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Louis d’Anjou dit saint Louis d’Anjou ou saint Louis de Toulouse

samedi 14 mars 2015, par lucien jallamion

Louis d’Anjou dit saint Louis d’Anjou ou saint Louis de Toulouse (1274-1297)

Saint Louis d'Anjou, par Antonio Vivarini. Musée du LouvreNé à Brignoles [1], fils de Charles II roi de Naples dit le Boiteux, et de Marie de Hongrie ainsi que le petit-neveu de Louis IX.

Vers l’âge de 7 ans, il fut confié à un gouverneur d’origine normande, Guillaume de Manerie, et à un prêtre, Jean de Bymaret qui devait devenir chanoine de Forcalquier [2]. Il reçut une éducation digne de son rang de prince, mais fut très jeune attiré par la vie religieuse. Dès qu’il eut une douzaine d’années, deux religieux de l’ordre de saint François [3] s’occupèrent du jeune garçon.

La situation internationale vient bouleverser cette vie régulière. En effet après les vêpres siciliennes [4] du 30 mars 1282 qui avaient chassé les Angevins de la Sicile, le roi Charles d’Anjou veut reprendre possession de l’île rebelle. Dès le mois de mai 1282, il fait entreprendre à Marseille la construction d’une flotte commandée par Jean de Vivaud qu’il envoie à Messine [5]. L’année suivante, l’amiral Barthélemy Bonvin rassemble plusieurs navires mais les résultats sont décevants. Tout d’abord, Guillaume Cornut est battu par les Aragonais le 8 juillet 1283 lors de la bataille de Malte [6], puis la flotte marseillaise et napolitaine est à nouveau défaite le 5 juin 1284 par l’amiral Ruggero de Laura. Au cours de cette dernière bataille, le père de Louis, Charles qui est seulement prince de Salerne mais héritier de la couronne de Naples, est fait prisonnier.

Charles 1er d’Anjou étant mort à Foggia [7] le 7 janvier 1285, le prince de Salerne devient roi de Naples sous le nom de Charles II mais reste en prison.

À la suite du traité d’Oloron [8] de la fin juillet 1287 et après différentes tractations, Charles II est libéré en 1288 mais à la condition que trois de ses fils, Louis, Robert et Raymond Bérenger, soient livrés en otage au roi d’Aragon ainsi que soixante seigneurs provençaux et vingt notables marseillais.

Louis sera donc prisonnier en Catalogne pendant sept ans, soit de l’âge de quatorze à vingt-et-un an. Il fut d’abord emprisonné au château de Moncade près de Barcelone, puis dans celui de Ciurana dans la province de Tarragone. Les conditions de détention dans ce dernier lieu étaient particulièrement dures et il y contracta probablement la tuberculose dont il mourut peu de temps après.

Il fit part de son intention de se faire prêtre à son père qui ne s’y opposa pas. Pendant sa détention, le pape Célestin V le nomma en octobre 1294 évêque de Lyon, mais cette consécration ne fut pas effective.

Grâce à la forte implication du pape Boniface VIII, un traité de paix est signé à Anagni [9] entre le roi d’Aragon et le roi de Naples le 12 juin 1295. Charles II s’apprêtait à se rendre en Catalogne lorsqu’il reçut la terrible nouvelle du décès de son fils aîné Charles Martel qui faisait de Louis d’Anjou l’héritier de la couronne de Naples s’il ne s’était pas désisté au profit de son frère Robert. Le 31 octobre 1295 à Figuières [10], une rencontre eut lieu entre le roi Jacques II d’Aragon et Charles II d’Anjou au cours de laquelle les prisonniers furent libérés.

La libération de Louis ne change pas sa décision de rentrer dans les ordres. De retour en Provence, il visite les églises et couvents, il porte secours aux pauvres et aux prisonniers. Partout il reçoit un accueil chaleureux. Arrivé à Naples, il se retire au château de l’Œuf [11] et y rassemble une communauté de frères mineurs.

Le pape Boniface VIII qui n’avait pas oublié la nomination de son prédécesseur, le nomme évêque de Toulouse. La cérémonie de prise d’habit qui eut lieu le 23 décembre 1296 fut suivie de la consécration par le pape Boniface VIII dans la basilique Saint-Pierre le 30 décembre 1296.

Le 5 janvier 1297, Louis quitte la ville éternelle pour retourner à Naples où sa venue suscita un enthousiasme général. Pour se rendre dans son diocèse de Toulouse, il alla à Florence et Brignoles puis fit un long détour par Paris pour rencontrer le roi de France Philippe IV le Bel. Il rejoignit Toulouse au mois de mars 1297 pour administrer son diocèse. Reçu par les capitouls et les différents corps et corporations, il fait une entrée triomphale. Il transforme son palais et y introduit l’ordre et la simplicité. Il effectue plusieurs visites notamment à Barcelonne.

Persuadé que Boniface VIII l’avait consacré évêque parce qu’il était fils de roi et non parce qu’il était un simple prêtre, il envisage de démissionner. Ayant appris que son grand-oncle Louis IX serait canonisé le 11 août au cours d’une cérémonie à laquelle il était invité, il décide de se rendre à Rome.

Au cours de son voyage, il s’arrête à Tarascon [12] puis à Brignoles, sa ville natale. Là il tombe gravement malade et meurt le 19 août 1297 à l’âge de 23 ans. Le couvent des frères mineurs à Marseille fut choisi pour être sa sépulture.

Sa réputation de sainteté fut si grande que l’évêque de Marseille, Durand de Trésémines , sollicita du pape Clément V un procès de canonisation qui fut confié à Guy de Neufville évêque de Saintes [13], et à Raymond évêque de Lectoure [14].

Le 7 avril 1317, le pape Jean XXII, ancien official de Louis d’Anjou à Toulouse, publie en présence du roi Robert 1er de Naples la bulle de canonisation.

Le 8 novembre 1319 le roi Robert, accompagné de son épouse la reine Sancia de Majorque et de nombreux cardinaux, se rendit à Marseille pour assister au transfert des restes de son frère du caveau où il reposait au maître-autel du couvent des frères mineurs.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Emile G.Léonard, Les angevins de Naples, Presses Universitaires de France, Paris, 1954

Notes

[1] Brignoles est une commune française du Territoire Provence Verte en région Provence-Alpes-Côte d’Azur, située dans le département du Var. Brignoles est la « capitale du Centre Var » après avoir été la cité des Comtes de Provence. En 1056, les seigneurs de Brignoles donnent à Saint-Victor de Marseille, l’église Saint-Jean des Vignes construite par un riche tenancier, Baronus. Plusieurs seigneurs se partagent au 11ème siècle la ville et son territoire. Deux grandes familles celles de Gualdrade (Geofroy de Rians, son gendre, Sciocia sa fille, Guillaume et Pons ses petits fils) et celle d’Ingilran, évêque de Cavaillon, donnent de nombreuses terres, situées sur le territoire de Brignoles aux moines marseillais. Brignoles est au 12ème siècle une ville consulaire, jusqu’à la cession du consulat par les nobles de la ville en 1222 à Raimond Béranger V. La comtesse douairière Béatrice de Savoie demeure jusqu’à sa mort maîtresse de la ville par suite d’un accord avec son gendre. Vers le milieu du 13ème siècle, Charles II de Naples et son épouse Marie de Hongrie établissent leur résidence dans l’ancien château fort qu’ils aménagent plus confortablement. C’est dans ce château que naît en 1274 leur fils aîné Saint-Louis de Brignoles et d’Anjou, évêque de Toulouse. Il meurt à l’âge de 23 ans, le 19 août 1297, en présence de toute la cour et de son ancien précepteur, Jacques Duèze, futur pape du nom de Jean XXII.

[2] Forcalquier est une commune française située dans le département des Alpes-de-Haute-Provence en région Provence Alpes Côte d’Azur. Jadis capitale d’un comté florissant, fondée au 11ème siècle, elle est maintenant chef-lieu d’arrondissement. Au 12ème siècle, les comtes de Forcalquier font de leur ville la capitale d’un comté qui s’étendait des sources de la Durance aux portes de Cavaillon, et dont les villes principales étaient Embrun, Gap, Sisteron, Manosque, Pertuis, Apt et Sault. En 1209, le mariage de Garsende de Sabran et d’Alphonse II de Provence fait revenir le comté de Forcalquier dans les mains des Provence, et Forcalquier devient une de leurs résidences.

[3] Moines de l’ordre mineur de frères laïcs mendiants fondé par saint François d’Assise en 1209, sur les principes rigoureux de l’humilité totale et de la pauvreté extrême. Les franciscains ont une mission de prédication itinérante. Au 13ème siècle, l’ordre se divise, malgré les tentatives de conciliation de saint Bonaventure, entre les adeptes de la règle de pauvreté originelle et les spirituels, qui jugent la mission d’enseignement incompatible avec la misère matérielle. Malgré ces dissensions, et les diverses branches qui en découlent, les franciscains poursuivent une lutte active contre les hérésies et se répandent rapidement au travers de la chrétienté. Les franciscains portent une robe brune avec une corde pour ceinture (ce qui leur a valu le nom de cordeliers), habit des pauvres de leur temps. A la fin du 13ème siècle, il existe déjà 1500 maisons de franciscains. L’ordre franciscain s’est diversifié en trois courants : les frères mineurs, les frères mineurs conventuels et les frères mineurs capucins. Il existe aussi un tiers ordre de laïcs. Les franciscains sont partis en mission dans le monde entier.

[4] Les « Vêpres siciliennes » sont un soulèvement et une révolte populaire de l’île de Sicile contre la domination féodale du roi d’origine française Charles d’Anjou, survenu à Palerme et Corleone, le 31 mars 1282, mardi de Pâques. À la suite de ce soulèvement et du massacre des Français, les Siciliens se libèrent du joug angevin en passant sous la protection du roi d’Aragon Pierre III1.

[5] Messine est une ville italienne, chef-lieu de la province de même nom en Sicile. Messine est située à l’extrémité nord-est de la Sicile, sur la rive occidentale du détroit de Messine qui sépare la péninsule italienne (la pointe de Calabre) de la Sicile. La ville de Reggio di Calabria est située de l’autre côté du bras de mer.

[6] La bataille navale de Malte est livrée le 8 juin ou 8 juillet 1283 pendant la guerre des Vêpres siciliennes. Elle oppose les flottes aragonaise et provenço-angevine composées de galères. Les Aragonais, commandés par Roger de Lauria, remportent une victoire décisive sur leurs adversaires, menés par les amiraux Barthélemy Bonvin et Guillaume Cornut. Ce dernier est tué lors des combats.

[7] Foggia est une ville italienne de la province du même nom dans les Pouilles en Italie.

[8] Traité d’Oloron. Accords sur Naples et la Sicile entre Philippe le Bel et Alphonse III d’Aragon, avec la médiation du roi Édouard 1er d’Angleterre. Charles II d’Anjou est libéré en 1288.

[9] Le traité d’Anagni, qui n’était qu’un avenant au traité de Tarascon de 1291, fut signé le 20 juin 1295, sur l’initiative de Boniface VIII, pour mettre un terme à la guerre opposant la couronne d’Aragon à la France au sujet de la Sicile, à la suite de la conquête de l’île par Pierre III d’Aragon, qui avait entraîné la Croisade d’Aragon. Il fut élaboré par le Pape et les ambassadeurs de Jacques II d’Aragon, de Philippe IV de France et de Charles II de Naples, dit le Boiteux.

[10] Figueras ou Figueres est une ville du nord de la Catalogne en Espagne. C’est la capitale de la comarque de l’Alt Empordà dans la province de Gérone. Elle se situe à 24 km au sud du col du Perthus, sur l’axe ferroviaire et routier qui relie Barcelone à la France.

[11] Le Castel dell’Ovo en français : château de l’Œuf est un château situé dans la ville italienne de Naples. C’est le plus ancien château de Naples, indissociable de l’histoire de sa fondation par un peuple d’origine grecque, abordant l’îlot de Partenope et où ils ont construit un système défensif au 7ème siècle av. jc. L’édifice est situé sur une petite île, la Mégaride, où les colons de Cumes fondèrent le noyau originel de la ville. Au 1er siècle av. jc. Le patricien romain Lucius Licinius Lucullus construisit sur le site une villa magnifique, le Castellum Lucullanum. Fort de Valentinien III au début du 5ème siècle, c’est à cet endroit que le dernier empereur romain d’Occident, Romulus Augustule, fut exilé par Odoacre en 476. Eugippe fonda un monastère sur le site après 492. Le premier château sur le site a été construit par les Normands au 12ème siècle. L’importance du Château a commencé à décliner lorsque le roi Charles 1er de Sicile construisit un nouveau château, le Castel Nuovo (Nouveau château), et y a déménagé sa cour. Il a été l’objet de nombreux remaniements et le Château de l’œuf est devenu le siège de la Chambre Royale et du Trésor public.

[12] Bouches-du-Rhône

[13] Le diocèse de Saintes est un ancien diocèse de l’Église catholique en France. Selon la tradition, le diocèse fondé par Eutrope de Saintes au 3ème siècle. Il est suffragant de l’archidiocèse métropolitain de Bordeaux. Une partie de son territoire est rattaché au diocèse de La Rochelle lors de la fondation de celui-ci en 1317.

[14] Le diocèse de Lectoure est un ancien diocèse de l’Église catholique en France. Le diocèse est créé au 4ème ou au 5ème siècle. Il est d’abord suffragant de l’archidiocèse métropolitain d’Eauze puis, en 879, de celui d’Auch. Le diocèse est supprimé par la Constitution civile du clergé décrétée par l’Assemblée nationale constituante le 12 juillet 1790 et sanctionnée par Louis XVI le 24 août 1790.