Né Li Shimin il fut le deuxième empereur de la dynastie Tang [1] de Chine. Second fils de Li Yuan dit Tang Gaozu , il est considéré comme le cofondateur de la dynastie par l’appui militaire essentiel qu’il apporta à son père dans la conquête du trône avant de provoquer son abdication et de le remplacer à 27 ans en prenant le nom de Tang Taizong. Chef de guerre habile, sachant jouer de la puissance de sa famille et de la position géographique de son Shanxi [2] natal, entre Chine impériale et marges turques, Li Shimin/Tang Taizong, formé à la culture chinoise, mais marqué par le monde des cavaliers semi-barbares, réussit la conquête et l’unification de l’empire au prix de longues campagnes militaires. La Chine unifiée par son clan, il soumet les Turcs orientaux [3] en 630, les Tibétains [4] en 641, puis par une diplomatie habile, les Turcs occidentaux en 642 et, de 640 à 648, les cités royaumes des Oasis du Tarim. Il limite également les ambitions des Coréens, faisant ainsi de son Empire l’un des plus vastes qu’ait connu la Chine. Ses qualités de chef militaire et d’administrateur permettent à la Chine de connaître une période notable de prospérité et de sécurité, particulièrement durant la première partie de son règne. Cette période fut érigée en idéal de gestion politique, et Tang Taizong est présenté dans la tradition chinoise comme un empereur modèle. Li Shimin, reçoit probablement l’éducation confucéenne associée de la haute noblesse de l’époque. Sa connaissance des textes confucéens vient sûrement de cette éducation, tandis que son intérêt envers l’histoire, et sa calligraphie de qualité peuvent s’être développés plus tard, au contact des érudits de la cour Sui [5], puis Tang. Également descendant de l’élite turco-chinoise des royaumes des Wei orientaux et Zhou du nord, son adolescence est largement consacrée aux arts militaires. C’est donc principalement de l’équitation et du tir à l’arc, mais probablement aussi le maniement de nombreuses armes qui lui sont enseignées (arc, épée, hallebarde), l’acquisition d’une culture stratégique par l’étude de classiques militaires (Sunzi), ainsi que l’acquisition d’expérience de terrain. Tout comme ses frères, il accompagne très tôt (vers 12 ans) son père Li Yuan dans ses tournées d’inspections sur la frontière nord du Shanxi actuel, afin de mater les rébellions qui y éclatent, et repousser les incursions turques. Là, il se confronte très tôt à la vie de camp, habité de rudes soldats han et cavaliers turcs ralliés. Remarqué pour son dynamisme et sa vivacité, il se voit en 613 marié à la jeune Zhangsun, 12 ans, qui deviendra l’impératrice Wende. En 614, lors de la tournée de Yang des Sui dans le Shanxi, il est attaqué et assiégé par les Turcs, et l’histoire officielle affirme que le jeune Li Shimin aurait mené à 15 ans l’assaut libérateur. Dès 614, avant même l’expédition de Corée [6], une révolte éclate en Chine que Sui Yángdi doit écraser, avant de repartir avec un million de soldats et un approvisionnement en rapport. La campagne de 614 s’avère être infructueuse et très coûteuse.
Le roi Yeongyang propose la paix, mais refuse toutes les conditions de l’empereur Yángdì qui, pour l’honneur de l’Empire, demande la reconnaissance de la souveraineté chinoise et le paiement annuel d’un tribut (symbolique). Le refus est catégorique, la situation militaire bloquée, Yángdì rentre à Chang’an [7] dans un climat de révolte. En 615, pour rétablir un peu son prestige, l’Empereur fait la tournée des Limes [8] du nord, face aux Turcs Orientaux.
Son escouade est attaquée par ces mêmes Turcs qui étaient pourtant vassaux de l’Empire depuis Suí Wéndì. Le jeune Lĭ Shìmín s’illustre alors par son initiative au combat. C’est que ce jeune noble, subtilement sinisé par son père profondément confucéen et la vie de cour qu’il lui a permis d’observer, est aussi un brillant jeune lieutenant, frère d’armes des Turcs fédérés ; cela aura son importance par la suite. L’empereur se désintéresse finalement de cette désespérante situation et des seigneurs militaires autonomes émergent aux environs de 614-616. La capitale est prise par des rebelles, et la Cour doit s’enfuir.
En même temps, dans le Shanxi, le puissant administrateur confucéen et général Lĭ Yuan, père de Lĭ Shìmín, continue de surveiller sa frontière nord tout en restant fidèle à l’empereur Suí. Son fils, qui a un peu pris en âge, en expérience et en audace, l’encourage à faire sécession et à se tailler dès à présent la plus grande part possible du royaume : l’Empire s’effondre, les Suí tombent, il faut prendre position. Pour forcer la main à son père, Lĭ Shìmín lui fait livrer par un eunuque [9] de la cour dont il a fait la connaissance une concubine de Yángdì, que son père accepte ; peu de temps après, il fait remarquer à son père qu’il est de ce fait passible de mort et au ban de l’Empire. Le 20 mai 617, Lĭ Yuan réunit ses fidèles et monte une armée, préservant néanmoins son image de serviteur fidèle du pouvoir en assurant vouloir défendre la dynastie Suí contre les rebelles qui menacent à présent l’Empire. Lĭ Shìmín obtient 500 soldats d’élite et 2 000 chevaux de ses amis turcs. Sa sœur vend ses bijoux et ses biens pour lui ramener 10 000 soldats. Le soutien de son père et des loyalistes élève rapidement cette armée à 60 000 hommes. En fait, les nombreuses branches de la famille Li s’emploient à promettre des terres à des immigrés égarés par les guerres, et à sceller des alliances avec des groupes de bandits et rebelles locaux. En quelques mois, cette armée aurait ainsi atteint 200 000 hommes. Lĭ Shìmín, à la tête de l’ensemble, rassure les populations par l’ordre qu’il y maintient. Li Jing , un fonctionnaire local, tente de rejoindre l’Empereur pour le prévenir de la machination en cours. Il est dénoncé par la population, favorable à Lĭ Yuan en raison de ses qualités de gouverneur, et menacé d’exécution, mais Lĭ Shìmín, surpris par sa bravoure confucéenne, le laisse libre. Après quelques errements, notamment dans une armée Suí qui pratique le pillage, il rejoint finalement Lĭ Shìmín dont il a pu voir de ses propres yeux le comportement exemplaire vis-à-vis de la population et dont les armées, ordonnées, protègent les citoyens sous ses yeux. Li Jing, stratège hors pair, s’avèrera une aide décisive. En 617 Lĭ Shìmín et ses armées entrent dans la capitale Cháng’ān qui résiste brièvement. Lĭ Yuan nomme empereur Yang Yu, un petit-fils de Yángdì qui, démissionnaire, est considéré comme détrôné. Finalement, Yangdi est assassiné par un général rebelle, Yuwen Huachi. À Luòyáng [10], un général prétendument fidèle, Wang Shichong , instaure un autre nouvel empereur fantoche.
Lĭ Yuan et Lĭ Shìmín s’affirment alors comme protecteurs du jeune empereur Sui face aux généraux manipulateurs, confirmant leur réputation de modèles confucéens. Début 618, Lĭ Shìmín parvient à faire échouer un assaut lancé par le général rebelle Xue Chu, autoproclamé empereur, venu du Gansu [11], mais il n’est pas encore empereur. Le 20 mai 618, Lĭ Yuan se fait nommer empereur sous le nom de Táng GāoZu ; le petit empereur fantoche sera exécuté quelques mois plus tard. Il fait de Chang’an sa capitale. La Chang’an des Han devenue inhabitable, il s’agit en fait de la ville voisine de Taixingcheng récemment reconstruite sous Sui Wendi afin de satisfaire au besoin d’une dynastie moderne, et considérée comme la nouvelle Chang’an. Devenu Empereur, Tàng GàoZu inaugure l’ére Wude, la seule que connaîtra son règne. Lĭ Shìmín est fait prince de Qin alors que Li Jiancheng, son frère aîné, est nommé prince héritier. Trois mois plus tard en août 618, le général empereur Xue Chu relance une campagne pour prendre Cháng’ān, la capitale impériale. Il bat une armée Tang à plate couture, mais arrivé aux portes de la ville, il tombe malade et meurt. Son fils, brouillé avec ses généraux, opte pour le repli. En novembre, Lĭ Shìmín le poursuit et sabre par surprise son camp. Nombre de ses généraux et soldats désertent pour rejoindre les armées Tang, qui occupent donc le Gansu.
Il reste à stabiliser cet Empire en ébullition. Possédant le Gansu, le Shaanxi* et le Shanxi [12], leur région de départ, les Li contrôlent environ 25 % de la population de l’Empire. Il leur faut à tout prix marcher vers le Hebei [13] et le Henan [14] dans la grande plaine centrale, qui contiennent 50 % de la population chinoise, et peuvent eux seuls fournir les hommes et le grain nécessaires à l’effort de guerre d’un État à ambition impériale. À l’est, le général légitimiste de Luoyang, Wang Shichong, avait placé Yang Tong, ancien prince de Yue en position d’héritier légitime des Sui. Il s’allie au cruel Li Mi un autre sécessionniste qui pourtant faisait fréquemment le siège de sa ville chacun pensant y gagner. Ils doivent faire face à une menace venue du Sud, le régicide Yuwen Huachi menaçant la capitale de Li Mi Liyang [15].
Aidé d’un symbolique petit soutien de Luòyáng, Li Mi repousse le régicide Yuwen Huachi. Mais cette lutte affaiblit considérablement Li Mi et le régicide. Wang, menacé par le prestige acquis par Li Mi, décide de lui fermer les portes de sa ville puis use d’un subtil stratagème. L’un de ses lieutenants étant un sosie de Li Mi, il le fait apparaître en pleine bataille, habillé comme Li Mi, et lui fait donner des contre-ordres aux troupes de Li Mi qui, défait, doit intégrer les troupes Tang. Satisfait de cette victoire, Wang Shichung détrône son petit empereur et s’intronise empereur de la dynastie Zheng en avril 619, contrôlant virtuellement le puissant Henan, bien qu’il ne contrôle réellement que les abords de Luoyang. Les armées de Lĭ Jiancheng et Lĭ Shìmín se réunissent et pressurisent doucement le Henan, aidées en cela par la cruauté de Wang Shichung que la population fuit : c’est autant de nouveaux soldats possibles pour les Tang. Limité à Luòyáng, Wang Shichung sollicite l’alliance du rebelle Du Jiande, qui s’est proclamé empereur des Xia, et contrôle le Hebei et le Shandong [16] côtier ; il venait de faire décapiter le régicide en 619, et également de défaire une petite armée Tang à Liyang, dans le Hebei. Les Lĭ assiègent Luòyáng. Lĭ Shìmín part en reconnaissance autour de la ville fortifiée avec 800 cavaliers et se fait encercler par l’armée locale. Un officier opposé le prend en visée, mais Jingde, un ancien opposant turc qu’il a défait et rallié à sa cause le sauve, tandis que le gros de ses troupes intervient enfin.
L’information parvient que les troupes des Xia arrivent du Hebei pour profiter de la situation, et surtout, ne pas donner l’avantage aux Tang. Lĭ Shìmín prend des cavaliers d’élite turcs avec lui, fonce vers le nord durant la nuit, et taillade le camp adverse au petit jour. De retour à Luòyáng, la résistance de la ville faiblit à la vue de l’empereur Xia prisonnier. Quelques jours plus tard, Luòyáng se rend : les deux villes impériales sont désormais en la possession des Tang ; le Henan et le Hebei passent dans leur sphère d’influence, ainsi que le Shandong. Les Tang se retrouvent donc maîtres du nord, et de surcroît avec une réputation favorable de bons gouvernants. Le cadet de famille qu’est Li Shimin rentre à Cháng’ān comme un César à Rome : couvert d’une armure d’or, le carquois garnis de flèches, l’arc sur le dos, l’épée à la main sur son cheval favori. Les chefs faits prisonniers marchent soumis à ses côtés. L’avantage militaire est ainsi clairement passé aux Tang. Les deux armées principales du Nord sont soumises, leur territoire est relativement stable du fait de leur réputation, et ils sont désormais en possession du cœur humain et productif de la Chine. Ils sont les seuls à pouvoir prétendre à une ambition impériale. Des rebelles continuent à agiter certaines régions chinoises, comme Xiao Xian, héritier des Liang occidentaux absorbés par les Sui et alliés de la famille impériale de cette dynastie. Mais il est défait fin 621 : le Hubei, le Hunan, le Jiangxi [17] et le Guangdong [18] passent aux Tang. En 624, le Khan [19] des Turcs Orientaux s’annonce aux portes de la ville impériale de Cháng’ān. L’Empereur et la Cour veulent évacuer la ville. Utilisant sa réputation et sa connaissance des barbares, Lĭ Shìmín et une petite troupe foncent vers eux. Lĭ Shìmín les harangue, rappelle à certains chefs qu’ils ont combattu ensemble, et défie carrément leur chef en duel. Les Turcs se concertent puis se replient. Lĭ Shìmín donne alors l’ordre de préparer armes et chevaux. La nuit, ils rejoignent le camp turc et le sabrent. Le Khan supplie pour obtenir la paix et se retire honteusement en Mongolie extérieure [20]. Les Guerres de Pacification quasiment terminées, l’ambiance de la cour se voit de plus en plus menacée par la concurrence entre les héritiers, ’Li Jiancheng et Li Yuanji d’un côté contre Lĭ Shìmín de l’autre. Li Jiancheng fils aîné de Li Yuan, devenu prince héritier avec l’établissement des Tang en 618, est un général brillant, deux discours existent sur sa personne. L’histoire officielle plus tardive décrit ce prince comme passionné de grandes chasses, fourbe et sadique sur le champ de bataille, rude, sauvage, et un gros buveur à la Cour, mais ces sources sont reconnues depuis longtemps comme au moins partiellement biaisées. Un autre discours le montre comme un général tout aussi brillant que Li Shimin, dont les accomplissements positifs semblent avoir été minorés par l’histoire officielle. Longtemps chargé de la difficile mission de contenir les terribles Turcs, sur le front nord, Li Jiancheng n’a pas pu obtenir de victoires triomphales. Taizong prend ensuite en main la stabilisation des royaumes extérieurs, en lançant d’abord ses armées à l’assaut du khanat des Turcs orientaux. Informés par le denier rebelle, Liang Shidu [21], les Turcs souhaitent profiter des tensions internes à la suite du coup de la porte Xuanwu pour rançonner les Tang, et progresser au mieux dans la région. Xieli Kakhan et son neveu Tuli Kakhan combinent leurs troupes et guident une armée de 100 000 Turcs dans la région du Sha’anxi, tandis que le commandant chinois de Jingzhou, probablement défavorable à Taizong, laisse ces troupes étrangères descendre rapidement vers Chang’an. Si l’on en croit les sources officielles, alors que la cour Tang tremble, le courageux empereur fonce vers l’armée turque, isole subtilement le Khagan [22] du gros de ses troupes dans les environs de la rivière Wei, et impose des conditions favorables de retrait turc, traité juré devant les dieux. Mais certains passages laissent plutôt entendre qu’il doit vider le maigre trésor impérial, et tout donner aux Turcs afin qu’il n’aient aucun intérêt à avancer davantage : le siège de Chang’an devenant sans intérêt. Depuis longtemps, les Tang tentent de diviser les Turcs orientaux. Les Turcs orientaux ont plusieurs crises politiques en cours : la construction étatique fait appel à une administration sogdienne, qui encourage à une sédentarisation afin de mener plus stablement l’empire, et cette sédentarisation révolte la noblesse nomade la plus traditionnelle. Début 628, Taizong défait Liang Shidu le dernier rebelle chinois, tué par un subordonné lorsque les troupes Tang détruisent son camp et reconnaissent comme maître des steppes un chef des nomades rebelles, Pijia Kakhan, ou Bilge Kakhan , soutien chinois qui encourage d’autres tribus à se soumettre au camp rebelle, affaiblissant d’autant Xieli. En 629, Xieli est contraint de se déclarer vassal des Tang, Taizong ignore le geste et envoie Li Jing et Li Shiji, avec une armée turco-chinoise de 100 000 hommes, à l’assaut du Kakhan Turc de Xieli. Plusieurs assauts ont lieu. En Mongolie intérieure, près de Guishui*, Li Jing et 3 000 cavaliers sabrent de nuit le camp de Xieli qui doit s’enfuir. En Mongolie extérieure, dans l’Orkhon [23], puis Kerulen, Xieli est de nouveau défait. Ridiculisé, ayant fui chez un vassal, Xieli est capturé et offert à l’armée Tang, tandis que le vassal se soumet en 630. Il passe le reste de sa vie à Chang’an, dans une prison palais, l’ensemble des territoires des Turcs orientaux, défaits, est désormais vassal des Tang. Au printemps 630, l’Empereur Taizong reçoit les représentants des nomades du nord et qui le font Kakhan Céleste, impliquant une suzeraineté complète et le droit d’arbitrer les disputes internes. Les chefs turcs les plus loyaux se voient aussi attribuer des titres chinois. À la cour, le débat sur l’intégration ou non des Turcs à l’empire a lieu, l’Empereur y est favorable, des confucéens considèrent les Turcs comme trop sauvages, incapables et ne méritant pas d’intégrer la civilisation chinoise. L’Empereur impose finalement l’intégration, déplaçant les Turcs de leurs territoires vers les territoires chinois, en distribuant 100 000 au sud du Shaanxi actuel et 10 000 vers Chang’an, dans le but de leur inculquer le mode de vie sédentaire et agricole chinois. En soumettant la principale tribu en 630, c’est en fait une destruction durable du khanat des Turcs Orientaux qui est accomplie, et toute une série de petites tribus ou confédération de tribus du nord deviennent vassales de l’Empire Tang, offrant chaque année un tribut à l’Empire de Chine et à la dynastie des Tang. Plus important, la soumission de ces tribus rebelles, et de la tribu principale implique la mise à disposition de troupes, récemment désunies et donc facilement vaincues, mais composées de guerriers cavaliers extrêmement expérimentés et brillants. En somme, les victoires Tang de ces années sont largement des victoires turco-han. Après son coup d’État, Taizong s’emploie à renouveler le groupe dirigeant, en remplaçant doucement les fidèles ministres de son père par de jeunes recrues compétentes, mais aussi lui étant plus favorables. Il éloigne également les membres de la famille impériale des postes à responsabilité. Aussi, la majorité des fonctionnaires de haut rang sous Taizong sont des fidèles de ses jeunes années de général Li, puis de prince de Qin. Certains sont issus du milieu civil, d’autres de l’armée. Cette préférence envers des collaborateurs proches n’est pas exclusive. Deux de ses plus proches fonctionnaires Wei Cheng et Wang Kui sont issus de l’ancienne équipe de son frère aîné, Taizong les récupère après avoir défait et tué son frère Li Jiancheng en 626. D’après certaines sources, c’est une volonté avouée de placer aux postes à responsabilité des hommes démontrés comme aptes à gérer de telles missions. Taizong s’est plusieurs fois exprimé en ce sens, affirmant le besoin de s’entourer d’hommes capables, sans égard de leur origine ou de leur passé, et de placer chaque homme au poste qu’il remplirait le mieux. Aussi, ses secrétaires d’État et directeurs de Départements sont systématiquement des fonctionnaires ayant déjà fait leurs preuves, et généralement issus de vieilles familles de fonctionnaires. À cette équipe de ministres et de ministres-généraux, s’ajoute un puissant lot de généraux capables, chinois (Hou Junji, Guo Xiaoke...) ou barbares ralliés (Ashina She’er, Yuchi Jingde), ainsi que des administrateurs et lieutenants réputés. Dans les premières années de la dynastie Tang, l’Empereur Gaozu puis Taizong lui-même avaient récompensé de nombreux rebelles ou locaux puissants par de nombreux titres, offices, et responsabilités, afin d’acheter leurs collaborations, leurs redditions, ou afin qu’ils assistent les armées Tang au combat. Des préfectures et comtés sont fréquemment divisés afin de créer artificiellement et d’offrir davantage d’offices, doublant de Sui Yangdi à la fin du règne de Tang Gaozu. Cette politique facilite la réunification, la pacification et la stabilisation des territoires conquis. Désormais maître d’une Chine réunifiée, ces opposants ralliés à qui tant de titres, d’offices, et de responsabilités avaient été données ou promises se voient doucement écartés par Taizong et son administration centrale qui fusionne maintenant les préfectures afin d’optimiser l’appareil étatique, et de réduire les acteurs du pouvoir. Sous ordre de Taizong et sous la direction de Fang Xuanling, l’administration centrale s’emploie dès 627, d’une manière ou d’une autre, à casser les postes de complaisance, et impose des érudits compétents. C’est une volonté franche d’instaurer une véritable méritocratie afin de renforcer et stabiliser cet empire naissant. La construction de l’appareil étatique Tang se diffuse en fonction des conquêtes, et se cristallise lentement. La dynastie des Tang, s’affirmant longtemps comme quasi-légitimiste, ou au moins en faveur d’une restauration de l’ordre prospère ancien. Les Empereurs Gaozu et Taizong s’emploient donc à continuer les réformes engagées par les Sui. Aussi, ce n’est en rien une révolution administrative, ni l’émergence d’hommes nouveaux, c’est la mise en place d’un nouveau réseau favorable à la nouvelle famille impériale, sélectionnant ses fonctionnaires parmi l’élite de la période Sui. Taizong crée dès 627 un Directorat des Universités d’État, chargé de déterminer un enseignement officiel, et de superviser l enseignement dans cinq écoles d’État. l’École de Calligraphie, à destination des fils de petits fonctionnaires et à la classe bourgeoise, afin de fournir les offices les plus basses avec peu d’espoir de progressions ; l’École de Droit, pareillement ouverte aux classes moyennes. Des bourses sont offertes pour fournir équitablement en habits et nourriture les candidats, le transport est offert aux candidats provinciaux. Des édits impériaux annoncent le programme officiel (en cours d’élaboration à l’époque) pour chaque session. Taizong redessine la carte administrative de l’Empire, avec du plus grand au plus petit : des circuits, des gouvernements généraux, des préfectures, et des comtés. Lors de l’expédition contre Goguryeo en 645, Taizong est atteint d’une maladie incapacitante qui l’épuise. Lors de la retraite de 645, il doit par exemple s’arrêter longuement afin de recouvrer ses forces. Durant cette période et les dernières années de son règne, son épuisement le pousse à confier l’administration à Li Zhi, le prince héritier, conseillé par les ministres de la cour. Affaibli, éloigné de fait du pouvoir, il reste préoccupé par l’avenir de l’Empire et les capacités du prince héritier à assumer son rôle futur. Taizong meurt le 10 juillet 649. Il est enterré dans son tombeau, où était déjà son épouse l’impératrice Wende, morte en 636. Leur tombeau, encastré dans une colline, serait entouré des statues des rois et grands chefs soumis lors de ses conquêtes.