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Jean de Cappadoce

vendredi 3 octobre 2014, par lucien jallamion

Jean de Cappadoce (vers 490-548)

Musée en plein air de la vallée de Göreme ; Cappadoce, Turquie (source Georges Jansoone JoJan)Il fut un des principaux ministres de l’Empereur byzantin Justinien 1er. Ses réformes, menées de 531 à 541, vont dans le sens du renforcement de l’absolutisme impérial et de la centralisation de l’Empire.

Né à Césarée de Cappadoce [1], il débute comme scriniaire [2] dans les services du magister militum [3] où il sait se montrer un conseiller avisé de Justinien en matière financière. Il devient ensuite numérarius, chef des finances du magister militum puis préfet du prétoire [4] d’Orient en 531.

Soutenu par l’Empereur, son gouvernement est marqué par la lutte contre les abus des fonctionnaires, dont pâtit l’Empire byzantin.

En 530, il remet en vigueur la loi interdisant aux fonctionnaires d’acquérir des immeubles dans les provinces où ils sont en fonction, interdiction qui est cependant relativisée pour les fonctionnaires subalternes. Il proscrit également les donations aux gouverneurs et aux anciens gouverneurs, il ordonne également des restrictions contre les magistrats, afin de prévenir les extorsions, notamment par la réduction du montant des sportules que les justiciables doivent verser à toutes les étapes de la procédure judiciaire.

Toutes ces mesures lui attirent la haine des fonctionnaires, qui s’estiment tyrannisés et lésés. Leurs doléances demeurant lettre morte, ils procèdent alors à une résistance passive, opposant la force d’inertie aux décrets de l’Empereur.

Confronté à des ennemis politiques, il obtient de Justinien une ordonnance selon laquelle aucun ministre ne peut, en dehors de lui et du basileus [5], traduire des curiales ou des fonctionnaires impériaux en justice.

Un autre aspect de sa politique concerne la réduction des dépenses de l’État. Il réforme l’administration des Postes, au détriment des grands propriétaires, ainsi que l’armée.

La réforme militaire se caractérise par deux éléments majeurs. Il procède à la réforme de la “coemptio”, mode de réquisition dont disposait le gouvernement impérial pour assurer l’approvisionnement des troupes. Les grands propriétaires sont désormais tenus de fournir des provisions à l’armée à proportion de l’impôt dont ils sont redevables, et lorsque le gouvernement l’exige.

Il oblige les “limitanei”, soldats paysans installés aux frontières de l’Empire, à renoncer à leurs soldes, sous peine de se voir confisquer leurs terres.

Sa méthode consiste à évaluer les besoins réels sur la base de ce qui existe, sans se fier aux états des effectifs anciens. Ses chargés de mission sont d’autant plus zélés qu’ils reçoivent le douzième des économies réalisées sur le budget national.

Il prend également des mesures destinées à augmenter le rendement fiscal, préservant cependant la paysannerie, augmentation des droits de douane, création de péages, augmentation des droits d’exportation, création de l’aerikon, impôt qui subsiste jusqu’à la fin de l’Empire. Ce dernier impôt, déjà prévu par un règlement de 478 mais jamais appliqué, vise à sanctionner l’interdiction faite aux constructions de comporter des parties saillantes (balcons, terrasses) empiétant trop sur la voie publique. Des commissaires, appelés logothètes, sont envoyés dans les villes et font souvent démolir les édifices qui ne sont pas en règle.

Prêt à tout pour assurer le rendement de l’impôt, il n’hésite pas à faire torturer les plus puissants débiteurs du fisc mais veille à ce qu’aucune injustice ne soit commise. Un de ses agents, Jean Maxilloplumacius, est ainsi puni pour avoir ruiné plusieurs villes de l’Hellespont.

En janvier 532, la sédition Nika [6] oblige Justinien à démettre Jean de Cappadoce de ses fonctions et à le remplacer par Phocas.

En novembre 532, Jean est restauré dans ses anciennes fonctions et cette seconde préfecture est marquée par de grandes réformes administratives. Ces réformes sous-entendent, dans leur ensemble, une hostilité sous-jacente à l’encontre des classes dirigeantes

Le 15 avril 535, il fait publier par Justinien “une novelle contre la vénalité des charges”, interdisant aux magistrats et aux gouverneurs d’acheter leurs charges. Il décrète également que le montant des taxes qui doivent être versées aux administrations chargées d’effectuer les nominations sera fixé par l’Empereur. Il supprime également la charge de vicaire, interposée entre le préfet du Prétoire et les gouverneurs de provinces et redéfinit les obligations des gouverneurs.

Il défend les paysans propriétaires contre l’empiètement des grands propriétaires en interdisant à ces derniers d’acquérir de nouvelles terres dans les communes rurales.

En 538, il s’attaque aux monophysites [7] d’Égypte et fait fermer leurs églises et, en 541, leur étend la loi contre les hérétiques en leur interdisant d’exercer toute fonction publique ainsi que de transmettre leurs biens par succession. Il en profite, à cette même époque, pour réformer l’administration et le diocèse égyptiens et met fin à l’unité administrative de cette région, renforçant l’autorité du patriarche.

Le nombre de lois édictées ou restaurées sous le gouvernement de Jean de Cappadoce font la grandeur de l’édifice juridique de Justinien. Ces lois donnent l’image d’un État organisé, dont le fonctionnement est réglé par des lois complexes et composées avec soin. Mais il doit aussi lutter pour qu’elles soient appliquées et pour que l’autorité de l’Empereur soit respectée.

En 537, Justinien lui reproche cependant de ne pas avoir repoussé sans hésitation les prétentions des hérétiques, donnant probablement foi aux accusations de paganisme portées contre lui.

En 540-541, il effectue un long voyage en Orient, où il est acclamé par les masses populaires, qui le remercient des mesures qu’il a prises contre les puissants, ce qui le présente comme un rival dangereux pour Justinien.

Jean de Cappadoce est détesté par l’impératrice Théodora. Celle-ci obtient, en mai 541, son renvoi en invoquant la participation de Jean à un complot destiné à renverser Justinien. Il est alors destitué de son ministère, dépouillé de ses biens et contraint de céder son palais à Bélisaire. Il est remplacé comme préfet par Théodote.

Il est ensuite exilé à Cyzique [8] et en 542, il est accusé de l’assassinat de l’évêque local et exilé en Égypte où il meurt, en 548.

P.-S.

Source : Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia Jean de Cappadoce/ Portail du monde byzantin/ Consul de l’Empire romain d’Orient

Notes

[1] Kayseri est une ville de Turquie, préfecture de la province du même nom, située dans la région de Cappadoce au pied du mont Erciyes. La ville se situe à 320 km de la capitale Ankara et 770 km d’Istanbul. Elle est anciennement connue sous le nom de Césarée de Cappadoce ou Mazaca.

[2] Scribe, archiviste. La souscription du notaire ou scriniaire, signalée comme rare sous le pontificat de Léon IX, redevint fréquente sous ses successeurs…

[3] Le magister militum est un officier supérieur de l’armée romaine durant l’Antiquité tardive. Son nom est souvent traduit par « maître de la milice » ou « maître des milices ».

[4] Le préfet du prétoire est l’officier commandant la garde prétorienne à Rome, sous le Haut Empire, et un haut fonctionnaire à la tête d’un groupe de provinces, la préfecture du prétoire, dans l’Antiquité tardive.

[5] Basileus signifie « roi » en grec ancien. L’étymologie du mot reste peu claire. Si le mot est originellement grec mais la plupart des linguistes supposent que c’est un mot adopté par les Grecs à l’âge du bronze à partir d’un autre substrat linguistique de Méditerranée orientale, peut-être thrace ou anatolien.

[6] La sédition Nika, « Sois vainqueur », qui signifie en fait « remportons la Victoire », à cause de son cri de ralliement est un soulèvement populaire à Constantinople qui fit vaciller le trône de l’empereur Justinien 1er en 532.

[7] Le monophysisme est une doctrine christologique apparue au 5ème siècle dans les écoles théologiques de l’empire byzantin. Cette doctrine tente de résoudre les contradictions de la foi nicéenne concernant la nature du Christ. La doctrine chrétienne s’est construite à l’origine autour du symbole de Nicée, c’est-à-dire la reconnaissance de la consubstantialité du Père et du Fils, tout comme de la nature humaine du Christ. Les monophysites, en revanche, affirment que le Fils n’a qu une seule nature et qu’elle est divine, cette dernière ayant absorbé sa nature humaine. Ils rejettent la nature humaine du Christ. En cela le monophysisme s’oppose au nestorianisme. Cette doctrine a été condamnée comme hérétique lors du concile de Chalcédoine en 451, tout comme la doctrine opposée. Malgré cela, sous l impulsion de personnages tels que Sévère d’Antioche, le monophysisme continue de se développer dans les provinces byzantines de Syrie et d’Égypte auprès des populations coptes tout au long du 6ème siècle, jusqu aux invasions perses puis arabes au tout début du 7ème siècle. Il fut également responsable du premier schisme entre Rome et Constantinople en 484. Le monophysisme est encore professé aujourd’hui, dans sa variante miaphysite. Ce sont les Églises préchalcédoniennes, arménienne, syro jacobite, copte, etc.

[8] Cyzique était une cité grecque de Mysie, sur la Propontide (l’actuelle mer de Marmara).