Né dans la ville de Ray [1], et a effectué une grande partie de ses recherches dans celle-ci.
Il aurait d’abord été un musicien, probablement joueur de luth d’une grande virtuosité avant de se tourner vers l’alchimie, la philosophie, les mathématiques et l’astronomie. Il semblerait qu’il se soit aussi intéressé à l’orfèvrerie.
Vers l’âge de 30 ans, il débute une formation de médecin à Ray. Lettré, il est persan mais lit et écrit en arabe, il étudie les textes des Anciens grecs, hindous, éventuellement traduits en syriaque puis en arabe. Les écrits de Ali ibn Rabban al-Tabari auront notamment une grande influence sur lui. Il poursuit sa formation en voyageant en Syrie, en Égypte, en Espagne complétant ses connaissances livresques de pratique clinique et expérimentale.
De retour en Orient, il est d’abord nommé médecin de la cour du prince samanide Abu Salih al-Mansur, régnant sur le royaume du Khorassan [2] au nord de la Perse. Sa notoriété grandissant, il est chargé de la direction de l’hôpital de Ray puis du maristan [3] Muqtadari de Bagdad sous le règne du calife abbasside Al-Muktafi .
A la mort du souverain Al-Muktafi, en 907, il retourne à Ray. De nombreux étudiants l’y suivent et il y poursuit son enseignement médical. Devenu aveugle à la fin de sa vie, il décède à Ray vers 930.
En tant que médecin chef de l’hôpital, progressiste et humaniste, il introduisit des pratiques radicalement nouvelles dans le soin des patients et la formation des médecins. Il distinguait en effet trois aspects de la médecine, la santé publique, la médecine préventive et le traitement des maladies spécifiques. Dans cette optique, il organisa des consultations externes, promut les soins à domicile et ouvrit l’hôpital et l’accès aux soins aux nécessiteux et non pas seulement aux riches. Insistant sur le rôle de la médecine préventive, il se fit l’auteur du tout premier traité médical à l’usage des non médecins.
Il a énormément contribué dans les domaines de la médecine, l’alchimie et la philosophie. Alchimiste devenu médecin, il aurait isolé l’acide sulfurique et l’éthanol dont il initia l’utilisation médicale. S’agissant de la pratique médicale, il a vigoureusement défendu la démarche scientifique dans le diagnostic et la thérapeutique et a largement influencé la conception de l’organisation hospitalière en lien avec la formation des futurs médecins. Empiriste et rationaliste, il fut l’objet de nombreuses critiques pour son opposition à l’aristotélisme et sa libre-pensée vis-à-vis de la religion.
Enseignant admiré et fin pédagogue, il initia la pratique des visites au chevet des malades avec ses étudiants et leur soumettait les questions, d’abord aux plus novices puis aux plus expérimentés avant de donner sa propre réponse. Il insistait sur la nécessité d’une formation continue au cours de la vie du médecin et les encourageait à prendre des notes sur leurs observations et à en discuter entre eux.
Il joua un rôle fondamental dans le développement de la méthode clinique, attachant une grande importance aux signes cliniques mais aussi à la symptomatologie qui devait constituer la base d’un raisonnement menant au diagnostic puis à la thérapeutique. Il insistait sur l’importance d’allier le savoir théorique à la pratique clinique. Ce faisant, il se fit un critique sévère mais admiratif de l’œuvre de Galien qu’il jugeait manquer d’observations empiriques. Cela lui valut d’être lui même attaqué.
Contrairement à l’usage d’alors, il associait à la démarche de soin le malade lui-même mais aussi l’entourage du malade. Dans cette même approche globale de la maladie, il insistait aussi sur le rôle de la diététique dans le soin et la prévention des maladies.
Utilisant ses connaissances en chimie pour son activité médicale, on peut à juste titre le considérer comme un père fondateur de la thérapeutique iatrochimique [4]. Il œuvra pour la constitution de la pharmacologie comme discipline médicale à part entière et le chapitre qui est consacré dans son traité “Kitab al-Hawi” restera une référence jusqu’au 17ème siècle en Europe. Néanmoins, il alerta très tôt ses contemporains sur l’usage inconsidéré de médicaments. Il pratiquait de nombreuses spécialités médicales, chirurgie, gynécologie, obstétrique, ophtalmologie…
Il a écrit 184 livres et articles dans plusieurs domaines scientifiques, dont 61 relevant de la médecine, tous en langue arabe. Il est l’auteur d’un des tout premiers traités de psychologie et de psychiatrie. L’hôpital qu’il dirigea à Bagdad fut le premier à posséder un service pour les malades mentaux.
Il s’intéressa aussi à la neurologie, il décrivit le rôle moteur et sensitif des nerfs en identifiant 7 des nerfs crâniens et 31 des nerfs spinaux par un nombre référant à leur position anatomique depuis le nerf optique jusqu’au nerf hypoglosse. Sur le plan fonctionnel, il établit le lien entre certains signes cliniques et la localisation anatomique d’une lésion.
En tant que médecin en chef à l’hôpital de Bagdad, il a fourni une des premières descriptions connues de la petite vérole et la distingua nettement de la rougeole Écrit par Razi, “l’al-Judari wa al-Hasbah” a été le premier livre sur cette maladie, et a été traduit en plus d’une douzaine de langues.
Il découvre l’asthme allergique, et aurait été la première personne à avoir écrit un traité sur l’allergie et l’immunologie. Il aurait été le premier à comprendre que la fièvre était un mécanisme naturel de défense du corps humain. il contribua à la pratique précoce de la pharmacie grâce à des textes, mais aussi par d’autres manières.
Il décrivit de nombreuses pathologies comme la goutte, les calculs rénaux et vésicaux, la variole, la rougeole, le rhume des foins. Il a en outre classé les maladies en trois catégories : celles qui sont curables, celles qui peuvent être curables, et celles qui sont incurables.
Il s’est aussi attaqué aux charlatans et faux docteurs qui parcouraient les villes et les campagnes pour vendre leurs prétendus médicaments. En même temps, il affirmait que les docteurs, malgré leur savoir, n’avaient pas les réponses à tous les problèmes médicaux et ne pouvaient pas guérir toutes les maladies. Néanmoins, pour être plus efficaces dans leurs soins, il exhorta les praticiens à garder des connaissances à jour en étudiant continuellement des livres médicaux et à faire connaître toute nouvelle information.