Hydulphe de Moyenmoutier dit saint Hydulphe ou saint Hidulphe (612-707)
Moine bénédictin d’Austrasie
Personnage légendaire, les historiens s’accordent sur son rôle fondateur d’une abbaye vosgienne, Moyenmoutier [1].
Originaire de Norique [2], au sud de l’actuelle Bavière, il fréquente les écoles de Ratisbonne [3]. Il se destine très jeune à la vie religieuse et fait sa profession monastique en l’abbaye Saint Maximin de Trèves [4]. On pense qu’il a pu être chorévêque [5] dans cette importante cité épiscopale et qu’il y a côtoyé Gondelbert et Déodat dit saint Dié , futurs moines des Vosges.
Après une trentaine d’années, il se démet de sa charge et arrive dans la vallée vosgienne du Rabodeau [6] vers 670. Il bâtit sa hutte à mi-chemin d’Étival [7] et de Senones [8], dans la forêt.
La renommée du nouvel ermite attire bientôt une foule de disciples. Hydulphe décide alors la construction d’un monastère sur le lieu, qui devient medianum monasterium [9]. Premier abbé de Moyenmoutier, il choisit la règle de saint Benoît comme mode de vie de la nouvelle communauté.
Hydulphe aurait été abbé en activité vers 690-700 d’après sa légende tardive. Dans certaines évocations du miracle de sainte Odile recouvrant la vue. On trouve à l’église abbatiale de Moyenmoutier un tableau représentant cette scène.
Hidulphe, avant de fonder une abbaye à Moyenmoutier, est d’abord un simple administrateur après la reconquête royale. Il impose un rattachement avec le Chaumontois [10] dans le cadre du fisc royal. Cette restructuration administrative fait perdre toute autonomie fiscale aux bans vosgiens, si elle a existé en pratique.
Bénéficiant d’une situation de monopole, les Bénédictins ont une grande responsabilité administrative. Hidulphe aurait pu se contenter de repartir une fois sa mission accomplie, comme d’autres moines ambitieux vers le centre du pouvoir, mais le vieux moine choisit de rester en fondant avec l’agrément du pouvoir carolingien un centre religieux et administratif exemplaire.
D’abord, il choisit un lieu où peut s’ériger une forteresse. Celle-ci contrôle la voie des Saulniers [11], source de prospérité. Le bénéfice du prélèvement du fisc, au moins avec une part réservée sur le ban où se trouve Moyenmoutier assure aussi des ressources, car la tâche administrative est récompensée.
Pour asseoir d’indispensables relais administratifs ou religieux, Hidulphe et ses successeurs reconnaissent les lieux de réunions des bans d’Étival, de Senones, de Saint-Dié et de Bégoncelle ainsi que des entités monastiques associées.
Notes
[1] L’abbaye de Moyenmoutier, ou l’abbaye Saint-Hydulph, était une abbaye de l’ordre de Saint-Benoît, située à Moyenmoutier, dans le département des Vosges (France). Cette abbaye abrita jusqu’à 300 religieux. Elle fut fondée vers l’an 671 par Saint Hydulphe, chorévêque de Trèves qu’il quitta pour se retirer dans la solitude des Vosges et y vivre en ermite. Cette abbaye fut soumise dès le commencement aux rois d’Austrasie et ensuite à l’empereur Charlemagne et à ses successeurs. Par la suite, les ducs de Lorraine y exercèrent des droits régaliens sous l’autorité des empereurs.
[2] Le Norique est un royaume celtique qui s’est constitué au 2ème siècle av. jc. Les Noriques formaient une confédération avec leurs voisins les Boïens et les Taurisques. Par la suite le Norique est devenu une province de l’Empire romain. Elle était limitée au nord par le Danube, à l’ouest par la Rhétie, à l’est par la Pannonie et au sud par la Dalmatie. Elle correspond approximativement à la Styrie, la Carinthie, la région de Salzbourg, une grande partie de la Basse-Autriche, l’extrême ouest de la Bavière et une partie de la Slovénie.
[3] Ratisbonne, est une ville allemande, située dans le Land de Bavière et baignée par le Danube. Elle est située à 88 kilomètres de Nuremberg et à 103 kilomètres de Munich, proche de la République tchèque. La ville est le chef-lieu du district du Haut Palatinat et du Landkreis de Regensburg.
[4] Saint-Maximin de Trèves est une abbaye bénédictine fondée à Trèves en Austrasie (actuellement Rhénanie-Palatinat en Allemagne) aux alentours du 4ème siècle. Elle fut à l’origine d’une réforme monastique qui se diffusa dans le Saint Empire romain germanique.
[5] Apparu dès les premiers siècles de l’ère chrétienne (2ème/3ème siècles en Orient et 4ème/5ème siècles en Occident), le chorévêque exerce dans les zones rurales les fonctions de l’évêque dont il dépend et qui siège toujours en ville. Alors qu’elle a disparu en Occident dès les 11/12ème siècles, la dignité de chorévêque est aujourd’hui encore conférée, le plus souvent à titre honorifique, dans les Églises chrétiennes orientales unies ou non à l’Église catholique romaine.
[6] Le Rabodeau est une rivière française d’Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine qui coule dans le département des Vosges. C’est un affluent de la Meurthe en rive droite, donc un sous-affluent de la Moselle.
[7] Étival-Clairefontaine est une commune française située dans le département des Vosges. Étival-Clairefontaine se situe sur les rives de la Meurthe, à ses confluences avec le Rabodeau et la Valdange.
[8] Senones est une commune française située dans le département des Vosges. Senones est située dans la vallée du Rabodeau, affluent en rive droite de la Meurthe, qui quitte son territoire pour Moyenmoutier à l’altitude de 328 mètres.
[9] l’abbaye de Moyenmoutier
[10] Le Chaumontois, littéralement en latin pagus calvomontensis, est un pays gallo-franc qui correspond à la large moitié orientale de l’ancienne cité des Leuques ou civitas leucorum. Ce pays administré par un comes ou comites, c’est-à-dire un comte royal est attesté dans les actes diplomatiques au haut Moyen Âge. Sa caractéristique principale, expressément dénommée, est le voisinage de chaumes montagnardes ou pâturages de hauteur, source de revenus publics par admodiation, lieu de migration estival. Son chef-lieu est aujourd’hui inconnu, il pourrait se trouver dans l’ancien village de Chaumont ou près de Saint-Dié à l’emplacement de l’ancien château de Chaumont
[11] Un saunier (anciennement saulnier) ou paludier est un travailleur récoltant le sel dans des marais salant. Le mot de saunier désigne aussi historiquement les récoltants de sel travaillant dans des sauneries, où ils obtenaient le sel en chauffant l’eau sur des feux de bois. Le maître-saunier, employé permanent ou patron, se distingue des simples manœuvres, le plus souvent saisonniers. Enfin, sous l’Ancien Régime, les sauniers étaient des vendeurs de sel, et en raison des impôts élevés sur ce produit, ils devaient faire face à la concurrence des « faux-saulniers », vrais marchands faisant de la contrebande.