Né dans la localité de Besanduc, près d’Éleuthéropolis [1], en Palestine, vers 315, d’une famille d’agriculteurs. C’était une famille juive, et ayant perdu son père de bonne heure, il fut adopté par un rabbin de la ville voisine d’Éleuthéropolis nommé Tryphon, qui lui enseigna l’hébreu et la culture hébraïque et lui légua ses biens.
Sa ville épiscopale est Salamine de Chypre [2], détruite par un séisme vers 340 et reconstruite sous le nom de Constantia, du nom de l’empereur régnant Constance II. C’était alors la métropole ecclésiastique de l’île de Chypre.
Les sources sont les propres textes d’Épiphane, des références à lui chez ses contemporains Jérôme, Basile de Césarée et Théophile d’Alexandrie, dans “les Dialogues sur la vie de Jean Chrysostome de Palladios, et les Histoires ecclésiastiques de Socrate le Scolastique et Sozomène”.
En tout cas il fut très jeune chrétien, et il se rendit en Égypte peut-être à Alexandrie pour ses études, ce qui serait signe d’une famille aisée, où il fut un temps séduit par une secte gnostique [3], mais finalement se joignit pendant plusieurs années à une communauté monastique.
Revenu dans son pays natal vers 340, il y fonda un monastère dont il devint le supérieur. Il se lia particulièrement à Hilarion de Gaza. Sous l’arianisme [4] il resta un ferme partisan du concile de Nicée [5], ce qui entraîna des tensions avec l’évêque Eutychius d’Éleuthéropolis, que, selon saint Jérôme, il aurait ramené à l’orthodoxie.
Ayant migré à Chypre pour des raisons incertaines, il y fut élu évêque métropolitain de Salamine par le synode de l’île en 367, et conserva son siège jusqu’à sa mort, pendant 36 ans. Son mode de vie ascétique bien qu’il fût opposé à l’abstinence de viande et de vin prônée par d’autres ascètes dont Hilarion, son importante culture religieuse et son attachement farouche à l’orthodoxie la plus rigoureuse lui conférèrent une très grande autorité dans l’Église de l’époque. L’empereur arien Valens, remarque saint Jérôme, n’osa jamais s’en prendre à lui. On le consultait de loin sur la doctrine.
Vers 376, il se rendit à Antioche pour intervenir dans les querelles qui déchiraient l’Église de cette ville dont dépendait Chypre. Il convainquit d’hérésie Vital, l’évêque des apollinaristes [6], et prit parti pour Paulin, chef de file des eustathiens [7], contre Mélèce . Il échoua ensuite à rallier Basile de Césarée à cette position.
Il n’apparaît pas parmi les signataires du Premier concile de Constantinople [8]. En 382, il assista à un concile à Rome, auprès du pape Damase, où le soutien à Paulin fut confirmé contre Flavien 1er, successeur de Mélèce, pourtant reconnu par la majorité de l’épiscopat d’Orient sauf l’Égypte. Il logea à Rome chez la riche veuve Paula, qui se retira ensuite avec saint Jérôme à Bethléem en 385 et à qui il rendit visite sur son lit de mort.
En 393, il se rendit en Palestine et se brouilla avec l’évêque Jean II de Jérusalem, qu’il accusait d’origénisme [9]. Saint Jérôme et Rufin d’Aquilée furent mêlés à cette controverse, qui les sépara définitivement. Épiphane ordonna Paulinien, frère de Jérôme, à la prêtrise, dans son ancien monastère d’Éleuthéropolis, mais au mépris de l’autorité épiscopale de Jean. Pendant la Semaine Sainte de 397, prêchant à Jérusalem, il dénonça l’origénisme avec virulence, un discours clairement dirigé contre l’évêque Jean, qui répondit en le taxant d’anthropomorphisme. Épiphane finit par appeler, dans une lettre, tous les moines de Palestine à rompre la communion avec l’évêque de Jérusalem.
L’évêque Jean en appela à Théophile d’Alexandrie, qui le soutint tout d’abord et accusa aussi Épiphane d’anthropomorphisme. Mais en 400 Théophile, pour des raisons internes à son Église, renversa complètement sa position et se lança dans une violente campagne anti-origéniste où il rechercha l’appui d’Épiphane, qui devint alors son précieux allié. Des moines origénistes se réfugièrent à Constantinople où ils demandèrent l’aide de Jean Chrysostome, évêque de la capitale, qui les accueillit favorablement.
Théophile parvint alors à monter le très vieux Épiphane contre Chrysostome, et il le poussa en 402 à se rendre dans la capitale impériale, où avec sa vivacité coutumière il traita Chrysostome comme un hérétique et organisa un mini concile anti-origéniste en ignorant l’évêque de la cité.
Il semble toutefois avoir pris conscience de s’être laissé manipuler, et se retira de Constantinople avant l’arrivée de Théophile, convoqué par l’empereur. Il mourut pendant son voyage de retour à Chypre, âgé de près de 90 ans.
Épiphane est resté dans l’histoire de l’Église comme un tenant sourcilleux de l’orthodoxie et l’auteur d’un catalogue détaillé des hérésies. Il est toutefois considéré comme un piètre écrivain et un assez mauvais théologien.
Le traité connu sous le nom d’“Anchoratus”, qu’il publia en 374, est un exposé de la foi orthodoxe, centré sur les dogmes de la Trinité et de la Résurrection, dirigé notamment contre l’arianisme et l’origénisme. Il contient deux professions de foi, dont le Credo baptismal de l’Église de Chypre. On y trouve seulement une liste d’hérésies.
Ensuite, de 374 à 377, Épiphane composa “le Panarion”, ouvrage en 3 livres présentant 80 hérésies.