Les Français l’appellent la Moskowa. Les Russes parlent de Borodino. Qui a vraiment gagné cette bataille ? Les Russes, qui, en reculant, ont ouvert la route de Moscou - et conduit les Français à leur perte, quelques mois plus tard ? Ou bien les Français, qui sont entrés dans la capitale russe ? Les spécialistes parlent de victoire tactique et de défaite stratégique. Le résultat final est négatif pour Napoléon .
Napoléon est engagé depuis le mois de juin en Russie. Dès le début de la campagne, il cherche une bataille pour détruire l’armée russe. Mais, sous les ordres du général Barclay de Tolly , les Russes se dérobent, évitent tout affrontement majeur.
Barclay de Tolly est remplacé au commandement de l’armée russe par Mikhaïl Koutouzov qui poursuit le repli de ses troupes. Sous la pression des généraux, et pour ne pas laisser les Français entrer dans Moscou sans combat, Koutouzov se résout à attendre Napoléon près du village de Borodino [1].
Avec près de 140.000 hommes à sa disposition, il établit une solide position défensive au sud du village. Ses soldats bâtissent des redoutes où il fait placer des canons, 640 pièces d’artillerie au total. Le centre russe est installé sur la Grande Redoute.
Napoléon a 128.000 hommes, dont les corps de Ney , de Davout , de Junot , du prince Eugène de Beauharnais et de Joseph-Antoine Poniatowski . La Garde demeure au côté de l’Empereur. Les troupes napoléoniennes sont appuyées par 590 canons.
Dès 3h du matin, les soldats français prennent les armes. Le premier coup de canon est donné à 5h30 : Ney et Davout attaquent la colline des Trois Flèches où se tient l’avant-garde russe. Eugène, au nord, attaque le village de Borodino. Il attend que Ney et Davout aient pris la redoute des Trois Flèches pour se rabattre sur le centre russe. Dans l’assaut, Davout est blessé. Jean Rapp prend le commandement, et, appuyé par Ney, s’empare de la position russe.
A 9h30, Murat arrive avec l’ensemble de la cavalerie française. Il charge les Russes et balaie le plateau entre la redoute des Trois Flèches et la Grande Redoute. Les Français lancent une attaque combinée en direction de la Grande Redoute : Eugène par le nord, Victor de Faÿ de Latour-Maubourg au centre. Mais Davout, qui est revenu prendre son commandement, et Ney ne peuvent exploiter la situation.
Murat demande à Napoléon des renforts, pour écraser le centre russe. La réponse de l’Empereur est catégorique : Et s’il y a une seconde bataille, avec quoi la livrerai-je ?.
Vers 10h, les Français concentrent une grande batterie de 400 canons pour balayer les positions russes. Les Français attaquent la Grande Redoute : Eugène au nord, Ney et Murat au centre, appuyés par le corps de Junot . Les assauts français sont appuyés par l’artillerie. Les soldats russes parviennent à repousser les Français. Les pertes sont lourdes des deux côtés. Piotr Ivanovitch Bagration , qui commande le centre russe, demande des renforts, mais Kutuzov ne veut pas dégarnir ses ailes. La cavalerie française lance un nouvel assaut contre la Grande Redoute, elle est repoussée. Bagration se place à la tête de ses hommes : il est tué.
Vers 14h, la cavalerie française contre-attaque. Les régiments français parviennent à tourner la position russe. A 15h, les Français sont maîtres de la Grande Redoute. Mais le centre russe n’est pas brisé. Napoléon hésite à employer ses réserves pour détruire le centre de Kutuzov, d’autant plus que la cavalerie russe attaque le flanc gauche de l’armée française. En vain.
De 15h à 18h, la bataille se stabilise au centre. Les Français installent leur artillerie et canonnent les Russes qui reculent. A 20h, la bataille prend fin. Les Français ont eu 9.000 morts et 15.000 blessés. Les généraux Montbrun , Auguste Jean-Gabriel de Caulaincourt , Tharreau et 6 autres ont été tués. Les Russes perdent environ 45.000 hommes, tués et blessés dont le général Bagration.
Les Russes se replient vers Moscou, qu’ils évacueront quelques jours plus tard. Napoléon fait rédiger un bulletin, pour annoncer sa victoire. Il appelle la bataille, bataille de la Moskowa, du fait de la proximité du fleuve et pour montrer que la bataille se déroule près de Moscou. Si l’Empereur a gagné la bataille, la victoire n’est pas complète : l’armée russe n’est pas entièrement détruite, et sa volonté demeure intact.