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La Préfecture de Police à Paris

dimanche 6 août 2017, par lucien jallamion

La Préfecture de Police à Paris

Au 18ème siècle, le lieutenant Général, ministre sans le titre, avait acquis une autorité à la mesure de l’étendue de ses fonctions. En hommes éminents et respectés, les 2 d’Argenson, père et fils, de Sartine, Lenoir surent conforter le pouvoir de la lieutenance Générale de Police. Ils défendirent avec acharnement leurs prérogatives contre les anciens pouvoir, la Cour, lieu de toutes les jalousies, le Parlement, habitué jusque-là à prendre des arrêts de règlement en matière de police, le gouverneur de Paris, les titulaires, laïcs ou ecclésiastiques, de fief enclavés dans la ville, le Prévôt des Marchands et la municipalité parisienne, le lieutenant civil, qui conservait la préséance, ou contre une opinion publique éclairée et parfois déjà contestataire.

Les successeurs de La Reynie multiplièrent les domaines d’intervention de la lieutenance générale qui s’étendit de 5 à 9 services entre 1709 et 1753. Toute une armée de commis traitait alors les questions les plus diverses, archivait les dossiers, classait les registres et alimentait les fichiers centralisés, sous l’œil avisé de chefs de bureaux. A l’heure de l’absolutisme monarchique, les lieutenants généraux de police se devaient d’adapter leurs actions à des besoins nouveaux.

René Herault, lieutenant Général de 1725 à 1739 interdit le stationnement en double file, ordonna l’immatriculation des carrosses et voitures publiques, imposa un âge minimum de 18 ans à leur conducteurs et organisa le dépôt des objets oubliés par les usagers. En 1732 il prescrivit la fermeture du cimetière de l’église Saint Médard, où une secte d’illuminés en quête de miracles se réunissait sur la tombe du diacre Pâris.

Antoine de Sartine devint lieutenant Général de police en 1759. Ancien Lieutenant Criminel au Châtelet, ce protégé de Choiseul, proche de Necker, exerça ses fonctions jusqu’en 1774. Ses services, le Bureau de la sûreté, créé par son prédécesseurs Berryer de Ranoville en 1750, doublé du fameux Cabinet noir étaient alors les mieux renseignés d’Europe et assuraient une discrète mais efficace police politique.

Il veilla attentivement à la sécurité des habitants et modernisa l’éclairage de la capitale en faisant installer des réverbères à huile. Il réglementa strictement les activités polluantes et n’hésitait pas à consulter l’Académie des Sciences avant d’autoriser l’installation de certaines manufactures qui auraient pu incommoder le voisinage. Il forma des brigades de balayeurs chargés de nettoyer les places, quais et rue de Paris 3 fois par jour. On lui doit la construction de la halle au blé, l’organisation du service des gardes-pompes, ancêtre des Sapeurs Pompiers, ainsi que la fondation d’une école gratuite de dessin pour les ouvriers des métiers d’art, qui compta jusqu’à 1500 élèves. En reconnaissance de sa bonne administration, il fut nommé Conseiller d’Etat en 1767 et devint Ministre de la Marine en 1774.

En 1770, Sartine rédigea un mémoire qui établit une distinction entre la police judiciaire et la police d’inspection, distinction qui sera reprise en 1795 entre la police administrative et le police judiciaire. La première reçut pour mission l’exécution des ordonnances, l’application des peines, l’observation des formes prescrites par la procédure et les jugements, tandis que la seconde, tournée vers l’administration du bien public, consistait à maintenir le bon ordre et à pourvoir aux besoins des citoyens.

Tout au long du 18ème siècle, ces 2 fonctions seront assurées conjointement par les commissaires au Châtelet. Ceux-ci exerçaient leur mission au plus près de la population. Afin que les parisiens puissent les rencontrer de jour et de nuit, ces magistrats étaient mêmes obligés de nantir leur domicile d’une lanterne rouge. Certains d’entre eux étaient responsables de départements spécialisés, commerce des vivres, jeux, Bourse, Opéra…..

Au 18ème siècle, les forces de l’ordre et de surveillance de Paris furent organisées militairement. Les effectifs de la Compagnie du Guet furent augmentés, tout comme le nombre de ses rondes. En 1771, la ville reçut de Louis XV une garde comprenant une compagnie de cavalerie de 111 maîtres ainsi qu’une compagnie d’infanterie de 876 hommes. A la fin du siècle, le service de la garde de Paris réunis cette garde et la Compagnie du Guet. Il accompagnait les magistrats dans les cérémonies et assurait la garde des portes et des remparts de la ville. La milice ne joua, quant à elle, plus qu’un rôle d’apparat, tout au long du 18ème siècle.

Dans les années 1770, le commissaire Lemaire introduisit le numérotage des maisons dans les rues déjà pourvues de plaques indicatrices par ses prédécesseurs, créa le premier mont de piété afin d’aider les indigents, et, pour améliorer la salubrité de la Capitale, détruisit plusieurs cimetières intra-muros, dont celui des Innocents, tout près des Halles celui-ci fonctionnant depuis Philippe le Bel.

Le dernier lieutenant Général de Police fut Thiroux de Crosne. Après avoir révisé le jugement condamnant Calas, il entrepris de convaincre le roi qu’il serait bon de soumettre à un conseil toutes les lettres de cachet pour étude et discussion avant exécution. Louis XVI accepta, mais les événements se précipitant le projet fut bientôt sans objet à la déchéance du Roi.

Le lendemain de la prise de la Bastille,Thioux de Crosne remit son mandat au prévôt des Marchands, Jean Sylvain Bailly.

Le 15 juillet, l’Assemblée des représentants de la commune installa rue Neuve des Capucines, dans l’hôtel du lieutenant général, un Comité de Police de paris, composé des 21 membres du bureau de Ville dont le maire Bailly. Il administra la police parisienne jusqu’au 16 novembre 1789. Elue par l’Assemblée, la commune Provisoire, son Conseil et son Bureau de Ville prirent place en octobre, sous la présidence de Bailly. Celui-ci tenait ainsi dans ses mains les pouvoirs de maire et les compétences de police.

Devant l’effervescence qui régnait dans Paris, des volontaires, bientôt rejoints par les anciens gardes et sergents de la prévôté, avaient formé une garde bourgeoise que La Fayette, élu commandant, baptisa Garde Nationale. Ses 1200 hommes adoptèrent la cocarde rouge et bleue, avant de l’échanger contre celle aux trois couleurs, et un drapeau portant l’inscription « le peuple français, la liberté ou la mort ». Les premiers uniformes apparurent au mois d’août et, le 27 septembre, eu lieu en grande pompe, à notre Dame, la bénédiction des drapeaux offerts par les communautés religieuses et les patriotes. Cette unité, chargée d’assurer l’ordre, fut légalement constituée par la loi des 6 et 12 décembre 1790 qui reconnut son existence et par celle du 14 octobre 1791 qui régla son organisation.

En novembre 1789 un département de la police succéda au comité formé en juillet. Dans les faits se sont 60 comités de district de paris qui exerce la police ordinaire, organisation des patrouilles, police de la rue, arrestation en flagrant délit, rédaction des procès-verbaux furent confiées aux citoyens. Placé au-dessus des districts, et rattaché au Conseil de la Ville, le lieutenant du Maire chargé de la police, l’avocat Duport-Dutertre, contrôlait, quant à lui, les prisons municipales et pouvait infliger de menues peines aux délinquants. On chargea par ailleurs un comité des recherches de rassembler les preuves de délits.

Jusqu’au 27 juillet 1794, l’administration parisienne releva du Maire, du Conseil municipal, du bureau de Ville composé de 16 administrateurs et de 5 départements, dont 1 pour la police. La loi du 27 juin 1790 portant organisation de la municipalité de Paris avait divisé la ville en 48 sections remplacent les anciens quartiers. Dans chacune des sections, un commissaire de police, élu pour 2 ans par les habitants, salarié par la municipalité et assisté d’un secrétaire greffier, représentait le lieutenant du Maire chargé de la police. Les commissaires conservèrent les attributions de leurs prédécesseurs de l’ancien Régime. Ils recevaient les individus arrêtés en flagrant délit pour les interroger et les renvoyer, le cas échéant, dans une maison d’arrêt. Mais le soin de procéder aux enquêtes, inventaires et scellés leur fut enlevé et remis aux juges de Paix nouvellement créés et également élus. Astreints au port d’un strict habit civil noir remplaçant la robe, les commissaires portaient sur l’épaule gauche un chaperon tricolore, ancêtre de l’écharpe actuelle. Sous leur autorité, furent placés des officiers de paix, des inspecteurs de police et des observateurs.

Nommés par les cadres municipaux pour 4 ans, les 24 officiers de paix furent chargés de veiller à la paix publique, de se rendre dans les endroits où elle était troublée, d’arrêter les délinquants et de les conduire devant leur chef ou le juge de paix. Ils étaient armés d’un simple bâton blanc à fleur de lys bleues et rouges, sur lequel était gravé force à la loi et qui portait sur la pomme un œil, symbole de la surveillance. Dotés d’une large autonomie, ils avaient la capacité de choisir et de révoquer leur personnel, comme de fixer le montant de leur rémunération. Par ailleurs des officiers de paix spécialisés furent chargés d’une mission particulière telle que la recherche des auteurs de vols, assassinats et autres délits, ou bien la surveillance des filles de joie, la recherche des émigrés ou des prêtre réfractaires, tandis que des observateurs exerçaient une mission de renseignement.

Après le soulèvement du 10 Août 1792, la Commune s’empara du pouvoir à Paris, remplaçant la Commune dite Constitutionnelle. Organe de fait, elle procéda au désarmement des suspects, à des perquisitions et des arrestations. Le 2 septembre 1792, irrité par des rumeurs de complots, la foule des Parisiens se rua dans les prisons et durant 4 jours plus de 1200 suspects furent massacrés.

Durant toute cette période, une nouvelle idée de la police avait émergé. La police parisienne, prise en charge par les citoyens eux-mêmes, se trouva placée sous l’autorité du pouvoir municipal et sous le sceau de l’élection. Cette évolution s’inscrivait dans un renouvellement complet des institutions. Toutes les unités chargées du maintien de l’ordre, milice, compagnie, guet, garde furent supprimées et leurs effectifs intégrés dans la Garde Nationale. Les années révolutionnaires connurent une désorganisation profonde des services de police. Les nouvelles instances locales furent cependant rapidement décrédibiliser, tandis que se créaient un peu partout des organes de police illégaux et incontrôlés.

Il fallut attendre la fin de la terreur le 9 Thermidor* (27 Juillet 1794) pour que la convention intervînt directement dans l’administration de la police de la ville. La loi du 7 Fructidor*(24 Août 1794) supprima la mairie de Paris et établit 12 comités révolutionnaires indépendants les uns des autres et chargés de décerner des mandats d’amener et d’arrêt. Pour suivre les affaires de police et coordonner l’action de ces 12 instances, un organisme central semblait nécessaire. Dès le 14 Fructidor an II* (31 août 1794), ce fut le rôle dévolu à une commission spéciale provisoire pour la police municipale, placé sous la double surveillance du département de la Seine et d’un agent national. Puis on confia cette responsabilité à une commission administrative, finalement remplacée, en décembre 1795, par un Bureau Central du Canton de Paris. Composé de 3 membres, élus pour 3 ans par les 5 administrateurs du département de la Seine et confirmés par le Directoire exécutif, le bureau Central devint responsable de la police et des subsistances jusqu’en février 1800. Il lançait les mandats d’amener, interrogeait les prévenus, procédait aux premières instructions, surveillait les esprits. Pour ce faire il disposait d’une administration centrale hiérarchisée et de 48 commissaires de police, désormais nommés, de 24 officiers de paix, d’inspecteurs de police et de gardes nationaux.

Face au désordre et au brigandage croissant et dans un souci d’efficacité, le Directoire confirma cet effort de centralisation en instituant un Ministère de la Police Générale par la loi du 12 Nivôse an IV*(2 Janvier 1796). Installé quai Voltaire. Responsable de la juste application des lois et du bon emploi des forces de l’ordre par les autorités locales. Il dirigeait aussi le Bureau Central de Paris. Le Directoire vit un défilé incessant de ministre de la Police. 9 de janvier 1796 à juillet 1799. Mais aucun ne parvint à rétablir la sécurité ou à prévenir les insurrections et tentatives de coup d’Etat, malgré le réseau d’espionnage dont tous s’entourèrent. Dernier en date de ces ministres, Joseph Fouché. Une fois installé, le duc d’Otrante prêta la main au coup d’Etat du 18 Brumaire*(9-10 novembre 1799) qui porta Napoléon Bonaparte au pouvoir.

Les 3 Consuls Sieyès, Roger Ducos et Bonaparte constituèrent alors sans délai la nouvelle administration. Le 20 novembre, un arrêté de la Commission Consulaire renouvela intégralement le Bureau Central. Les 3 derniers membres furent destitués et remplacés provisoirement par Dubois, Piis et Dubosc, confirmés par le Premier Consul, le 5 décembre 1799 dans leurs fonctions

P.-S.

Source : Extrait de la préfecture de Police édité en juin 2000 sous l’Egide du Ministère de l’Intérieur et des services de la préfecture de Police de Paris