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Théophylacte de Tusculum dit Benoît IX

mercredi 13 mars 2024, par lucien jallamion (Date de rédaction antérieure : 15 décembre 2011).

Théophylacte de Tusculum dit Benoît IX (vers 1012, mort vers 1055/1056

Pape de 1032 à 1044, du 10 mars au 1er mai 1045 et du 8 novembre 1047 au 16 juillet 1048

Benoît IX 145ème Pape de l'Église catholique

Né dans le Latium [1], issu de la puissante famille des Tusculani [2], fils d’ Albéric III de Tusculum , neveu des papes Benoît VIII et Jean XIX. À la mort de ce dernier, Albéric fait élire son fils pape. Laïc et également très jeune.

Il continue la politique d’apaisement ébauchée par son prédécesseur vis-à-vis de la noblesse, son père se retire partiellement de la vie politique, peu à peu remplacé par son frère, Grégoire II. Les contacts avec l’Empereur ne commencent pas avant la décision de Conrad II le Salique, en 1037, de déposer Aribert, archevêque de Milan. Contrairement aux espoirs impériaux, Benoît n’approuve pas immédiatement cette décision, mais attend l’année suivante pour excommunier Aribert, comme demandé. Il fait également preuve de son indépendance en cassant en 1044 la décision imposée par Conrad II à Jean XIX au sujet du patriarcat d’Aquilée [3].

En matière ecclésiastique, il soutient les ordres monastiques contre les ordinaires. Sur l’initiative de Pierre Damien, il dépose 2 évêques considérés comme simoniaques [4]. Il canonise Siméon de Syracuse , mort en ermite à Trèves [5].

En septembre 1044, une émeute contre le clan Tusculanum, menée par les Stephani, une branche des puissants Crescentii [6], rivaux des Tusculani, le force à fuir Rome. Poussés par les Stephani, les Romains élisent Jean, évêque de Sabina en janvier 1045 au terme d’une lutte féroce. Il est intronisé le 13 ou 20 janvier 1045 sous le nom de Sylvestre III .

Benoît IX réagit par une ex communion immédiate. Trois mois plus tard, il parvient à prendre Rome et retrouve le trône pontifical le 10 mars. Il devient alors un simple pion dans l’échiquier politique romain, où s’affrontent les grands clans familiaux. Le 1er mai 1045, il se démet en faveur de son oncle, Jean Gratien, qui est élu sous le nom de Grégoire VI . De larges sommes sont échangées à cette occasion, sous le prétexte de dédommager le clan Tusculum. Benoît IX se retire sur ses terres familiales et ne paraît plus en public.

En 1046, l’empereur germanique Henri III, appelé à mettre fin à l’anarchie, se rend en Italie. Grégoire VI convoque le concile de Sutri [7]. Sylvestre III est condamné mais Grégoire VI ne peut pas nier qu’il a acquis sa tiare par simonie : il se voit contraint d’abdiquer.

Sous la pression d’Henri III, le concile élit pape, en décembre 1046, Suidger, évêque de Bamberg, qui prend le nom de Clément II . Ce dernier meurt moins d’un an plus tard, le 9 octobre 1047. Les Tusculani profitent de l’occasion pour réinstaurer Benoît IX sur le trône de Pierre. Il accède ainsi une troisième fois au siège pontifical, du 8 novembre 1047 au 17 juillet 1048. Un parti romain proteste auprès de l’Empereur, qui se prononce contre Benoît IX et fait élire à la fin de 1047 le Bavarois Poppo de Brixen, qui prend le nom de Damase II. Ce dernier ne sera pape que 23 jours, il meurt à Palestrina [8] de la malaria.

Cependant, Benoît IX a pris la fuite après qu’Henri III ait envoyé à Rome le marquis Boniface de Canossa. Celui-ci fait alors élire le Lorrain, Brunon d’Eguisheim-Dagsbourg qui prend le nom de Léon IX. Avec l’aide de l’Empereur, le nouveau pape combat les Tusculani et ravage leurs fiefs. Refusant de répondre aux accusations de simonie pesant contre lui, Benoît IX est excommunié, de même que ses proches.

À la mort de Léon IX, en avril 1054, Benoît IX tente une nouvelle fois de monter sur le trône pontifical, en vain. Après cet ultime échec, il se retire dans le monastère de Grottaferrata, qui appartient à la sphère d’influence des Tusculani.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu du texte de K.-J. Herrmann, Philippe Levillain (dir.), Dictionnaire historique de la papauté, Paris, Fayard, 2003 (ISBN 2-213-618577).

Notes

[1] Le Latium, ou officiellement Lazio en italien, est une région d’Italie centrale. Sa capitale est Rome. Elle est délimitée par la Toscane, l’Ombrie, les Abruzzes, le Molise, la Campanie et la mer Tyrrhénienne. Le Latium est habité depuis le 2ème millénaire av. jc par les Latins qui subissent la domination étrusque. Pour lutter contre celle-ci, ils ont formé la Ligue latine, qui comprenait une trentaine de cités, dont Albe. Au 4ème siècle av. jc, le Latium fut soumis par Rome et ses habitants devinrent des citoyens romains.

[2] Les Théophylactes (ou Tusculani d’après leur titre de comtes de Tusculum) sont une famille sénatoriale romaine qui exerça une mainmise sur la papauté aux 10 et 11ème siècles.

[3] Le Patriarcat d’Aquilée est une entité politico-religieuse qui a existé de 568 à 1751 qui, avant tout sous le profil ecclésiastique, administrait un territoire très vaste avec au centre l’actuel Frioul. Jusqu’en 811, sa juridiction ecclésiastique arrivait jusqu’au fleuve Danube au nord, au lac Balaton à l’est et à l’ouest jusqu’à Côme. Au sud, il a eu la juridiction ecclésiale de l’Istrie jusqu’en 1751, année de son extinction.

[4] La simonie est, pour les catholiques, l’achat et la vente de biens spirituels, tout particulièrement d’un sacrement et, par conséquent, d’une charge ecclésiastique.

[5] Trèves est une ville et un arrondissement d’Allemagne, dans le Land de Rhénanie-Palatinat. La ville est située sur la Moselle. Cette ville, ancienne colonie romaine, est fondée à l’époque romaine, en l’an 16 av. jc sous le nom d’Augusta Treverorum, sur le site du chef-lieu d’un peuple gaulois, les Trévires. Le pont romain en pierre qui franchit la Moselle est édifié en 45 ap. jc, en remplacement d’un premier pont de bois : c’est le plus ancien pont d’Allemagne encore debout. Colonie romaine et place forte très importante dans la défense contre les « Barbares », elle est dotée d’une enceinte abritant la plus grande surface urbaine de Gaule. Grande métropole marchande à partir du 2ème siècle, devenue l’une des capitales de la Tétrarchie à la fin du 3ème siècle et siège d’un atelier monétaire impérial à partir de 294, Trèves est alors qualifiée de « seconde Rome » ou Roma Secunda. De l’époque romaine subsistent la Porta Nigra (porte noire), le plus grand édifice romain sur le sol allemand, une basilique, où siège un tétrarque (aujourd’hui une église protestante), les restes d’un amphithéâtre, ainsi que des ruines de thermes romains. Au début du 5ème siècle, au cours des invasions germaniques, Trèves est attaquée et pillée plusieurs fois par les Francs. Peu auparavant, la préfecture des Gaules est transférée de Trèves à Arles

[6] Nom d’une branche de la famille des Théophylactes, dont plusieurs personnalités de l’aristocratie romaine qui au xe siècle s’opposèrent au gouvernement impérial.

[7] Le synode de Sutri (aussi appelé concile de Sutri) fut convoqué par le pape Grégoire VI à la demande de l’empereur germanique Henri III, qui voulait mettre un terme à l’anarchie papale. Le synode se déroula du 20 au 23 décembre 1046, à Sutri, à la frontière du duché de Rome, puis se conclut à Rome les 24 et 25 décembre.

[8] Palestrina