L’empire que Louis le Pieux a hérité de Charlemagne se déchire dans l’apocalypse de guerres civiles qui durent depuis des années.
A la mort de l’empereur en 840, son premier fils, Lothaire revendique les dispositions prises par son père en 817 avec l’“Ordinatio imperii”. Il exige que la plus grande part de l’héritage paternel lui soit attribuée. Ce que ni Louis le Germanique ni Charles le Chauve, ses 2 frères survivants, ne peuvent admettre. Lothaire ne se prive pas de faire des largesses à leurs vassaux pour les rallier. Avant qu’il ne soit trop tard, menacés, les 2 frères rassemblent leurs troupes.
Le 25 juin 841, à Fontenoy en Puisaye [1], Lothaire, allié à Pépin II d’Aquitaine, est battu par Charles le Chauve et Louis le Germanique et se réfugie à Aix-la-Chapelle [2].
A Strasbourg, le 14 février 842, en face de leurs armées respectives, chacun des 2 rois prononce dans la langue de l’autre le même serment. Charles jure en tudesque. Louis le Germanique jure en roman : " Si salvarai eo sist meon fradre Carlo. Je secourrai ce mien frère Charles par mon aide.
Cousin de ces princes, lui-même petit-fils de Charlemagne, lettré et guerrier, Nithard recopie dans l’Histoire des fils de Louis le Pieux, qu’il rédige à la demande de Charles le Chauve, ces serments prononcés dans les deux langues que l’on dit encore vulgaires. Tous les actes officiels ont jusqu’alors toujours été écrits en latin. Pour la première fois, la langue française est utilisée dans un écrit. Si l’histoire d’un peuple est l’histoire de sa langue, c’est à Strasbourg, en 842, que commence l’histoire de la France.
Un an plus tard, le 11 août 843 à Verdun, Lothaire, Louis et Charles achèvent de démembrer l’empire.
Ce traité établis la constitution de 3 royaumes. Charles reçoit la partie occidentale de l’empire, limitée par l’Sault, la Meuse, la Saône et le Rhône, qui prend le nom de Francia occidentalis [3]. Louis obtient un État situé à l’est du Rhin et au nord des Alpes : La Francia orientalis [4]. Lothaire hérite avec le titre impérial de la Francia media, longue bande de terre s’étirant entre les deux autres royaumes, de la mer du Nord [5] à la Campanie [6], et où se trouvent les 2 capitales impériales, Aix-la-Chapelle et Rome.
Le traité de Verdun [7] n’achevait pas seulement la dislocation de l’Empire carolingien, il eut des implications primordiales dans l’histoire de l’Europe. Les 2 Francia ne se réunirent plus jamais et furent à l’origine des États de France et d’Allemagne. On s’accorde à y voir la base juridique de l’indépendance du royaume de France.
Puis les traités de Mersen [8] en 870 et 880 achèvent de mettre en place le partage de l’empire qui fut celui de Charlemagne et de Louis le Pieux. Ce sont eux qui ébauchent une Francia occidentalis qui, par des terres aux ressources les plus diverses, va, dans une continuité que n’interrompt aucun insurmontable obstacle géographique, de la Méditerranée à la mer du nord. Entre une Bretagne qui achève d’affirmer son indépendance au milieu du 9ème siècle et une Lotharingie et une Bourgogne puissantes, cette Francia occidentalis commence d’être le théâtre des rivalités implacables de princes sur les terres desquelles l’autorité royale n’a pas le moindre pouvoir.
A ces menaces s’ajoutent encore les dangers que représentent les invasions de Sarrasins [9] à partir de 838 et les expéditions des Normands qui par des incursions éclairs sur les côtes sont passés à une invasion généralisée en 843. Venus de Scandinavie, ces Normands (hommes du Nord) ou Vikings (rois de la mer) pénètrent loin dans les terres en circulant sur les fleuves. Pillent des monastères, mettent à sac des villes durant tout le 9ème siècle.
Ceux-ci après avoir ravagé le nord du royaume de 879 à 885 se concentre sur la basse Seine. De Rouen, elle remonte par la Seine et met le siège devant Paris. 700 drakkars, 20 000 guerriers s’installent face aux murailles de la ville. Le siège dure 1 an. Grâce à l’énergique défense menée par Eudes, les Parisiens résistent aux attaques répétées. Finalement, en octobre 886, les Normands consentent à faire retraite, moyennant un tribut de 700 livres d’argent.