Amalgaire d’Arenberg dit Amalgaire (vers 590-vers 655)
Noble Franc
Fils d’Ermeto d’Arenberg et petit-fils de Sanson d’Aremberg, Francs probablement originaires de la région d’Aremberg [1] sur le Bas-Rhin, près de Cologne [2].
Amalgaire fut installé en Bourgogne* par le roi Gontran et la reine Brunehilde. Il portait le titre de duc bénéficiaire de Bourgogne.
En 631, à la demande du roi Dagobert 1er, demande faite lors du séjour du roi en Bourgogne, plus précisément à Saint-Jean-de-Losne [3], le duc Amalgaire, aidé du duc Arnebert et du patrice [4] Willebad assassina Brodulf , oncle du demi-frère du roi Caribert II.
En 629, Brodulf avait contesté le partage du royaume de Clotaire II père de Dagobert et Caribert, qui ne laissait à Caribert qu’une maigre part limitée à l’Aquitaine [5]. Brodulf avait fini par accepter ce partage, mais le roi Dagobert estimait que sa soumission n’était qu’apparente. En récompense de ce service, Dagobert donna au duc Amalgaire d’importantes terres en Bourgogne, dont le comté d’Attuyer ou Atuyer.
Pour obtenir le pardon divin pour ce crime et d’autres méfaits, le duc Amalgaire et son épouse Aquilina décidèrent de fonder une abbaye dans leur comté. Ils choisirent le site de Bèze [6] (Fons Besua) à cause de la présence d’une belle fontaine. Le vocable retenu pour cette abbaye fut Saint-Pierre et Saint-Paul. Amalgaire nomma son jeune fils Waldalène premier abbé de Bèze. Il avait été formé par saint Colomban à Luxeuil [7] et l’abbaye fut régie selon la règle de ce saint.
En 631, Amalgaire, à la demande de Dagobert, leva une grande armée en Bourgogne pour aller détrôner le nouveau roi des Goths [8] d’Espagne, Swinthila, et y installer un roi plus favorable aux Francs, Sisenand . Ce dernier avait promis comme récompense un missorium en or [9].
Quand l’opération fut terminée, les Goths refusèrent de se séparer du missorium. Amalgaire fut envoyé en ambassade et les Francs finirent par accepter 200 000 solidi en compensation. Ces succès permirent à Amalgaire de doter généreusement l’abbaye de Bèze, dont la renommée atteint même les oreilles du roi Dagobert puisqu’il lui donna, en 634, deux fiefs proches de Champlitte [10]. Amalgaire ne voulut pas se montrer moins généreux et la même année, il donna à l’abbaye les terres de Jancigny [11], Talmay [12] et Heuilley-sur-Saône [13] près du confluent de la Vingeanne [14] et la Saône [15].
En 642, après la mort de Dagobert, remplacé en 639 par son fils Clovis II âgé de 4 ans, la reine Nantilde, mère du roi, devint régente. En Bourgogne, elle fit élire par un plaid [16] le franc Flaochat comme maire du palais [17]. Malheureusement celui-ci vouait une haine secrète mais féroce à Willebad, patrice de Bourgogne. Il s’ensuivit une véritable guerre civile, les ducs, les comtes et nobles de Bourgogne soutenant l’un ou l’autre des deux hommes.
Amalgaire était un farouche partisan de Flaochat et proposait de tuer Willebad, qui était pourtant son complice dans l’assassinat de Brodulf. Finalement, lors d’une rencontre des camps adverses, qui se transforma en mêlée sanglante, Willebal fut tué, mort suivie quelques jours plus tard de celle de Flaochat, ce qui fut interprété comme un jugement divin.
De 642 jusqu’aux années 650, Amalgaire contribua avec Erchinoald, nouveau maire du palais, homme sage et pondéré, à la paix et prospérité de la Bourgogne. Mais la mort de ces deux hommes, vers 655, déclencha des luttes furieuses parmi les nobles Francs et il faudra attendre le nouveau roi de Bourgogne, Clotaire III, pour rétablir calme et paix en Bourgogne.
Notes
[1] Aremberg est une localité d’Allemagne, dans l’arrondissement d’Ahrweiler, en Rhénanie-Palatinat. Elle est dominée par un château qui était jadis la résidence des comtes, puis ducs d’Aremberg.
[2] La ville doit son nom de Cologne à l’impératrice romaine Agrippine, épouse de l’empereur Claude, qui éleva son lieu de naissance au rang de colonie en l’an 50, sous le nom de Colonia Claudia Ara Agrippinensium. Les Romains y tenaient une garnison et des axes routiers convergeaient vers un pont de bateaux sur lequel transitait un important commerce avec toutes les régions de la Germanie. En raison de son importance stratégique sur le limes du Rhin et de la présence de l’armée et de la clientèle germanique, l’endroit attira de nombreux marchands et devint un foyer d’artisanat et de commerce. Centre militaire, la ville fut la résidence de l’empereur gaulois Postume de 260 à 268, et le lieu de l’usurpation éphémère de Silvanus en 355. Les Romains introduisirent le christianisme à Cologne, qui devint siège épiscopal à partir du 4ème siècle. Des Francs se sont regroupés au cours de la seconde moitié du 5ème siècle pour fonder un royaume à Cologne, qui est intégré dans le royaume franc de Clovis. À partir du 7ème siècle, ils sont désignés sous le nom de Francs ripuaires.
[3] Saint-Jean-de-Losne est une commune française située dans le département de la Côte-d’Or
[4] général en chef
[5] L’Aquitaine est le nom donné depuis au moins le 1er siècle av. jc à une région ancrée sur la façade Atlantique et le versant nord des Pyrénées. Sous l’Empire romain, la dénomination Aquitaine s’applique à un gros Sud-Ouest de la Gaule, des Pyrénées aux rives de la Loire, Auvergne incluse. Saintes et Bordeaux furent les capitales successives de la Gaule aquitaine finalement partagée en trois (Aquitaine Première, Aquitaine Seconde et Novempopulanie) sous la Tétrarchie, à l’occasion des réformes fiscales et administratives réalisées par Dioclétien. La romanisation de la Novempopulanie conduira à la Vasconie. L’Aquitaine passe sous la domination des Wisigoths, arrivés de Provence et d’Italie en 412-413. En 418, un traité donne le statut de fédéré (fœdus) des Wisigoths dans l’Empire romain, qui les installe en Aquitaine.
[6] L’abbaye Saint-Pierre et Saint-Paul de Bèze a été fondée en 630 sur le territoire qui deviendra la commune de Bèze. Elle suivie d’abord pendant 200 ans dans la régle de saint Colomban, puis en 826, la règle de saint Benoît.
[7] Le monastère Saint-Pierre et Saint-Paul de Luxeuil est situé à Luxeuil-les-Bains au Sud-Est des Vosges. Il a été fondé en 590 par saint Colomban, ce qui a permis à Luxovium, importante cité à l’époque romaine mais déserte car complètement ruinée par les invasions barbares, de revivre. Les Sarrasins la pillent en 732, mais Charlemagne la relève et la règle de Saint-Benoît remplace celle de Saint-Colomban.Ce monastère était renommé pour son scriptorium, actif dès le milieu du 7ème siècle, et probablement le lieu de naissance de la première écriture calligraphique en minuscules, avec une ornementation marginale empruntée à la grammaire décorative de l’Irlande.
[8] Les Goths faisaient partie des peuples germaniques. Selon leurs propres traditions, ils seraient originaires de la Scandinavie. Ils provenaient peut-être de l’île de Gotland. Mais ils pourraient également être issus du Götaland en Suède méridionale ou bien du Nord de la Pologne actuelle. Au début de notre ère, ils s’installèrent dans la région de l’estuaire de la Vistule. Dans la seconde partie du 2ème siècle, une partie des Goths migrèrent vers le sud-est en direction de la mer Noire. Dès le 3ème siècle les Goths étaient fixés dans la région de l’Ukraine moderne et de la Biélorussie où ils furent probablement rejoints par d’autres groupes qui ont été plus ou moins intégrés dans la tribu. Les Goths formaient un seul peuple jusqu’à la fin du 3ème siècle. Après un premier affrontement avec l’Empire romain dans le sud-est de l’Europe au début du siècle, ils se séparèrent en deux groupes : les Greuthunges à l’Est et les Tervinges à l’Ouest qui deviendront par la suite les Ostrogoths ou « Goths brillants », à l’Est, et les Wisigoths ou « Goths sages » à l’Ouest.
[9] pièce la plus sacrée du trésor des Goths, donnée par le patrice Aetius en 451 après la bataille des champs Catalauniques pour les récompenser
[10] Champlitte est une commune française située dans le département de la Haute-Saône
[11] Jancigny est une commune française située dans le département de la Côte-d’Or. La terre de Jancigny avait été, comme celle de Talmay, donnée par le duc de Bourgogne Amalgaire à l’abbaye de Bèze.
[12] Talmay est une commune française située dans le canton d’Auxonne du département de la Côte-d’Or. À partir du 3ème siècle, la commune dépend du domaine royal. En 630, le roi Dagobert donne ce fief au duc de Bourgogne Amalgaire, qui en fait don rapidement à l’abbaye de Bèze.
[13] Heuilley-sur-Saône est une commune française située dans le canton d’Auxonne du département de la Côte-d’Or. Vers 475, à l’époque de la chute de l’Empire romain, les deux rives de la Saône à Heuilley passèrent sous l’autorité des Burgondes du roi Gondioc, avec l’assentiment des populations locales désireuses d’être protégées des incursions alamanes. Après la mort de Gondioc, le royaume burgonde fut partagé entre ses quatre fils et Heuilley fit partie du royaume de Gondégisèle dont la capitale était Genève. Ce roi burgonde s’allia aux Francs de Clovis pour éliminer son frère Gondebaud, roi de Lyon. Mais Gondégisèle fut finalement vaincu et tué par son frère qui annexa son royaume dont Heuilley en 501. Cependant, après plusieurs décennies de luttes, le royaume burgonde finit par être conquis en 534 par les Francs mérovingiens, fils ou petit-fils de Clovis. Heuilley fut alors rattaché au royaume d’Austrasie du roi Thibert 1er dont hérita son fils Thibaut 1er qui fut incapable de le conserver. Ce royaume, dont Heuilley, fut annexé par son grand-oncle Clotaire 1er le Vieux, en 555, qui réunit sous sa seule autorité le royaume franc de son père Clovis et le royaume burgonde de Gondebaud. À la fin de l’année 613, la région de Renève, Jancigny, Talmay, Heuilley, Pontailler fut occupée par l’armée du roi de Neustrie, Clotaire II, en lutte contre les armées austrasienne et bourguignonne de la reine régente Brunehilde et du jeune roi Sigebert II, son arrière-petit-fils. Au 7ème siècle la région d’Heuilley fut relativement prospère sous les premiers rois mérovingiens. Un atelier de frappe de monnaie y opéra pendant plusieurs décennies à Pontailler-sur-Saône. En 634, une partie du territoire de la commune actuelle d’Heuilley fut donnée par le duc de Basse Bourgogne, Amalgaire, à l’abbaye de Bèze qu’il venait de créer pour se faire pardonner ses péchés
[14] La Vingeanne est une rivière de l’est de la France, affluent de la rive droite de la Saône, et donc sous-affluent du Rhône.
[15] La Saône est une rivière de l’Est de la France, principal affluent de la rive droite du Rhône. Avec une longueur de près de 480 kilomètres, c’est le neuvième cours d’eau le plus long de France. Depuis 3 000 ans, des bateaux naviguent sur la Saône. Une pirogue datant de l’âge du bronze a été découverte à Saint-Marcel. Datant de l’âge du fer une pirogue a été découverte à Thorey. La Saône a joué le rôle de frontière naturelle par le passé. Notamment, son franchissement par les Helvètes en 58 av. jc marque l’un des éléments déclencheurs de la Guerre des Gaules. À Chalon-sur-Saône, deux épaves de l’époque romaine ont été découvertes. Sur la Saône, la navigation s’effectuait essentiellement à la descente. Dirigés à l’aide de grands rame-gouvernails, les bateaux chargés profitaient d’une pointe d’eau pour se laisser glisser sur la rivière. La remonte, ordinairement à vide, s’effectuait en convois halés par 2 ou 4 chevaux
[16] assemblée des évêques et des nobles
[17] A l’origine intendant général, chargé de diriger les services politiques et domestiques de la maison du roi, le maire du palais apparaît, dès le milieu du 7ème siècle, comme le personnage principal de l’Etat. C’est lui, de fait, qui exerce la réalité du pouvoir.