment appelée les Abruzzes, est une des régions d’Italie centre-méridionale. Sa capitale est la ville de L’Aquila. La région regroupe les anciennes provinces médiévales de l’Abruzze ultérieure au nord et l’Abruzze citérieure au sud.

[12] bonne foi

[13] L’expression Gaule narbonnaise désigne, chez certains historiens du 19ème siècle, une province romaine ainsi nommée dès 118 av. jc après la fondation de la colonie romaine de Narbonne. En réalité, la province a été successivement nommée : « Gaule transalpine » après sa conquête par Rome ; « Gaule romaine » après la conquête du reste de la Gaule par Jules César, pour la distinguer de la Gaule chevelue (mais l’expression « Gaule transalpine » a continué d’être utilisée) ; « Narbonnaise » après la réorganisation des Gaules par l’empereur Auguste, en même temps que sont créées les provinces de Gaule belgique, de Gaule lyonnaise et d’Aquitaine. À la suite de la réorganisation de l’Empire par Dioclétien (vers 300), sont créées les provinces de Narbonnaise première, de Narbonnaise seconde et de Viennoise.