Charles du Puy-Montbrun (1530-1575)
Gentilhomme du Dauphiné-Capitaine huguenot des guerres de religion-Chef des protestants du Dauphiné avant le duc de Lesdiguières
La famille du Puy-Montbrun est l’une des plus anciennes familles nobles du Dauphiné, désormais éteinte.
Son château de Montbrun [1] ayant été démantelé sur ordre royal, en 1560, Charles du Puy-Montbrun fit construire celui de la Gabelle à Ferrassières [2]. Son emplacement était idéal pour le chef huguenot qui pouvait aussi bien pénétrer dans les Baronnies [3] ou descendre attaquer le Comtat Venaissin [4] et la Provence [5]. La tradition veut qu’il ait pu y réunir jusqu’à 1 500 arquebusiers.
En 1563, il est le second du baron des Adrets à Lyon et on le dit responsable des massacres qui s’y commettent. Lorsque Jean V de Parthenay reprend le commandement de cette ville pour les armées de Condé, il trahit le baron des Adrets et se range du côté du chef poitevin.
Il est à Moncontour [6] en 1569. Après la défaite protestante, il retourne avec Lesdiguières en Dauphiné. Ensemble, ils battent le baron de Gordes Bertrand Rambaud de Simiane au passage du Rhône.
Le 27 avril 1574, il met le siège devant Serres [7], et bat avec Lesdiguières les catholiques du capitaine Gargas à la Bâtie-Montsaléon [8] le 8 mai, leur faisant 100 à 200 morts. La ville se rend peu après.
Il tente le siège de Grenoble, repris par le parti catholique, mais la ville leur résiste.
Il refuse le passage à Henri III au pont de Beauvoisin [9] quand celui-ci revient de Pologne, après la mort de son frère Charles IX.
Le 12 juin 1575, en tentant de reprendre et fortifier Châtillon-en-Diois [10], Lesdiguières est pris à partie par une sortie de la garnison catholique de Die [11], composée d’arquebusiers dauphinois et d’une dizaine d’enseignes de Suisses sous les ordres du gouverneur de la ville, Claude de Lhère de Glandage et du lieutenant-général du Dauphiné, De Gordes. Montbrun arrive à marche forcée en renfort depuis Barnave [12] et intercepte la garnison au franchissement du Pont d’Oreille [13] le lendemain. C’est au prix de la mort de 800 Suisses et de leur capitaine que Glandage et De Gordes peuvent regagner l’abri des remparts de Die.
De Gordes bloqué dans Die, les villes de Lyon et Grenoble dépêchent une armée de secours à Romans [14] sous les ordres d’Ourches et de Lestang. Cette armée rencontre celle de Montbrun au pont sur la Gervanne [15] à Mirabel-et-Blacons [16] début juillet 1575.
Montbrun y est fait prisonnier ; emprisonné à Crest [17] et jugé à Grenoble, il est condamné ; mais sa fierté en impose aux juges, et ils redoutent une révolte le jour de son exécution. Ils lui enjoignent de ne rien dire au peuple, s’il ne veut avoir la langue coupée. Il est porté dans une chaise au lieu de son supplice car il a eu la cuisse cassée dans le combat. Le roi lui refuse la grâce, et il est décapité le 13 août.
Sur ordre du roi, son procès est rayé des registres du greffe 2 ans après sa mort. La paix de 1576 le réhabilita mais toute trace en fut totalement effacée par arrêt du même parlement du 17 février 1648. La vie de Charles du Puy-Montbrun a été écrite par Allard, auteur de l’Histoire du baron des Adrets.
Notes
[1] Montbrun-les-Bains est une commune française située dans le département de la Drôme. Situé à environ 600 mètres d’altitude au pied du Mont Ventoux. Le vieux village est construit sur une colline, à mi-hauteur se trouve un beffroi et un château Renaissance au sommet.
[2] Ferrassières est une commune française située dans le département de la Drôme. Charles Dupuy-Montbrun, dit le brave Montbrun, dont le château à Montbrun avait été démantelé sur ordre royal, en 1560, fit construire celui de la Gabelle. Son emplacement était idéal pour le chef huguenot qui pouvait aussi bien pénétrer dans les Baronnies ou descendre attaquer le Comtat Venaissin et la Provence. La tradition veut qu’il ait pu y réunir jusqu’à 1 500 arquebusiers. Son fils et héritier, Jean Alleman Dupuy-Montbrun, fut seigneur de Montbrun et de Ferrassières, conseiller d’État et général de la cavalerie protestante en Languedoc. En 1591, il avait épousé Lucrèce de La-Tour-du-Pin-Gouvernet, fille de René et d’Isabeau de Montauban. Leur second fils, Jean, fut comte de Ferrassières, et leur petite-fille, Espérence, qui porta le nom de Dupuy-Montbrun-Ferrassières, comtesse
[3] Les Baronnies sont une région historique et naturelle du Dauphiné. Elle s’étend entre le sud-est de la Drôme et l’ouest des Hautes-Alpes.
[4] Le Comtat Venaissin, ou Comtat, est un ancien État qui faisait partie des États de l’Eglise. Il a été fondé au Moyen Âge en 1274 et a été totalement dissous le 14 septembre 1791. Aujourd’hui c’est une partie de l’actuel département français de Vaucluse en couvrant presque son entièreté, entre Rhône et Durance, mont Ventoux et Dentelles de Montmirail, comprenant les villes de Carpentras, Vaison-la-Romaine, L’Isle-sur-la-Sorgue et Cavaillon. Avignon était par ailleurs une cité-État depuis son rachat en juin 1348 par le Pape Clément VI.
[5] La Provence est une région historique et culturelle ainsi qu’un ancien État indépendant et une ancienne province (en tant qu’État associé à la France) avant de disparaître à la Révolution française
[6] Le 3 octobre 1569, les forces catholiques du roi Charles IX, sous le commandement du duc d’Anjou, battent à Moncontour, dans le Poitou, les troupes huguenotes, commandées par l’amiral Gaspard de Coligny. Cette bataille a lieu durant la troisième guerre de Religion.
[7] Serres est une commune française située dans le département des Hautes-Alpes. Au Moyen Âge, la ville devient la plus importante de la vallée et un château est construit sur le rocher de la Pignolette qui la domine. L’église paroissiale est construite au 12ème siècle. Elle est dédiée à saint Arey, évêque de Gap. Des immunités sont accordées en 1285 à tout homme habitant Serres et son fort par Bertrand de Mévouillon, seigneur de Serres et de Mison, fils de Pierre de Mison et de demoiselle Galburge. Tout étranger établi à Serres depuis un an et un jour pouvait jouir des mêmes droits que les habitants de Serres. En 1298 la seigneurie de Serres est achetée par le dauphin de Viennois. Le dauphin Jean II accorde des privilèges aux juifs et aux Lombards. Le dauphin de Viennois transfère le chef-lieu du bailliage de Gapençais d’Upaix à Serres où il est resté jusqu’en 1512.
[8] La Bâtie-Montsaléon est une commune française située dans le département des Hautes-Alpes
[9] Beauvoisin est une commune française située dans le département de la Drôme.
[10] Châtillon-en-Diois est une commune française située dans le département de la Drôme.
[11] Die est une commune française, sous-préfecture du département de la Drôme. Le 16 octobre 1467, la ville de Die obtint la confirmation d’anciens privilèges, par lettres patentes du roi Louis XI. L’Académie protestante de Die est fondée en 1604. Le conseil du roi a supprimé l’Académie de Die le 11 septembre 1684. Après la bataille du Pas de Suse, le roi Louis XIII, accompagné de Richelieu, fait étape avec ses troupes à Die, le 4 mai 1629. Il lui sera offert, pour l’occasion, 2 charges de vins de muscat. Après la Révocation de l’Édit de Nantes, en 1685, les protestants qui restent dans le pays sont forcés de pratiquer leur culte au Désert, ceux qui sont pris sont condamnés aux galères.
[12] Barnave est une commune française située dans le département de la Drôme. Avant 1790, Barnave était une communauté de l’élection de Montélimar, subdélégation de Crest et du bailliage de Die, formant une paroisse du diocèse de Die
[13] entre Die et Molières
[14] Romans-sur-Isère est une commune française située dans le département de la Drôme situé sur la rive droite de l’Isère à 20 km au nord-est de Valence (la préfecture de la Drôme). Les premiers mégissiers et tanneurs s’installèrent dans le quartier de la Presle à la fin du 14ème siècle. Durant la guerre de Cent Ans, la ville s’entoura d’un second rempart qui englobait les faubourgs : quartiers de la Presle, de la Pavigne et de Saint-Nicolas. Ce rempart commença à être abattu vers 1830. Au début du 15ème siècle, la draperie romanaise s’exportait jusqu’au Proche-Orient et les riches marchands se firent alors construire des hôtels particuliers en style gothique flamboyant un peu partout dans la cité. Durant la deuxième moitié du 16ème siècle, Romans dut essuyer une série de catastrophes : grands froids, grandes sècheresses, pestes, etc. La Réforme progresse dans la région et les convertis sont nombreux à Romans. En 1561, les adeptes de la religion réformée menacent d’expulsion les cordeliers. La crise religieuse se double d’une crise sociale et anti-seigneuriale (contre les chanoines). Elle atteint son paroxysme en 1562, où le pays de Romans fut ravagé au nom du protestantisme (la collégiale Saint-Barnard fut mise à sac) et lors du Carnaval sanglant de 1580
[15] La Gervanne est une rivière française qui coule dans le département de la Drôme. C’est un affluent droit de la Drôme, donc un sous-affluent du Rhône. La longueur de son cours d’eau est de 29,9 km. La Gervanne prend sa source dans les hauteurs du rebord occidental du massif du Vercors au niveau du col de la Bataille, à 1 200 m d’altitude
[16] Mirabel-et-Blacons est une commune française située dans le département de la Drôme. Mirabel est rattaché au royaume de France en 1461 ; un châtelain est installé au village, qui assure la police et prélève les impôts royaux. La Réforme protestante connaît d’importants succès dans la vallée du Rhône, et le seigneur de Mirabel, Claude de Mirabel, se convertit. Il se bat dans les rangs huguenots lors des guerres de religion. Lors du siège de Die en 1574 par les huguenots, un renfort de troupes catholiques provoquent la bataille au pont sur la Gervanne, le 4 juillet. Le capitaine protestant de Montbrun y est blessé et fait prisonnier. La crainte d’une attaque des catholiques pousse au renforcement des fortifications : c’est en les inspectant que Claude de Mirabel tombe du chemin de ronde et meurt, en 1576. Au 17ème siècle, les Forest, une famille des Baronnies, possède la seigneurie. C’est elle qui donne le nom de Blacons au confluent de la Gervanne et de la Drôme, où se trouve le moulin
[17] Crest est une commune française située dans le département de la Drôme. Elle se trouve à 25 km au sud-est de Valence.