Bien que sa doctrine chrétienne soit mal assurée, il a été surnommé le Cicéron chrétien par les humanistes en raison de l’élégance de sa prose latine. Il ne fut jamais unanimement considéré comme un Père de l’Église [1].
La source principale concernant Lactance provient de Jérôme de Stridon dans son ouvrage “Sur les hommes illustres”.
Lactance est né en Afrique proconsulaire [2] vers 250 ou 260 dans une famille païenne. Il se convertit au christianisme à l’âge mûr, vraisemblablement avant 303, après avoir peut-être été l’élève de l’apologiste et rhéteur chrétien Arnobe .
Appelé entre 290 et 300 par l’empereur Dioclétien à Nicomédie de Bithynie [3], il y enseigne la rhétorique [4] latine. À Nicomédie, ville de langue grecque, il a peu d’élèves mais vraisemblablement des membres de la cour impériale, au nombre desquels probablement le futur Constantin 1er qui y réside jusqu’en 306.
En février 303, quand éclate la grande persécution, il démissionne de son poste de rhéteur et vit chichement, entamant alors une prolifique carrière d’écrivain chrétien. Au terme de la persécution, vers 313, Constantin l’appelle à Trèves [5] où il devient le précepteur de son fils Crispus. C’est probablement là que Lactance meurt, vers 325.
Ses lettres et ses vers rédigés avant sa conversion sont perdus. Après sa conversion, ses ouvrages sont dominés par un thème majeur, celui de la Providence.
Son livre principal, “les Divinae institutiones”, est composé de 7 ouvrages dans lesquels il cherche à expliquer aux païens, du moins à ceux qui possèdent de l’instruction, que le polythéisme est indéfendable et que la raison oblige à admettre les dogmes et la morale du christianisme.
Lactance est également l’auteur de De Mortibus Persecutorum [6], une œuvre polémique écrite vers 313-315. réapparue au 17ème siècle, dans laquelle il affirme que les empereurs persécuteurs sont de mauvais empereurs et ont connu une mort affreuse, ce qui est un châtiment divin. Il y attaque particulièrement l’empereur Galère, qu’il présente comme inspirateur de la persécution de Dioclétien.
On lui attribue un Carmen de ave phoenice [7], l’un des textes les plus riches sur le phénix.
Lactance est aussi l’auteur De “De ira Dei” [8], ouvrage dans lequel l’auteur essaie de montrer que le Dieu des chrétiens, capable de colère et d’indulgence doit être un modèle de bon prince. Il répond ainsi à une question classique chez les philosophes et rhéteurs de son temps : Comment admettre qu’un Dieu tout puissant soit soumis à cet adfectus qu’est la colère, comment admettre qu’il fasse preuve d’une indulgence coupable envers ses ennemis ?
Son style classique, caractérisé comme une réélaboration de Cicéron, le font considérer par des humanistes comme Pic de la Mirandole , Rudolph Agricola et Érasme comme le Cicéron chrétien, malgré une doctrine chrétienne mal maîtrisée et archaïque qui, par exemple, ignore l’Esprit Saint qu’il confond avec le Verbe dont il fait le premier fils de Dieu, dont le second est, à le suivre, le Diable.
L’Histoire littéraire de la France [9] lui consacre un chapitre.
Lactance partage avec Constantin une vision théologico-politique du monde et de l’histoire centrée sur les thèmes de la Providence et de la colère divine. Il développe une conception de l’histoire marquée par une forme de fatalisme. Le monde est pour lui entièrement dirigé par la Providence de Dieu tandis que tout ce qui advient, en bien comme en mal, concourt à la réalisation de la justice divine.
Lactance estimait que les textes bibliques n’étaient pas d’une grande qualité littéraire. Si cette considération, fréquente parmi les auteurs chrétiens de son temps, ne les empêchait généralement pas de s’appuyer sur les écrits bibliques et évangéliques pour présenter le christianisme, elle a conduit Lactance à rédiger une œuvre ancrée dans la culture littéraire et philosophique de son temps, qui puisse servir de propédeutique [10] au christianisme, mais qui laisse presque complètement de côté les écritures chrétiennes.
Au livre II de ses Institutions divines, Lactance mêle deux traditions gnostiques [11] celle des Jubilés et celle du livre d’Hénoch pour interpréter le rôle des anges parmi les hommes : d’après la première tradition, Dieu aurait fait descendre les anges sur la terre pour y instruire les hommes et y faire le bien ; selon la seconde, les anges se seraient faits les instruments de Satan.
Les appréciations portées sur l’œuvre de Lactance sont diverses. Il a influencé Augustin d’Hippone et Jérôme de Stridon : ce dernier estimait que son œuvre était comme un fleuve d’éloquence cicéronnienne, mais il regrettait que l’auteur ait consacré plus d’énergie à détruire les doctrines des autres qu’à présenter celle des chrétiens. Par suite, à la fin du 5ème siècle, un texte attribué au pape Gélase a fait état d’un dualisme chez Lactance entre un Dieu bon et un Dieu de colère, et a situé son œuvre parmi celles à ne pas lire. Ce jugement a fait que Lactance ne fut jamais unanimement considéré comme un Père de l’Église, bien que l’étude de ses œuvres occupe une place importante dans le champ de la patristique latine.
L’ancrage de l’œuvre de Lactance dans la littérature de l’Antiquité plutôt que dans les écritures chrétiennes amènera les humanistes de la Renaissance à le reconnaître comme l’un des leurs. Lactance est très lu et apprécié jusqu’au 18ème siècle, époque à laquelle son style véhément et polémiste commence à susciter du rejet. Raillé par Voltaire qui en fait le parangon du Père de l’Église ignorant, véhément et qui prétend tout savoir avec orgueil, Lactance est ensuite méprisé par la critique universitaire. L’intérêt pour son œuvre s’est renouvelée au 20ème siècle.