Abu Hanifa naquit à Koufa [1] pendant le règne de Abdul Malik ibn Marwân qui avait pour gouverneur d’Irak Al-Hajjaj ibn Yusuf.
Élevé dans la religion musulmane, parlant perse et arabe, le jeune Abou Hanîfa était destiné à suivre les traces de son père, commerçant à Koufa, d’origine Afghane [2]. C’est ainsi qu’avant sa 20ème année, il fonda et fit prospérer un atelier de tissage de la soie.
Sa rencontre avec le célèbre imam al-Sha’bi qui vit en lui des signes d’intelligence, le poussa à étudier auprès de savants de la religion.
Il s’initia d’abord à la philosophie et au kalâm [3] avant de les délaisser au profit de la littérature, la généalogie, l’histoire de l’Arabie, et surtout à la science du fiqh [4] et du hadith [5].
Il eut l’occasion de rencontrer d’autres tabi’îne [6] et savants tels que Dja’far al-Sâdiq ou l’Imam Malik au cours de ses nombreux voyages qui avaient pour but de parfaire sa connaissance.
Il est ainsi établi qu’Abu Hanifa obtint sa connaissance principalement de son maître Hammad ibn Abi Sulayman , qui succéda à Ibrahim an-Nakha’i , qui succéda à son oncle Alqamah ibn Qays an-Nakha’i , qui succéda à Abdullah ibn Mas’ud , envoyé à Koufa par le 2ème calife de l’islam Omar ibn al-Khattab.
Il étudia pendant 18 ans sous la direction de Hammad, et bien qu’il devînt compétent pour enseigner, il resta son humble étudiant jusqu’à sa mort en 742 où Abou Hanifa reprit le flambeau à l’âge de 40 ans. Il tenait d’ailleurs ses cours au même endroit que ses prédécesseurs depuis Abdullah ibn Mas’oud.
Il avait une méthode d’enseignement originale qui était basée sur la choura [7]. Confronté à une question juridique, il ne donnait pas la réponse directement mais exposait la question à ses disciples pour que chacun propose une solution argumentée. Puis, il commentait les propos de ceux-ci, en rectifiant ce qui méritait de l’être, et enfin, au terme de la discussion, il montrait les différents aspects du problème et donnait alors seulement les éléments de réponse qui étaient alors enregistrés. Cette approche interactive est la caractéristique de l’école hanafite [8].
Abou Hanîfa aidait parfois financièrement ses élèves, parmi lesquels son fidèle disciple et continuateur Abou Yûsûf.
En 763, Al-Mansur, le 2ème monarque abbasside [9], lui offrit le poste de Qadi Al-Qadat [10], il déclina son offre et son élève Abou Yûsûf y fut placé. Un peu auparavant Ibn Houbeïrah, gouverneur de Koufa lui proposa aussi le poste de cadi, qu’Abou Hanifah refusa également.
Outré par sa réponse, le monarque le fit arrêter, emprisonner et torturer. Même en prison, l’indomptable juriste continua d’enseigner ceux qui étaient autorisés à le voir.
C’est ainsi qu’Abou Hanîfa mourut le 14 juin 767 en prison. Il est dit que tant de personnes participèrent à janazah [11] qu’on dut la répéter 6 fois avant de l’enterrer.
Plus tard, la mosquée Abou Hanîfa fut construite en son honneur dans le quartier Adhamiyah de Bagdad [12].