Il fut un des principaux ministres de l’Empereur byzantin Justinien 1er. Ses réformes, menées de 531 à 541, vont dans le sens du renforcement de l’absolutisme impérial et de la centralisation de l’Empire.
Né à Césarée de Cappadoce [1], il débute comme scriniaire [2] dans les services du magister militum [3] où il sait se montrer un conseiller avisé de Justinien en matière financière. Il devient ensuite numérarius, chef des finances du magister militum puis préfet du prétoire [4] d’Orient en 531.
Soutenu par l’Empereur, son gouvernement est marqué par la lutte contre les abus des fonctionnaires, dont pâtit l’Empire byzantin.
En 530, il remet en vigueur la loi interdisant aux fonctionnaires d’acquérir des immeubles dans les provinces où ils sont en fonction, interdiction qui est cependant relativisée pour les fonctionnaires subalternes. Il proscrit également les donations aux gouverneurs et aux anciens gouverneurs, il ordonne également des restrictions contre les magistrats, afin de prévenir les extorsions, notamment par la réduction du montant des sportules que les justiciables doivent verser à toutes les étapes de la procédure judiciaire.
Toutes ces mesures lui attirent la haine des fonctionnaires, qui s’estiment tyrannisés et lésés. Leurs doléances demeurant lettre morte, ils procèdent alors à une résistance passive, opposant la force d’inertie aux décrets de l’Empereur.
Confronté à des ennemis politiques, il obtient de Justinien une ordonnance selon laquelle aucun ministre ne peut, en dehors de lui et du basileus [5], traduire des curiales ou des fonctionnaires impériaux en justice.
Un autre aspect de sa politique concerne la réduction des dépenses de l’État. Il réforme l’administration des Postes, au détriment des grands propriétaires, ainsi que l’armée.
La réforme militaire se caractérise par deux éléments majeurs. Il procède à la réforme de la “coemptio”, mode de réquisition dont disposait le gouvernement impérial pour assurer l’approvisionnement des troupes. Les grands propriétaires sont désormais tenus de fournir des provisions à l’armée à proportion de l’impôt dont ils sont redevables, et lorsque le gouvernement l’exige.
Il oblige les “limitanei”, soldats paysans installés aux frontières de l’Empire, à renoncer à leurs soldes, sous peine de se voir confisquer leurs terres.
Sa méthode consiste à évaluer les besoins réels sur la base de ce qui existe, sans se fier aux états des effectifs anciens. Ses chargés de mission sont d’autant plus zélés qu’ils reçoivent le douzième des économies réalisées sur le budget national.
Il prend également des mesures destinées à augmenter le rendement fiscal, préservant cependant la paysannerie, augmentation des droits de douane, création de péages, augmentation des droits d’exportation, création de l’aerikon, impôt qui subsiste jusqu’à la fin de l’Empire. Ce dernier impôt, déjà prévu par un règlement de 478 mais jamais appliqué, vise à sanctionner l’interdiction faite aux constructions de comporter des parties saillantes (balcons, terrasses) empiétant trop sur la voie publique. Des commissaires, appelés logothètes, sont envoyés dans les villes et font souvent démolir les édifices qui ne sont pas en règle.
Prêt à tout pour assurer le rendement de l’impôt, il n’hésite pas à faire torturer les plus puissants débiteurs du fisc mais veille à ce qu’aucune injustice ne soit commise. Un de ses agents, Jean Maxilloplumacius, est ainsi puni pour avoir ruiné plusieurs villes de l’Hellespont.
En janvier 532, la sédition Nika [6] oblige Justinien à démettre Jean de Cappadoce de ses fonctions et à le remplacer par Phocas.
En novembre 532, Jean est restauré dans ses anciennes fonctions et cette seconde préfecture est marquée par de grandes réformes administratives. Ces réformes sous-entendent, dans leur ensemble, une hostilité sous-jacente à l’encontre des classes dirigeantes
Le 15 avril 535, il fait publier par Justinien “une novelle contre la vénalité des charges”, interdisant aux magistrats et aux gouverneurs d’acheter leurs charges. Il décrète également que le montant des taxes qui doivent être versées aux administrations chargées d’effectuer les nominations sera fixé par l’Empereur. Il supprime également la charge de vicaire, interposée entre le préfet du Prétoire et les gouverneurs de provinces et redéfinit les obligations des gouverneurs.
Il défend les paysans propriétaires contre l’empiètement des grands propriétaires en interdisant à ces derniers d’acquérir de nouvelles terres dans les communes rurales.
En 538, il s’attaque aux monophysites [7] d’Égypte et fait fermer leurs églises et, en 541, leur étend la loi contre les hérétiques en leur interdisant d’exercer toute fonction publique ainsi que de transmettre leurs biens par succession. Il en profite, à cette même époque, pour réformer l’administration et le diocèse égyptiens et met fin à l’unité administrative de cette région, renforçant l’autorité du patriarche.
Le nombre de lois édictées ou restaurées sous le gouvernement de Jean de Cappadoce font la grandeur de l’édifice juridique de Justinien. Ces lois donnent l’image d’un État organisé, dont le fonctionnement est réglé par des lois complexes et composées avec soin. Mais il doit aussi lutter pour qu’elles soient appliquées et pour que l’autorité de l’Empereur soit respectée.
En 537, Justinien lui reproche cependant de ne pas avoir repoussé sans hésitation les prétentions des hérétiques, donnant probablement foi aux accusations de paganisme portées contre lui.
En 540-541, il effectue un long voyage en Orient, où il est acclamé par les masses populaires, qui le remercient des mesures qu’il a prises contre les puissants, ce qui le présente comme un rival dangereux pour Justinien.
Jean de Cappadoce est détesté par l’impératrice Théodora. Celle-ci obtient, en mai 541, son renvoi en invoquant la participation de Jean à un complot destiné à renverser Justinien. Il est alors destitué de son ministère, dépouillé de ses biens et contraint de céder son palais à Bélisaire. Il est remplacé comme préfet par Théodote.
Il est ensuite exilé à Cyzique [8] et en 542, il est accusé de l’assassinat de l’évêque local et exilé en Égypte où il meurt, en 548.