Né vraisemblablement à Brouage [1], dans l’ancienne province de Saintonge [2].
Son enfance est peu connue, mais il en tire une bonne formation de navigateur et de cartographe, ainsi que de dessinateur et de rédacteur de textes. Il écrit plus tard de nombreux ouvrages : des chroniques de la Nouvelle-France Voyages : œuvres publiées en 1603, 1613, 1619, 1632 et un Traité de la marine et du devoir d’un bon marinier en 1632.
Après une formation de navigateur en Saintonge vers 1586/1594, il se fait soldat en Bretagne. Il s’engage dans l’armée du roi, sous la direction des maréchaux Jean VI d’Aumont , Timoléon d’Epinay de Saint-Luc , puis Charles II de Cossé duc de Brissac , à Blavet [3], en Bretagne. Cette armée levée par Henri IV vise à soumettre Philippe-Emmanuel de Lorraine duc de Mercœur , gouverneur de Bretagne, qui offre refuge à un corps expéditionnaire espagnol et aux dernières troupes rebelles de la ligue catholique [4], durant la 8ème guerre de religion de 1585 à 1598. Samuel Champlain sert dans ce corps d’armée pendant trois ans, jusqu’à la Paix de Vervins [5] en 1598. Il s’y taille une bonne réputation auprès de ses supérieurs hiérarchiques. D’abord fourrier [6], aide de Jean Hardy maréchal des logis [7], puis enseigne du sieur de Millaubourg, il finit par obtenir le grade de maréchal des logis. Il reçoit du roi dès 1603 une rente viagère, qui en 1618 est augmentée à 600 livres par an.
Champlain s’embarque en 1599 pour l’Espagne. Il est chargé de la sécurité du Saint-Julien, un navire de son oncle maternel par alliance, Guillaume Allène dit le capitaine provençal . Il se joint à cette expédition de 2 ans pour les Indes occidentales : aux Antilles et dans le Golfe du Mexique. Informé ou conseillé par des Espagnols, Champlain se serait rendu en exploration jusqu’à Mexico, et jusqu’à ce qui est aujourd’hui le Panama, dont il aurait su l’étroitesse de l’isthme et la pertinence d’y construire un jour un canal offrant un passage à l’autre océan.
Son premier voyage vers l’Amérique du Nord commence en 1603, où il sert en tant que navigateur, explorateur et cartographe, assistant de François Gravé dit Sieur du Pont , marchand et navigateur, chef d’une expédition de traite des fourrures au Canada, sous mandat d’ Aymar de Chaste , gouverneur de Dieppe [8] et alors titulaire du monopole commercial de la Nouvelle-France. François Gravé est un explorateur expérimenté de ces régions, et chaque été depuis peut-être 20 ans, il remonte le fleuve Saint-Laurent en barque jusqu’aux Trois-Rivières. Recommandé par De Chaste auprès de François Gravé, et désireux de se faire valoir auprès d’Henri IV, Champlain promet au roi de lui faire un rapport détaillé de cette expédition.
Le 15 mars 1603, Champlain quitte Honfleur [9], à bord de La Bonne Renommée. Deux autres navires font partie de l’expédition, dont La Françoise. Le 24 mai 1603, la flotte s’ancre à Tadoussac [10]. Le 27 mai, Champlain et François Gravé traversent en barque l’embouchure du Saguenay [11], et descendent à la Pointe aux Alouettes [12]. Ils rendent ainsi visite au chef montagnais [13] Anadabijou , qui campe aux environs. Ce dernier les accueille alors qu’il est en plein festin, au milieu d’une centaine de guerriers. Un conseil se réunit, et l’un des leurs, qui revient de France, parle amplement du pays qu’il a visité, et raconte l’entrevue qu’il a eue avec Henri IV. Il explique ainsi que le roi des Français leur veut du bien et désire peupler leur terre.
Champlain et François Gravé participent au rituel du calumet de paix, et aspirent de grandes bouffées de fumée de tabac. Cette première entente marque toute la politique indienne française du siècle suivant, et notamment la participation des Français aux guerres contre les Iroquois [14], alors ennemis des Montagnais et des autres nations fréquentant le fleuve. Cette rencontre terminée, les Français quittent les lieux le 18 juin 1603, vers l’amont.
L’expédition à laquelle participe Champlain suit les traces de Jacques Cartier. Ils souhaitent rejoindre le lieu que Champlain désigne comme le Grand Sault saint Louis, que Jacques Cartier appelait Ochelaga et qu’il n’avait pas réussi à franchir. Champlain décrit des courants puissants qui rendent difficile la navigation de leurs canot, et les oblige à terminer leur parcours par voie de terre. Trop pressé d’atteindre ce grand sault, qu’il espère franchir, Champlain remarque à peine les deux endroits stratégiques où plus tard il établira des postes de traite et de colonisation : Québec et Trois-Rivières. À son retour en France le 20 septembre, il fait son rapport au roi et publie un compte-rendu de l’expédition, intitulé Des sauvages.
À nouveau chargé par Henri IV de lui faire rapport de ses découvertes, Champlain participe à une autre expédition en Nouvelle-France au printemps 1604, menée celle-là par Pierre Dugua de Mons et toujours pilotée par François Gravé sieur Dupont. Appareillant du Havre-de-Grâce [15], l’expédition compte deux navires, la Bonne Renommée et le Don de Dieu.
Champlain contribue à l’instauration de l’habitation de l’Île Sainte-Croix [16], le premier établissement français du Nouveau Monde. Ensuite, le groupe déménage le tout à Port-Royal [17]. Puis Champlain s’active ensuite au jardinage. L’année suivante aussi, mais avec un connaisseur nouveau venu, l’épicier et apothicaire parisien Louis Hébert .
Au mois de mai 1607, la nouvelle arrive que les privilèges de commerce de Pierre Dugua de Mons sont révoqués. Port-Royal est alors livré à la surveillance de leur ami le chef Membertou et toute l’expédition retourne en France.
Le 18 avril 1608, il repart pour la Nouvelle-France à bord du Don de Dieu, comme lieutenant de Pierre Dugua de Mons, qui reste en France. Ses hommes reçoivent pour mission de préparer l’établissement d’une colonie permanente en un lieu favorable le long de la Grande Rivière de Canada [18].
Champlain accoste le 3 juin à Tadoussac et, avec ses ouvriers, gagne en barque la pointe de Québec le 3 juillet, au pied du cap Diamant [19], où ils érigent trois bâtiments principaux d’une hauteur de deux étages, entourés d’un fossé de 4,6 mètres de large et d’une palissade de pieux.
Le premier hiver est difficile pour les 25 hommes restés sur place. La plupart décèdent du scorbut ou de dysenterie, et seuls huit hommes survivent, outre Champlain. Dès le printemps, celui-ci prend soin d’établir de bonnes relations avec les Amérindiens [20] des environs. Comme à Tadoussac, 6 ans auparavant, il renoue des alliances avec les Montagnais et les Algonquins [21], qui vivent au nord du Saint-Laurent, acquiesçant à leur demande persistante de les aider dans leur guerre contre leurs ennemis les Iroquois, semi-nomades eux aussi, vivant au sud-ouest du fleuve.
Champlain part le 18 juin 1609 en voyage de découverte au pays des Iroquois. Il fait la rencontre d’environ deux à trois cents Hurons [22] et Algonquins sur une île près de Batiscan [23] qui se préparent à partir en guerre contre les Iroquois.
Le 28 juin, Champlain repart avec neuf soldats français et les Hurons toujours dans l’idée d’explorer la rivière des Iroquois [24]. En cours de route, il nommera certaines rivières comme la rivière Saint-Suzanne [25], la rivière Du Pont [26] et la rivière de Gennes [27].
Le 12 juillet, il découvre le lac qu’il baptise de son propre nom [28]. N’ayant fait, jusque là, aucune rencontre avec les Iroquois et ne pouvant continuer avec son embarcation en raisons des rapides, la plus grande partie de la troupe rebrousse chemin, le laissant avec seulement deux Français à bord d’un canot amérindien et une soixantaine d’Amérindiens.
Le 29 juillet, vers les 22 h, à l’emplacement du futur fort Carillon [29], un peu au sud de Crown Point [30], Champlain et son équipe rencontrent un groupe d’Iroquois. Le lendemain, 200 Iroquois avancent sur leur position. Un guide indigène désigne les trois chefs iroquois. Aussitôt Champlain tue 2 d’entre eux d’un seul coup d’arquebuse, qui provoque aussi la fuite rapide de l’ensemble des Iroquois. Cet événement entame une longue période de relations hostiles de la confédération des cinq nations iroquoises à l’encontre des colons français.
Champlain regagne la France, pour faire son rapport au sieur de Mons, et tenter avec lui de faire renouveler leur monopole sur le commerce des fourrures. Trop de marchands s’y opposent. Les négociations échouent, mais Champlain et de Mons parviennent à convaincre quelques marchands de Rouen de former avec eux une société. L’objectif est de convertir une partie de l’habitation de Québec en un entrepôt à leur usage exclusif, en vertu de quoi ces marchands promettent de soutenir la colonie.
Le 8 avril 1610, Champlain retourne à Québec, où ses alliés amérindiens lui demandent assistance dans un autre épisode de la guerre contre les Iroquois. Durant la bataille qui s’ensuit, à l’embouchure de la rivière aux Iroquois [31], Champlain reçoit une flèche qui lui perce le lobe de l’oreille et le blesse au cou. À nouveau victorieux, il regagne Québec pour constater que la traite des fourrures fut désastreuse pour les marchands qui le soutiennent, et pour apprendre la nouvelle de l’assassinat d’Henri IV.
Il rentre en France, laissant 16 hommes à Québec. Au cours de son séjour à Paris, il épouse une jeune fille de 12 ans, nommée Hélène Boullé, en décembre 1610, mariage qui lui rapportera une dot de 45 000 livres.
En 1620, Hélène Boullé accompagne Champlain à Québec. Elle s’y ennuie, malgré la présence de son frère Eustache Boullé, qui vit à Québec depuis 1618, au service de Champlain. En 1624, elle retourne en France pour y demeurer définitivement.
Le 1er mars 1633, Champlain réclame à Richelieu son poste de gouverneur de la Nouvelle-France. Il obtient le titre de commandant à Québec, en l’absence du ministre. Champlain part de Dieppe ou de Rouen, le 23 mars 1633 pour Québec, qu’il atteint le 22 mai après une absence de quatre ans. Plus de 200 personnes l’accompagnaient, à bord de trois navires : le Saint Pierre, le Saint Jean et le Don de Dieu.
Le 18 août 1634, il envoie un rapport à Richelieu disant qu’il avait rebâti sur les ruines de Québec, élargi les fortifications, construit une autre habitation à quinze lieux en amont, aussi bien qu’une autre à Trois-Rivières. Il a aussi commencé une offensive contre les Iroquois annonçant qu’il voulait les éliminer ou les ramener à la raison.
Au mois d’octobre 1635, Champlain est frappé de paralysie. Il meurt le 25 décembre 1635, sans enfant.
Administrateur local de la ville de Québec jusqu’à sa mort, il ne reçoit jamais le titre officiel de gouverneur de la Nouvelle-France, même s’il en exerce les fonctions.
Les difficultés rencontrées dans cette entreprise sont nombreuses, et ce n’est qu’à partir des étés 1634 et 1635, dans les 18 derniers mois de sa vie, que Champlain voit son rêve de colonisation se concrétiser, avec l’arrivée et l’établissement de quelques dizaines de familles de colons.