Considéré comme matérialiste en raison de sa conception d’un Univers constitué d’atomes et de vide.
Il a été un disciple de Leucippe, le fondateur de l’atomisme [1] ; Diogène Laërce attribua injustement l’ouvrage de Démocrite à propos de l’atomisme à Épicure. Ses contributions exactes sont difficiles à démêler de celles de son mentor Leucippe, car ils sont souvent mentionnés ensemble dans les textes des doxographes [2].
Démocrite était pourtant bien connu de son compatriote Aristote ; Platon aussi connaissait l’atomisme démocritéen, comme on le voit dans le Timée [3], où des analogies évidentes existent entre d’une part l’atomisme platonicien et sa conception de la pathologie des tissus, et d’autre part les maladies et la mort de l’organisme vivant et du cosmos chez Démocrite ; de telles analogies suggèrent l’hypothèse d’une influence de Démocrite sur certaines pages du Timée ; mais Platon ne nomme jamais Démocrite, ce qui a autorisé un anti-platonicien comme Aristoxène à formuler une explication non exempte d’une certaine tonalité polémique malveillante.
Démocrite est souvent classé parmi les présocratiques [4] du point de vue philosophique, bien qu’il soit un peu plus jeune que Socrate, et qu’il soit mort quelque 30 années après lui.
Démocrite, troisième fils d’Hégésistrate, d’Athénacrite ou de Damasippe, est né à Abdère [5], dans la 80ème olympiade [6] (460-457 av. jc) ou, selon d’autres, dans la 77ème (en 470-469 av. jc).
Il fut éduqué par des mages perses qui lui apprirent la théologie et l’astronomie, après que Xerxès 1er, roi des Perses, eut atteint Abdère en 480 av. jc puis fut le disciple de Leucippe, actif vers 440 av. jc. Après avoir hérité d’une forte somme d’argent de son père, il voyagea beaucoup.
Démocrite apprit la géométrie auprès des prêtres d’Égypte, et l’astrologie en Perse. Il aurait également voyagé en Inde, où il aurait rencontré les gymnosophistes [7], en Éthiopie [8] et en Babylonie [9]. Il serait même allé à Athènes [10], rencontrant Socrate sans s’en faire connaître, par indifférence pour la gloire. Ce passage à Athènes était néanmoins considéré déjà comme douteux dans l’Antiquité.
De retour de ses voyages, ayant dilapidé sa fortune, une disgrâce imprévue l’attendait. Ses ennemis l’accusèrent d’avoir dissipé tout son patrimoine en des voyages inutiles entrepris par une vaine curiosité. Le Philosophe parut devant le Sénat d’Abdère, et pour toute défense, il se contenta de lire les premières pages d’un Traité nommé “Grand ordre du monde” qu’il venait de finir. Les Juges frappèrent des mains, et lui donnèrent mille louanges ainsi qu’une récompense de 500 talents. Il vécut ensuite dans la pauvreté, et fut entretenu par Damaste, son frère.
D’autre part, selon Pline l’Ancien, , il aurait prouvé à ses concitoyens qui dénigraient les études auxquelles il se livrait, qu’il était capable de s’enrichir, bien que cela ne l’intéressât point car selon lui, celui qui sait jouir du peu qu’il a est toujours assez riche . Il aurait procédé de la façon suivante : évaluant sur des considérations astrologiques une hausse du cours de l’huile, il a acheté la plupart des stocks pour les revendre à la montée des cours. Les notables auraient alors constaté tant son intelligence que son indifférence pour le gain lorsqu’il rendit la marchandise sans demander le fruit de sa spéculation.
Aulu-Gelle raconte que Démocrite, se promenant un jour aux environs d’Abdère, rencontra un portefaix nommé Protagoras, qui portait une charge de bois retenue par un seul lien et placée dans un équilibre tel que sa pesanteur en était comme diminuée. Le philosophe demanda à Protagoras qui lui avait appris à mettre ainsi son fardeau en équilibre. Protagoras répondit qu’il avait trouvé lui-même ce moyen, et, pour le prouver, il défit à l’instant son fagot et le rétablit ensuite en peu de temps avec le même soin. Frappé de l’intelligence de cet homme, Démocrite lui aurait alors proposé de l’admettre au nombre de ses disciples. Protagoras aurait accepté et devint ensuite un philosophe sophiste [11].
Il semble avoir été partisan des pythagoriciens [12], et il admirait Pythagore. Peut-être même fut-il en rapport avec Philolaos de Crotone.
Ses dons d’observation, qui vont grossir l’image légendaire d’un Démocrite capable de déductions subtiles, fondées sur des observations qui échappent aux autres mortels et relevant plus ou moins de la magie, étonnaient ses contemporains.
Sa popularité ne rendit pas Démocrite plus sociable. Il s’appliqua au contraire davantage à l’étude ; et afin de n’être point détourné par les visites importunes et les conversations de parade, si ordinaires entre les savants, il rechercha la solitude et les ténèbres. Démocrite passait des semaines entières pour étudier plus tranquillement : là il ne se livrait qu’à de profondes méditations. Des jeunes gens essayèrent de lui faire peur ; ils se déguisèrent en spectres, ils prirent les masques les plus affreux, et vinrent le trouver dans sa retraite avec ce qu’ils crurent le plus capable de lui inspirer de l’effroi. Mais Démocrite ne daigna pas les regarder, et se contenta de leur dire tout en écrivant : Cessez donc de faire les fous.
Il devint aveugle, sans que l’on connaisse la cause exacte de sa cécité.
Il mourut vers l’âge de 103 ans, et fut enterré aux frais de l’État. Il semble s’être laissé mourir, en mangeant de moins en moins, pour quitter la vieillesse qui affaiblissait sa mémoire, et mourut d’épuisement.