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L’histoire pour le plaisir

Samuel Pepys

jeudi 13 décembre 2012, par lucien jallamion

Samuel Pepys (1633-1703)

Haut fonctionnaire de l’Amirauté anglaise-membre du Parlement et écrivain

Samuel Pepys Haut fonctionnaire de l'Amirauté anglaise-membre du Parlement et écrivain

Fils de John Pepys, tailleur qui avait émigré à Londres de Huntingdonshire et avait épousé la soeur d’un boucher de Whitechapel, Margaret Kite, blanchisseuse. Il naît à Londres à quelques pas de Fleet Street, dans la Cité. Il fréquente d’abord l’école libre de Huntingdon, dans le Cambridgeshire, d’où est originaire une partie de sa famille, et où Edward Montagu, le cousin germain de son père et l’un des jeunes lieutenants d’Oliver Cromwell, possède une propriété à Hinchingbrooke. Entre 1646 à 1650, il revient à Londres où il fréquente l’école St Paul. Il fait probablement l’école buissonnière le 30 janvier 1649 pour assister, alors qu’il n’a pas 16 ans, à l’exécution de Charles 1er. L’enfance et l’adolescence de Pepys se déroulent sur fond de guerre civile, de puritanisme, et de l’instauration du Commonwealth par Oliver Cromwell.

Au printemps 1650, et avec l’appui de George Downing, il bénéficie d’une allocation de fin d’études pour aller à Cambridge. Après des hésitations quant au choix du collège, il opte finalement, en octobre 1650, pour Magdalene College où il s’inscrit comme boursier. Il obtient son baccalauréat de lettres en 1654. Vers la fin de cette même année ou début 1655, il entre dans le même temps au service de George Downing, alors en charge de l’Échiquier, et d’Edward Montagu, devenu conseiller d’État, qui, ayant remarqué ses capacités, l’utilise comme homme de confiance. Le 1er décembre 1655 et à l’insu de son cousin et patron, il épouse Elizabeth de Saint-michel, issue d’un mariage franco-anglais. Les jeunes mariés logent tout d’abord dans les 2 pièces d’une tourelle du palais de Whitehall, dans les dépendances des appartements de son cousin. Pepys emménage ensuite sur Axe Yard, une place maintenant disparue située à l’endroit de l’actuelle Downing Street, où il loue la moitié d’une maison. Il est ainsi à mi-chemin de son lieu de travail officiel, l’Échiquier, près du palais de Westminster, où il est clerc, et des appartements privés de Montagu.

Lorsque celui-ci part en Baltique pour participer à un blocus contre la Suède ou dans le détroit de Gibraltar pour reconnaître les possibilités d’y établir une base navale, Pepys est chargé de le tenir au courant par lettres de tout ce qui se passe à Londres, ce qui a peut-être fait naître son goût pour le journalisme.

Après la mort d’Oliver Cromwell le 3 septembre 1658, le Commonwealth se désagrège sous les bottes de généraux rivaux, notamment Monck, Lawson et Lambert. Les temps sont troubles et on commence à parler d’une restauration du roi Charles II qui se trouve en exil en Hollande. Le 1er janvier 1660, Pepys commence son Journal pour y noter les événements d’une année qui s’annonce exceptionnelle. Il va le tenir chaque jour, à de rares exceptions près, jusqu’en mai 1669.

En mars 1660, Pepys accompagne son cousin en Hollande, avec le feu vert de Monck pour en ramener le roi. Edward Montagu est bientôt créé comte de Sandwich et investi de plusieurs autres charges, notamment celle de vice-amiral. C’est en cette qualité que son cousin propose au roi la nomination de Pepys comme clerc des Actes au conseil de la Marine. La charge ne l’intéresse que moyennement au début, à tel point qu’il envisage de la revendre. C’est Sandwich qui lui fait comprendre que ce n’est pas tant le salaire qui est intéressant, mais les nombreuses occasions de se faire de l’argent à la faveur de pots-de-vin. Peu de temps après sa nomination, il emménage dans les bâtiments mêmes du Bureau naval, situés sur Seething Lane, au nord-ouest de la Tour de Londres.

Il apprend rapidement le métier de l’administration navale et devient un membre influent de l’institution en disputant ses prérogatives aux autres officiers du conseil de la Marine, qui sont tous d’anciens capitaines que Charles II a faits chevaliers. À la différence de ses collègues, il essaie constamment de comprendre les techniques des différents corps de métiers, visite des navires en construction, apprend ses tables de multiplication et le vocabulaire de la Marine, s’initie à l’astronomie et à la Science en général. C’est pour ces raisons, et malgré un enrichissement personnel manifeste tout au long de sa carrière, que Pepys est aujourd’hui considéré dans le monde anglo-saxon comme le type même du parfait fonctionnaire.

En 1665, la déclaration de guerre aux Provinces-Unies l’inquiète car il sait que la marine anglaise est sous-équipée et mal avitaillée. Il profite néanmoins de cette seconde guerre anglo-hollandaise pour se faire nommer à un poste qu’il a inventé de toutes pièces, celui d’avitailleur général, qui lui permet d’arrondir ses fins de mois en percevant un double salaire. En juin 1665, Sandwich lui cède une partie de la cargaison de deux vaisseaux hollandais dont il s’est emparé à la bataille de Vågen, devant Bergen. Pepys la revend bien vite en faisant un joli bénéfice, car ces marchandises prises illicitement sur un butin royal lui brûlent les doigts. Son cousin va bientôt payer les conséquences de cet acte en étant tenu éloigné de la Cour de 1665 à 1668.

La guerre, à peu près équilibrée en 1665, tourne à l’avantage pour les Provinces-Unies en juin 1666 avec la Bataille des Quatre Jours, et au fiasco avec le raid hollandais sur la Medway : du 9 au 14 juin 1667, les Hollandais brûlent les vaisseaux anglais qui y sont mouillés, et s’emparent du Royal Charles, le vaisseau amiral. Craignant de voir l’ennemi parvenir à Londres, Pepys dépêche Elizabeth et l’un de ses commis cacher ses pièces d’or dans le jardin de la maison où s’est retiré son père, à Brampton, près de Huntingdon.

Les mois qui suivent ce désastre sont dramatiques pour le Bureau naval et les officiers du conseil de la Marine, car une commission d’enquête parlementaire épluche les comptes, et Pepys est souvent mis à contribution pour justifier l’utilisation des fonds publics. En 1668, il fait un discours fleuve devant le Parlement pour défendre les actions du conseil de la Marine, se faisant remarquer de la Chambre et du roi par sa clarté et sa conviction.

Durant l’épidémie de peste qui ravage Londres et l’Angleterre de 1665 à 1666, Pepys est l’un des derniers officiers du conseil de la Marine à quitter la Cité pour se réfugier à Greenwich où s’était replié le Bureau naval. Ces années de peste dopent Pepys qui redouble d’activité et essaie de profiter de la vie au maximum, d’autant qu’il a fait prendre pension à Elizabeth et ses domestiques à Woolwich et qu’il se trouve célibataire.

Des ennuis de santé aux yeux (probablement de l’hypermétropie doublée d’astigmatisme, difficile à corriger à l’époque) l’obligent bientôt à dicter ses notes. En mai 1669, il abandonne la rédaction de son Journal. Il effectue alors un voyage d’agrément en France et aux Provinces-Unies, mais au retour, en octobre, sa femme tombe malade et meurt au bout de quelques semaines. Il lui érigera un monument dans l’église St Olave Hart Street, l’une des rares à avoir échappé à l’incendie de 1666.

En janvier 1670 débute à Brooke House une série d’audiences auxquelles il se trouve convoqué par une commission parlementaire chargée d’examiner les dysfonctionnements du Bureau naval pendant la Deuxième guerre anglo-hollandaise. Il sauve sa peau de justesse grâce à son impressionnante argumentation.

En juin 1673, il devient secrétaire du conseil de l’Amirauté. Il déménage alors pour s’installer avec ses domestiques à Derby House, un bâtiment situé non loin de Whitehall et qui abrite l’Amirauté. Son protecteur, le duc d’York, le futur Jacques II, qui s’est converti au catholicisme, est contraint, dans le courant de l’année, à renoncer à sa charge de grand amiral en vertu du Test Act. Avec le soutien de Jacques qui reste malgré tout influent, Pepys parvient à se faire élire au Parlement en janvier 1674 comme député de Castle Rising, dans le Norfolk. À la Chambre des communes, il se montre un porte-parole efficace de la Marine, mais il est aussi la cible d’ Anthony Ashley-Cooper , qui vient d’être créé comte de Shaftesbury par Charles II.

Avec ses partisans qui vont former l’embryon du parti whig, Shaftesbury tente en effet de le faire passer pour un papiste, pensant ainsi enfoncer encore davantage le duc d’York et l’empêcher d’accéder au trône. Il parvient à se justifier, sauvé in extremis par la décision du roi qui suspend les séances du Parlement pour plusieurs mois. Par ailleurs, les hommages commencent à pleuvoir. Il devient ainsi en 1675 directeur du Christ’s Hospital et de la prison de Bridewell. L’année suivante, il est élu maître de la Trinity House, organisation qui s’occupe de l’entretien des phares et des chenaux sur les côtes britanniques, mais aussi d’œuvres caritatives pour les marins.

Le bruit d’un complot catholique visant à assassiner le roi commence à se répandre durant l’été 1678. Lorsque Pepys est réélu au Parlement en tant que député de Harwich au début de l’année 1679, il ne fait pas partie des partisans de Shaftesbury qui sont majoritaires dans la nouvelle Chambre. Les coups commencent à pleuvoir autour de lui, avec les arrestations de l’ancien confesseur d’Elizabeth et de Samuel Atkins, l’un de ses commis, accusé de complicité dans l’assassinat d’un magistrat. Le duc d’York est contraint à l’exil et se réfugie à Bruxelles.

Désormais sans protection, Pepys est alors attaqué par ses ennemis politiques. On l’accuse de papisme et d’un “complot à la mer”ourdi avec Anthony Deane, comme lui député de Harwich, pour livrer à la France des renseignements sur la flotte anglaise. Brièvement emprisonné à la Tour de Londres de mai à juin 1679, il parvient à faire enquêter en France son beau-frère Balthasard de Saint-michel qui démontre qu’il s’agit là de fausses accusations. Les charges contre lui ne sont néanmoins abandonnées qu’en juin de l’année suivante.

Pepys subit alors une traversée du désert, malgré quelques invitations à la Cour ou un voyage en bateau le long des côtes d’Écosse en compagnie du duc d’York. Après la mort de son père en 1680, il s’occupe comme il peut en faisant faire des travaux dans sa maison de Brampton, dans le Huntingdonshire. L’année suivante, le roi dissout le Parlement, privant ainsi Shaftesbury de sa base. En 1683, sur ordre du roi, Pepys accompagne lord Dartmouth à Tanger, pour mettre en place l’évacuation de la colonie qui coûte les yeux de la tête à l’Angleterre. Il profite de la proximité de l’Espagne pour y faire un peu de tourisme durant l’hiver 1684.

De retour à Londres en mars 1684, Charles II le nomme secrétaire du roi pour les affaires de l’Amirauté, poste qui correspond pratiquement à celui de ministre de la Marine. Il tente à nouveau de mettre un peu d’ordre dans les affaires navales et recommande au roi un certain nombre de réformes. Celui-ci meurt malheureusement en février 1685 avant même d’avoir pu lire le mémorandum en question. Pepys conserve sa charge lorsque Jacques II monte sur le trône. Très exigeant envers Pepys, le convoquant ainsi à la Cour plusieurs fois par semaines, il signe cependant sans discuter les réformes navales qui lui sont proposées. Il fut président de la société royale de 1684 à 1686.

Cependant, le roi accumule des bourdes politico-religieuses. La naissance d’un fils qui pourrait lui succéder sur le trône en temps que souverain catholique décide l’opposition à faire appel à Guillaume d’Orange, à la fois le neveu et le gendre de Jacques II, qui est originaire des Provinces-Unies. Celui-ci débarque sans encombre à Torbay, dans le Devon, malgré les efforts de Pepys pour faire intercepter son escadre. Jacques II est contraint à s’exiler en France où le reçoit son cousin Louis XIV. Jusqu’à l’entrée à Londres du futur Guillaume III à la fin de l’année 1688, Pepys reste fidèle au roi qui est abandonné de tous.

Fidèle supporter du roi, il est battu aux élections du 1er janvier 1689 après la fuite de celui-ci et doit par la suite démissionner de son poste de secrétaire de l’Amirauté. Il subit alors deux incarcérations, en mai-juin 1689 et en juin 1690, car il est soupçonné de jacobitisme. Il est finalement relaxé faute de preuves suffisantes et il se retire de la vie publique. En 1701, il quitte Londres et se fait héberger par l’un de ses premiers commis, William Hewer, qui dispose à Clapham d’une propriété où il meurt le 26 mai 1703.

De nos jours, il est connu principalement pour son extraordinaire Journal qui couvre la période 1660/1669, rédigé presque intégralement en utilisant une sorte de sténographie. il y relate notamment les grands événements dont il a été le témoin au cours des années 1660, comme l’épidémie de peste de Londres, la 2ème guerre anglo-hollandaise de 1665 à 1667 et le grand incendie de Londres en 1666. Il y décrit aussi très méticuleusement ses sorties au théâtre, la mode, la nourriture, et les boissons de l’époque, ce qui fournit une documentation de première main sur la société anglaise des années 1660 et constitue un formidable outil pour les historiens.