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Arnaud de Lévezou ou de Lévezon

lundi 28 juin 2021, par ljallamion

Arnaud de Lévezou ou de Lévezon (mort en 1149)

Prélat qui à titre d’évêque de Béziers de 1096 à 1121-Archevêque de Narbonne de 1121 à 1149-Légat pontifical de 1129 à 1142

Il joua un rôle important dans les affaires politiques et religieuses de la France méridionale au cours de la première moitié du 12ème siècle.

Fils d’Acfred, seigneur de Lévézou [1] en Rouergue [2] et d’Arsinde, fille de Richard II, vicomte de Millau [3] et de Rixinde de Narbonne, Arnaud naît au sein d’une famille féodale qui avait fortifié le Lévézou au 11ème siècle. Sa carrière ecclésiastique bénéficia probablement de l’influence de son oncle maternel Richard de Millau , abbé de Saint-Victor de Marseille [4], archevêque de Narbonne [5], cardinal et de nombreuses fois légat pontifical [6] en France et en Espagne.

D’abord abbé de Saint-Jacques de Béziers [7], Arnaud est élu évêque de Béziers [8]. Il est consacré par l’archevêque Dalmace de Narbonne .

Après la mort de son oncle Richard de Millau, le 15 février 1121, Arnaud est élu le 16 avril suivant archevêque de Narbonne.

Vers 1128, le pape Honorius II l’institue légat permanent du Saint-Siège.

Arnaud de Lévezou est considéré par les historiens comme un partisan déterminé des comtes de Toulouse [9], notamment dans les luttes qui les opposent aux ducs d’Aquitaine [10] et aux comtes de Barcelone [11] tout au long du 12ème siècle.

En 1108, il accompagne peut-être le comte Bertrand de Toulouse en Terre sainte, venu y réclamer les conquêtes de son père Raymond de Saint-Gilles. On le retrouve du moins témoin en 1111 d’une donation de Bertrand, devenu comte de Tripoli [12] au Saint-Sépulcre de Jérusalem [13].

En 1114, Guillaume IX d’Aquitaine , duc d’Aquitaine, au nom des droits de son épouse Philippa , s’empare de Toulouse [14], au détriment du jeune comte Alphonse Jourdain . En 1119, lorsque les Toulousains se révoltent contre l’occupation poitevine [15], massacrent le châtelain du duc et reconnaissent Alphonse comme seigneur, celui-ci, retenu hors de la ville, en confie le gouvernement à Arnaud de Lévezou, alors évêque de Béziers. Ce dernier administre Toulouse au nom du comte jusqu’à son élection comme archevêque de Narbonne en 1121.

Le 17 juillet 1134 est tué à la bataille de Fraga [16] le vicomte Aymeri II , co-seigneur de Narbonne avec l’archevêque, parent et allié du comte de Barcelone, Raimond-Bérenger IV, rival du comte toulousain.

Profitant de la minorité de l’héritière, la vicomtesse Ermengarde, le comte de Toulouse Alphonse Jourdain se rend maître de Narbonne vers 1139 avec l’appui de l’archevêque Arnaud. Pour mieux assurer sa domination sur le Narbonnais, Alphonse, opportunément libéré de son épouse Faydide d’Uzès, morte ou répudiée, songe à la fin de l’année 1142 à épouser Ermengarde, qui entre dans l’adolescence. Un contrat de mariage est rédigé, le 21 octobre 1142. Ce projet matrimonial, qui ferait passer de façon permanente la vicomté de Narbonne sous contrôle toulousain, menace de bouleverser l’équilibre politique régional. Du point de vue du comte de Barcelone Raimond Bérenger IV, l’enjeu était capital ; il en allait de la conservation des principautés barcelonaises dans le Midi. Fin 1142, c’est donc avec l’appui barcelonais qu’une coalition de seigneurs méridionaux se réunit, sous la direction du chef de la famille Trencavel [17], Roger Ier Trencave l, vicomte de Carcassonne [18], Albi [19] et Razès [20], pour s’opposer aux projets du comte de Toulouse. Sur les conseils du comte de Barcelone, Ermengarde épouse Bernard d’Anduze [21], fidèle du vicomte Roger et cousin des seigneurs de Montpellier [22].

Face à cette coalition, le comte Alphonse cherche à resserrer ses liens avec l’archevêque Arnaud en lui faisant don, le 12 décembre 1142, du château de Conilha dans la vicomté de Narbonne en remerciement de l’affection et du servitium que, dès son plus jeune âge, il a souvent reçu du prélat. Cependant, en 1143, le comte Alphonse, vaincu par ses ennemis et fait prisonnier, est contraint de lâcher prise. Selon le traité de paix qui lui est imposé par Roger, le comte de Toulouse s’engage à restituer Narbonne à Ermengarde.

Arnaud apporte aussi son soutien à Alphonse dans une autre affaire. En 1141, le seigneur de Montpellier Guilhem VI , allié inconditionnel du comte de Barcelone, est chassé de sa ville par les bourgeois révoltés qui aspirent au consulat. Le comte de Toulouse soutient cette sédition qui met ainsi l’un de ses ennemis en difficulté.

Lorsque Guilhem rétablit son pouvoir à Montpellier fin 1143, certains membres de la famille de ses viguiers, les Aimoin, qui avaient fini par appuyer les révoltés et s’étaient fait complices d’Alphonse, sont contraints de fuir. C’est sur le territoire de l’archevêque Arnaud qu’ils trouvent refuge, ce qui vaut au prélat des reproches de la part du pape Célestin II

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu du texte de Jérôme Belmon, « Les vicomtes de Rouergue-Millau (Xe-XIe siècles », Positions des thèses soutenues par les élèves de la promotion 1992, Paris, École nationale des chartes,‎ 1992

Notes

[1] Le Lévézou est un haut plateau cristallin du centre de l’Aveyron d’une altitude moyenne de 900 mètres environ et dont le point culminant est le puech del Pal (1 155 m). Il ne correspond à aucune zone administrative et ses limites ne sont pas réellement définies.

[2] Le Rouergue est une ancienne province du Midi de la France correspondant approximativement à l’actuel département de l’Aveyron. Après avoir fait partie du comté de Toulouse, il fut rattaché à la Guyenne avant d’en être détaché lors de la formation de la province de Haute-Guyenne en 1779.

[3] Millau est une commune française, sous-préfecture du département de l’Aveyron, en région Occitanie. Située à 70 km au sud-est de Rodez, et à 111 km de Montpellier, elle fait partie de l’ancienne province du Rouergue. Au 9ème siècle, la ville est un gros bourg qui devient le siège d’une viguerie et déjà le centre du gant d’agneau. Elle s’entoure alors de remparts. Au 10 et 11ème siècle c’est la naissance de la vicomté de Millau. Dès le 11ème siècle la cité passe successivement sous domination des comtes de Provence, de Barcelone puis des rois d’Aragon, avec en 1112 le mariage de la fille du vicomte de Millau et de Béranger III, futur Roi d’Aragon. En 1187, le Roi d’Aragon lui concède le sceau et la liberté communale par charte consulaire. Le consulat ainsi créé, est chargé d’administrer la ville, de lever l’impôt et d’appliquer la justice. En 1271, Millau passe à la couronne des rois de France.

[4] L’abbaye Saint-Victor de Marseille a été fondée au ve siècle par Jean Cassien, à proximité des tombes de martyrs de Marseille, parmi lesquels saint Victor de Marseille, qui lui donna son nom. L’abbaye prit une importance considérable au tournant du premier millénaire par son rayonnement dans toute la Provence. L’un de ses abbés, Guillaume de Grimoard, fut élu pape en 1362 sous le nom d’Urbain V. À partir du 15ème siècle, l’abbaye entama un déclin irrémédiable.

[5] L’archidiocèse de Narbonne est un ancien archidiocèse métropolitain de l’Église catholique en France. Le diocèse de Narbonne est érigé au 4ème siècle. Au 5ème siècle, vers 445, il est élevé au rang d’archidiocèse métropolitain. Dans le cadre de l’éradication de l’hérésie cathare, la partie occidentale du diocèse (Haut-Razès) est érigé en diocèse suffragant le 18 février 1318 par le pape Jean XXII, avec pour siège l’abbaye d’Alet. Au cours des 13ème et 14ème siècles, les archevêques de Narbonne ont élevé 18 châteaux sur leurs terres, dont ceux de Montels et de Capestang. À la suite du Concordat de 1801, le siège archiépiscopal est supprimé et le territoire de l’archidiocèse est partagé entre le diocèse de Carcassonne, qui couvre alors les départements de l’Aude et des Pyrénées-Orientales, et le diocèse de Montpellier, qui couvre alors les départements de l’Hérault et du Tarn.

[6] Le légat apostolique ou plus communément légat du pape, ou légat pontifical, est un représentant extraordinaire du pape chargé d’une mission spécifique, généralement diplomatique. Il se distingue en cela du nonce apostolique qui est un ambassadeur permanent du Saint Siège auprès des gouvernements étrangers.

[7] L’église Saint-Jacques est une église romane située à Béziers dans le département de l’Hérault. Elle fut construite durant le premier quart du 12ème siècle. Cependant, la date de sa fondation demeure incertaine et certains documents affirment qu’elle fut fondée par Charlemagne. Une chose est certaine : elle est l’une des plus anciennes églises de Béziers. Saint-Jacques fut, grâce à son abbaye et avec la cathédrale Saint-Nazaire, une étape pour les jacquets, pèlerins de Saint-Jacques-de-Compostelle, qui s’arrêtaient à Béziers

[8] Le diocèse de Béziers est un ancien diocèse de l’Église catholique en France. Il est un des diocèses historiques de l’ancienne province du Languedoc.

[9] Le comté de Toulouse est un ancien comté du sud de la France, dont le titulaire était l’un des six pairs laïcs primitifs. Le comté de Toulouse est créé en 778 par Charlemagne, au lendemain de la défaite de Roncevaux, afin de coordonner la défense et la lutte contre les Vascons et intégré dans le royaume d’Aquitaine, lorsque celui-ci est créé trois ans plus tard.

[10] Le duché d’Aquitaine est constitué en 675, à la mort de Childéric II. Il se reconstitue au 9ème siècle, comme héritier du royaume d’Aquitaine attribué à Pépin 1er d’Aquitaine (mort en 838). Il fut ensuite l’objet de luttes entre les comtes d’Auvergne, de Toulouse et de Poitiers. Le duc d’Aquitaine était l’un des six pairs laïcs primitifs. L’Aquitaine a regroupé au fil des temps différents territoires. Pendant le règne d’Aliénor d’Aquitaine, Poitiers était la résidence habituelle des ducs.

[11] Le comté de Barcelone est à l’origine une subdivision du royaume wisigoth en Hispanie. Conquis par les Maures à la fin du 8ème siècle, reconquis par Charlemagne en 801, il est intégré à la marche d’Espagne, province frontière face aux musulmans d’Al-Andalus. Des comtes nommés par les souverains carolingiens se succèdent à la tête de ce comté, considéré comme le plus important de la marche. À l’extinction de la dynastie carolingienne, les comtes se succèdent de façon héréditaire dans la descendance du comte Guifred, dit le Velu. Cette dynastie domine également les comtés de Girone et de Ausone, et rassemble peu à peu sous son autorité directe ou indirecte tous les comtés formant l’actuelle Catalogne : Besalú, Cerdagne, Empuries, Pallars, Roussillon et Urgell.

[12] Le nom de la cité proviendrait du grec Tripolis. Elle aurait été nommée ainsi du fait de sa séparation en trois parties distinctes par les commerçants venant de Tyr, Sidon et Aradis. À partir de 1070, Tripoli est sous la domination de la famille Banû ’Ammâr, qui s’est rendue indépendante des califes fatimides d’Égypte. En 1102, lors de la première croisade, la ville est assiégée par Raymond IV de Saint Gilles et défendue par le cadi Fakhr al-Mulk ibn-Ammar. Le siège dure près de 10 ans, infligeant de lourds dégâts à la ville, qui tombe aux mains des croisés en 1109. Elle est ensuite, durant le temps des croisades, la capitale du comté de Tripoli, l’un des principaux États francs du Levant.

[13] L’église du Saint-Sépulcre ou basilique du Saint-Sépulcre, également appelée basilique de la Résurrection par les chrétiens d’Orient, est une église chrétienne située dans le quartier chrétien de la Vieille ville de Jérusalem. Cette basilique est vénérée par une grande partie des chrétiens qui y vont en pèlerinage depuis le 4ème siècle. Il s’agit d’un sanctuaire englobant selon la tradition le lieu de la crucifixion (le Golgotha), ainsi que la grotte où le corps du Christ fut déposé après sa mort (le Saint-Sépulcre ou tombeau de Jésus). Par inférence, c’est là qu’aurait eu lieu la résurrection (Anastasis en grec, « Résurrection »).

[14] Le comté de Toulouse est un ancien comté du sud de la France, dont le titulaire était l’un des six pairs laïcs primitifs. Le comté de Toulouse est créé en 778 par Charlemagne, au lendemain de la défaite de Roncevaux, afin de coordonner la défense et la lutte contre les Vascons et intégré dans le royaume d’Aquitaine, lorsque celui-ci est créé trois ans plus tard.

[15] Le Poitou était une province française, comprenant les actuels départements de la Vendée (Bas-Poitou), Deux-Sèvres et de la Vienne (Haut-Poitou) ainsi que le nord de la Charente et une partie de l’ouest de la Haute-Vienne, dont la capitale était Poitiers. Il a donné son nom au Marais poitevin, marais situé dans l’ancien golfe des Pictons, sur la côte occidentale de la France, deuxième plus grande zone humide de France en superficie après la Camargue ; le marais s’étend de l’Atlantique aux portes de Niort et du sud de la Vendée au nord de La Rochelle.

[16] La bataille de Fraga est une victoire écrasante des Almoravides remportée le 17 juillet 1134 près de Fraga sur l’armée chrétienne dirigée par Alphonse 1er le Batailleur, roi d’Aragon.

[17] Les membres de la maison Trencavel furent à une époque parmi les seigneurs méridionaux les plus puissants après le comte de Toulouse et le roi d’Aragon (aussi et d’abord comte de Barcelone) qui étaient leurs suzerains. À l’apogée de leur règne, ils détenaient les vicomtés d’Agde, Albi, Ambialet, Béziers, Carcassonne, Nîmes et du Razès. Les Trencavel furent parmi les acteurs majeurs de la croisade des Albigeois qui a scellé, à plus ou moins long terme, la fin des possessions seigneuriales de cette maison, en même temps que celle des comtes de Toulouse.

[18] La vicomté de Carcassonne apparaît pour la première fois en 1082. C’est à cette date que Bernard Aton IV Trencavel, vicomte de Nîmes et d’Albi, revendiquant les droits de sa mère Ermengarde, réclame les comtés de Carcassonne et de Razès, ainsi que les vicomtés de Béziers et d’Agde, et s’en empare. Les Trencavel deviennent alors seigneurs de fait, sans porter le titre de vicomtes. Ermengarde meurt en 1101, et son fils Bernard-Aton Ier (IV de Nîmes et d’Albi) est proclamé formellement vicomte de Carcassonne, Razès, Béziers et Agde. Barcelone tente de s’y opposer à plusieurs reprises.

[19] L’Albigeois est le nom donné à l’ancienne vicomté d’Albi, région historique qui faisait partie de la province du Languedoc. La taille de cette région a varié au fil de l’histoire. Elle est nettement plus grande que le Pays d’albigeois région naturelle située autour d’Albi.

[20] Le Razès désigne historiquement un ancien pagus ou comté carolingien portant le nom de sa capitale historique : l’oppidum ou cité de Redae (l’actuelle Rennes-le-Château au sud-ouest du département de l’Aude). Le comté du Razès fut absorbé par la province du Languedoc en 1240, mais subsiste largement dans la toponymie de la région comprise entre Mirepoix et Limoux (Belvèze-du-Razès, Fenouillet-du-Razès, Peyrefitte-du-Razès, Bellegarde-du-Razès, etc.)

[21] La Maison d’Anduze est, dès le 11ème siècle, l’une des plus importantes familles nobles du Languedoc. Ses premiers membres battaient monnaie et se qualifiaient marquis et selon certains auteurs prince d’Anduze. La maison d’Anduze fut la souche de plusieurs autres familles qui du 10ème siècle au 12ème siècle se séparèrent du tronc commun et formèrent diverses branches sous des noms particuliers tels que Bermond, Roquefeuil, Alais, Lavoulte etc

[22] La Seigneurie de Montpellier était une juridiction médiévale centrée sur la ville de Montpellier (France) et de ses environs. La Seigneurie de Montpellier voit le jour le 26 novembre 985, lorsque le comte Bernard II de Melgueil (Mauguio) octroie au chevalier Guilhèm en échange de son dévouement, l’ancien territoire situé entre l’antique voie domitienne, le Lez et La Mosson. Ses héritiers construiront sur leur nouveau fief un véritable bourg fortifié, doté d’un château et d’une chapelle qui deviendra la ville de Montpellier.