Il est considéré comme le créateur de la cantate [1] française. Il naquit à Orléans sur la paroisse Saint-Euverte, dans un milieu de tisserands.
La famille de son père était originaire de Vihiers [2]. Le futur compositeur apprit la musique à partir de 1683-1685 environ, en tant qu’enfant de chœur dans la maîtrise de la collégiale Saint-Aignan d’Orléans [3], sous les ordres du maître de musique, le prêtre et chanoine Olivier Trembloit ou Tremblais, Tremblay.
Vraisemblablement, les élèves étaient au nombre de 6, tous des garçons le nombre de places étant fixe et ne variant que très rarement. On formait les jeunes gens pour chanter la voix de dessus [4] dans le chœur de l’église. Aucune femme n’était admise dans la musique des chapitres ecclésiastiques, en France comme ailleurs.
Il est possible que le jeune musicien ait commencé par chanter dans le chœur là aussi professionnel de l’église Saint-André-des-Arts [5]. Le curé de cette paroisse, Nicolas Mathieu , faisait donner des concerts dans lesquels on entendait beaucoup de musiques italiennes ou italianisantes, nouvelles à Paris. Des motets [6] composés par Morin y furent entendus.
Vers l’an 1700, peu après qu’il eut produit ses premiers motets, il créa ou contribua à créer une nouvelle forme, d’abord conçue à l’imitation de l’Italie et essentiellement profane : la cantate française. L’idée qui amena la naissance de cette nouvelle forme s’était développée au Café Laurent, où gens de lettres, artistes et savants de la jeune génération se côtoyaient. On doit les premiers livrets de cantates au poète Jean-Baptiste Rousseau . La mode se répandit ensuite très vite.
À partir de 1701 vraisemblablement, Morin devint Ordinaire de la Musique du nouveau duc d’Orléans Philippe, futur régent du royaume, protecteur des arts et compositeur. Il avait aussi rencontré Jean de Serré de Rieux . Ce conseiller au Parlement de Paris était poète et grand amateur, surtout de la musique italienne.
Le jeune orléanais fut attaché au parlementaire et vécut avec lui et sa famille jusqu’en 1713 dans l’Hôtel de Seré au 33 de la rue des Francs-bourgeois, dans le quartier du Marais, à Paris. Il suivra le poète dans ses adresses parisiennes jusqu’à ce que celui-ci s’installe entre 1721 et 1722 dans son château de Rieux [7], près de la commune de Tillé [8] et de Beauvais [9].
En octobre 1707, les deux hommes produisirent ensemble La Chasse du Cerf, Divertissement chanté, sorte d’opéra en un acte.
Dès le printemps 1719 Morin fut nommé maître de la chapelle [10] et de la chambre de l’abbaye royale de Chelles [11], non loin de Paris. La nouvelle abbesse était Marie Louise Adélaïde d’Orléans , fille de Philippe II, devenu régent.
En 1726, Morin fit graver, pour cette abbaye bénédictine du diocèse de Paris, un Processional en deux volumes, dans lequel on trouve différentes pièces de plain-chant, commun ou composé par Henry Du Mont , Guillaume-Gabriel Nivers, et par d’autres. Une grande utilité de cet ouvrage est de développer des indications d’interprétation très précises ; une autre grande originalité est que Morin agrémente certaines pièces d’un accompagnement vocal en faux-bourdon ou avec basse continue. On y trouve aussi ses propres compositions.
À partir de 1731, après le départ subit de la princesse, l’ancien surintendant de la musique de l’abbaye vécut à Paris dans une aile du Palais Royal [12], avec le claveciniste Toussaint Bertin de la Doué et sa famille.
De 1704 à 1713, Ballard [13] avait déjà publié quatre autres airs du musicien orléanais, dans ses fameux Recueils d’airs sérieux et à boire. Les deux derniers (ceux de 1712 et 1713) furent peu après gravés dans un recueil de douze airs à boire de Morin, qui fait suite à un second Divertissement, L’Himen et l’Amour, Epithalame en 1714.
En 1734, Serré de Rieux publia un recueil de poèmes, dédié au roi Louis XV , “Les Dons des Enfans de Latone”, à la fin duquel on trouve six Nouvelles Fanfares de chasse, de Morin. Le Poème sur la musique de 1714 y figure en bonne place. Il est présenté dans une version actualisée. Le parlementaire l’avait écrit pour tenter de calmer la polémique et donner son point de vue dans une des principales querelles esthétiques de son temps. Il y proposait de réunir la musique italienne et la musique française. On constate aussi que les opéras italiens de Haendel , produits à l’époque où Morin exerçait à Chelles, étaient très appréciés par les deux hommes.